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Billet de blog 22 mars 2021

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Vaccins - le désastre européen

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Vaccins : le désastre européen

Comme moi, vous ne comprenez pas comment l’Union européenne est incapable de vacciner en masse pour lutter contre le Covid. Bien sûr, si vous écoutez les responsables politiques, la stratégie est en bonne voie pour réussir. D’ici à l’été prochain, tous les Européens qui le voudront auront été vaccinés. Dans la vraie vie, presque plus personne ne croit ces belles promesses. La vérité, c’est que les États-Unis et la Grande-Bretagne ont vacciné trois fois plus de personnes que la France ou l’Allemagne, par rapport à leur population. 25% des Américains, 40% des Britanniques ont reçu une injection, contre 9,6% des Français et 8,7% des Allemands. 

Bon, en France, on peut comprendre. Après le scandale des masques, des tests et des vaccins, le gouvernement s’est révélé le champion de l’impréparation, de l’amateurisme et de l’incompétence administrative. En France, on n’a pas de pétrole, mais on a des fonctionnaires qui vous pondent des protocoles de 54 pages pour vacciner dans les maisons de retraite et des attestations de 15 rubriques pour décider quand on peut sortir de chez soi ! En France, il y a sept instances qui décident sans se concerter comment gérer la vaccination. Les ministres ne se font pas vacciner, pour ne pas être accusés de favoritisme. On laisse un tiers des soignants décider qu’ils n’ont pas confiance dans les vaccins. Au lieu d’organiser des centres de vaccination, on fait appel aux médecins de famille et aux pharmaciens. Avant de découvrir qu’il n’y pas assez de vaccins. Un an après le début de la pandémie, on découvre que l’armée a les spécialistes pour organiser la vaccination.  Quand la vertueuse Allemagne suspend le vaccin AstraZeneca, sans se concerter avec le reste de l’Union européenne, le président Macron lui emboîte le pas, à la TV, sans explication. Mais le ministre français de la Santé est fier de lui : en un week-end, on a vacciné 300 000 personnes. Sauf que, en Grande-Bretagne, on a vacciné 660 000 personnes. Et qu’en un week-end, 6 millions d’Américains ont reçu leur dose.

A Bruxelles, c’est le même niveau d’incompétence et de suffisance technocratique. Sous la houlette de la présidente de la Commission, l’UE a cru faire un grand coup en centralisant les commandes de vaccins aux fabricants. Sans se préoccuper du respect des contrats et de la logistique. Comme si fabriquer et distribuer des vaccins, c’était aussi simple que produire des yaourts. Résultat : les fabricants ne livrent qu’une partie des commandes et la Commission se fâche. Le commissaire français Thierry Breton se rengorge comme un coq en affirmant : « Prenons une date symbolique : le 14 juillet, nous avons la possibilité d’atteindre l’immunité au niveau du continent. C’est la dernière ligne droite parce que nous savons que pour vaincre cette pandémie, une seule solution : se faire vacciner. Les vaccins arrivent, ils seront là. Entre le mois de mars et le mois de juin, on va livrer entre 300 et 350 millions de doses de vaccin ». Tout le monde ricane, cause toujours ! Le problème, c’est que l’Europe n’a pas un gouvernement, mais une Commission sans réel pouvoir de décision. Ce sont les États membres qui tiennent le cordon de la bourse et qui décident. Il faut mettre d’accord 18 gouvernements, aux prises avec leur opinion publique. 

Les députés européens se sont étranglés, lorsqu’une ministre belge a révélé par erreur les prix des vaccins, dans les contrats conclus avec les laboratoires. Comme s’ils ignoraient que les contrats entre gouvernements et sociétés pharmaceutiques comportent toujours des clauses confidentielles. Les vaccins sont une mine d’or pour les Big Pharma et ils ne sont pas prêts à accepter leur responsabilité dans le développement et l’usage des vaccins. Ce sont les gouvernements qui passent des contrats qui sont responsables, devant des tribunaux d’arbitrage internationaux. 

Dans le New York Times, l’ancien Prix Nobel d’économie Paul Krugman explique ce "désastre européen". Ce n’est pas la faute des responsables politiques. C’est qu’ils ont peur de faux risques. Peur de trop payer les pharmas, peur que les vaccins ne soient pas efficaces, peur que leurs concitoyens refusent les vaccins. Alors que le vrai risque, c’est que le Covid tue, parce que les vaccins arrivent trop tard. Les Américains n’ont pas ce genre de débat moral. Même Trump, pourtant convaincu que le Covid n’était qu’une grippette, avait convoqué les dirigeants des laboratoires et leur avait alloué des milliards de dollars pour qu’ils produisent des vaccins. Foin des débats européens sur les profits "scandaleux" des Big Pharmas et sur la gratuité des vaccins. Trump avait négocié durement avec Pfizer, Moderna et AstraZeneca en leur imposant des conditions et des délais. Les Américains avaient vite compris que les vaccins ne sont pas des produits comme les autres. Ce sont des biens stratégiques. Le président Biden, dès son entrée en fonction, avait fait de la vaccination sa priorité. Et il s’en était donné les moyens. Il avait promis 100 millions de doses. Ils en ont déjà reçu 106 millions. Chaque jour, plus de 2 millions de vaccins sont administrés aux Américains.

Dans la guerre au Covid, les États-Unis ont une longueur d’avance. Et l’Union européenne n’est pas près de les rattraper. Ses bureaucrates de géant l’empêchent de voler ! 

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