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Billet de blog 16 mars 2012

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Education: Plaider pour la création d'Etablissement Publique de Pédagogie Nouvelle

Les problèmes posés par des bavardages de plus en plus fréquents en cours ont actuellement les faveurs des médias. Chacun pose des hypothèses sur le changement du rapport que les jeunes entretiennent avec l’institution scolaire, avec le savoir, la discipline et la concentration. Le phénomène du bavardage est, à mon sens, d’une nature semblable à la question du décrochage scolaire. 

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Les problèmes posés par des bavardages de plus en plus fréquents en cours ont actuellement les faveurs des médias. Chacun pose des hypothèses sur le changement du rapport que les jeunes entretiennent avec l’institution scolaire, avec le savoir, la discipline et la concentration. Le phénomène du bavardage est, à mon sens, d’une nature semblable à la question du décrochage scolaire. 

La nature en est identique : ces deux phénomènes interrogent sur l’adéquation entre les méthodes pédagogiques mises en œuvre et les caractéristiques des élèves. Les conséquences du bavardage sont variables, celles du décrochage scolaire le sont moins.

L'exclusion scolaire, pour l’élève, naît d’un sentiment, le sentiment de ne pas pouvoir trouver sa place dans l'enseignement tel qu'il est dispensé dans l'éducation nationale et plus généralement dans l'ensemble des centres de formation. Ce sentiment est la  résultante du parcours d'un individu qui, à un moment ou un autre de sa scolarité, a rencontré une phase de décrochage scolaire. Le décrochage ne doit pas être entendu dans son acception habituelle, un enfant qui décroche n'est pas uniquement un élève qui n'a pas obtenu le diplôme minimum auquel il aurait dû prétendre. Le décrochage scolaire est le fait pour un élève de rompre, ponctuellement ou durablement, son lien avec l'établissement scolaire qu'il est censé fréquenter. Ce lien peut être physique (l’élève ne se rend plus sur son lieu de formation) ou cognitif (il est en cours mais n’assimile pas son contenu).

 Ces phases de décrochage peuvent autant être des passages brefs, durant lesquels l'enfant ne comprend ni le sens de sa présence en cours, ni le contenu des cours qui lui sont dispensés qu’être de longue durée. Lorsque ces phases sont brèves, ce sont les capacités d'autonomie de l'enfant, sa sécurité affective, la mobilisation de ses parents et de ses proches, voir la mobilisation des "éducateurs" (enseignants, éducateurs, ...) qui rendent cette brièveté possible. 

Néanmoins, ces phases de décrochages peuvent s'étaler sur un temps plus important et prendre une plus grande ampleur. Certains élèves plongent complètement lorsque leur est demandé la maîtrise des savoirs de bases (écriture, lecture, bases du calcul).  Certains de ces élèves plongent sans que ni l’investissement de leur proche, ni du milieu éducatif ne puisse enrayer la dynamique de rupture qui est alors la leur.

Et qu’on ne vienne pas me parler de parents démissionnaires ! J’ai suivi dans ma profession d’éducateur des enfants décrocheurs qui avaient derrière eux des parents investis et solides. Des parents qui constataient qu’ils ne pouvaient contraindre leur enfant à se rendre à l’école. Des parents qui accompagnaient leur enfant jusqu'à la porte du collège, convaincus que rendu à la porte l’enfant ne ferait pas demi-tour et qui apprenait dans la journée que leur enfant en était ressorti, ou n’y était jamais allé. J’ai vu des parents de classe moyenne vivre le cauchemar de l’enfant qui ne veut plus se former, qui ne veut plus rien, qui  vit la nuit et dort le jour.

Alors bien sûr les familles les plus défavorisées sont celles où l’on trouve le plus de décrocheur, mais la lutte contre l’absentéisme n’est pas de la seule responsabilité des parents (et les parents qui luttent ne trouvent pas toujours de solution adaptée).

Les académies en Région parisienne connaissent entre 5.000 et 15.000 élèves perdus de vue. C'est-à-dire n’étant officiellement inscrit dans aucun lieu d’insertion et ayant interrompu une formation avant l’obtention d’un diplôme.  A ceux-ci il est impératif d’ajouter l’ensemble des jeunes qui passent de classe en classe malgré une moyenne catastrophique. Ceux là arrivent parfois jusqu’en classe de 4eme ou de 3eme mais en ayant un socle correspondant parfois à un élève de cm2. Ils seront dans le meilleur des cas orientés dans des voies professionnelles, le plus souvent en C.A.P. Ces jeunes pour qui la présence à l’école n’a que peu de sens se retrouveront confrontés à des périodes de décrochage.

Pire ce sont des jeunes qui ont une vision lucide de la vie qui les attend. Du haut de leur 14 ans ils décrivent leur condition de vie, la faiblesse de leur futur pouvoir d’achat, les périodes de chômages…. .

Le discours fataliste de ces jeunes doit alerter la société : On doit donner de l’espoir à la jeunesse. Etre fataliste à 14 ans n’aide pas à l’épanouissement de l’enfant.

L’éducation nationale recense plus de 280.000 élèves » décrocheurs », Luc Chatel, Ministre du lieu, précise « 60.000 sont en apprentissage et 80.000 suivi par pôle emploi » .

Les 80.000 jeunes suivis par Pôle Emploi parce que n’étant plus dans les dispositifs de formation de l’éducation nationale doivent être considérés comme étant en recherche de formation comme doivent l’être les élèves perdus de vue. C'est pour 220.000 jeunes, enfants que nous devons nous imposer de rénover notre système éducatif. Il n’existe pas de système éducatif parfait, mais nous pouvons attendre mieux qu’un système qui fabrique autant d’exclus de la formation générale (droit commun). L’éducation national annonce le chiffre de 7% de décrocheurs mais ces décrocheurs ne sont que la partie visible des élèves en difficulté dans l’enseignement scolaire tel que dispensé actuellement.

Depuis 100 ans sont expérimentés d’autres pédagogies. Certaines ont été utilisées au bénéfice d’un grand nombre d’enfants. En particulier, la pédagogie inventée par Maria Montessori pour venir en aide aux enfants de la rue démontre ces bons résultats. En France, cette pédagogie est réservée a une élite. Aucune famille modeste ne peut supporter le coût de la scolarité d’un enfant dans  l’un de ces établissements (500euros/mois).

Il est de la responsabilité de l’Etat d’offrir des alternatives pédagogiques aux familles les plus défavorisées. L’égalité des chances est à ce prix. Les classes aisées ont accès a un grand panel d’établissements. Pour les classes populaires il n’y a que la SEGPAet la voie professionnelle. Il n’y a pas d’institution qui permette de remonter la pente pour un enfant décrocheur. La scolarité apparaît comme une série de déclassements partant de la section général et aboutissant au CAP. 

Plutôt que de construire des internats dispendieux et ne bénéficiant qu’a un nombre limité d’élèves ,j’en appel à la construction d’Etablissement Publique d’Education Nouvelle. Ces établissements auront pour vocation d’offrir une alternative pédagogique aux enfants qui en auront besoin. Ils viseront à accompagner des élèves entre 10 et 15 ans dans l’objectif de leur offrir l’accès à un enseignement général au lycée. Ils viseront bien entendu et avant tout des objectifs d’épanouissement, de coopération et de socialisation mais il seront aussi des lieux de rattrapage du cursus général

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