Sébastien THIERY

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Billet de blog 30 octobre 2016

Sébastien THIERY

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Tout autour, tout contre. Considérant (autrement) les migrants de Stalingrad à Paris.

Vendredi 14 octobre, Place Stalingrad, suivant les mots de Camille de Toledo, Kantuta Quiros et Aliocha Imhoff tirés de leur ouvrage "Les Potentiels du Temps" (Manuella éditions, 2016). Un texte écrit par Sébastien Thiéry, coordinateur des actions du PEROU (www.perou-paris.org), pour la revue Lignes, et son numéro à paraître à l'hiver 2016 intitulé "Vouloir l'impossible".

Sébastien THIERY

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

« L’inadéquation entre des structures étroites et des aspirations infinies est la faille que la pensée potentielle cherche à exacerber ».

Il est 9h45. Quelques badauds s'attroupent en surplomb du Canal Saint-Martin, sur le promontoire que forme une portion de la Place de la Bataille de Stalingrad qui n'a de place que le nom : à l'exception de ce large trottoir, elle se compose de deux double-voix d'une circulation dense et constante. Comme survolant le petit groupe rassemblé là, suivant l'arc-de-cercle que dessine le chemin de fer du métro aérien à l'a-pic du trafic routier, les rames de la ligne 2 filent dans un vacarme ordinaire. En contre-bas, à l'embouchure de l'étroit tunnel sous-terrain qui traverse la dite « place » et relie Canal Saint-Martin et Bassin de la Villette, l'eau paraît stagner. Elle fait miroir, reflétant silhouettes, métro, et gris du ciel automnal. Rive droite, sommeille encore le Point Ephémère, haut-lieu des soirées parisiennes. Un joggeur fluorescent détale sur le quai où le soir se déversent les fêtards. Quelques riverains hagards y promènent leur chien, sinon leur solitude. Rive gauche, en presque vis-à-vis de l'établissement de nuit, deux lignes d'une trentaine de tentes multicolores s'étendent à fleur de bassin. Les petits igloos de toile sont, pour la plupart, harnachés à une rambarde haute de quelques centimètres à peine courant sur toute la longueur du quai. Malgré les cordes et les nœuds, ils flottent doucement au vent léger, laissant apparaître ici ou là quelques amoncellements de cartons venus consolider l'installation. En amont, le campement vient buter sur le promontoire, à quelques mètres à la verticale sous les pieds et les regards des badauds. A l'aval, sur ce qui pourrait tenir lieu de seuil du campement, le passage est obstrué par une formation statique et compacte d'une dizaine d'hommes en uniformes. Sur l'étroite voix oblique d'une vingtaine de mètres reliant le quai de cette rive gauche au trottoir de la dite « place », le dispositif policier se prolonge à la force d'une vingtaine d'hommes organisés en dit « cordon ». Ainsi ceinturée, contenue, scrutée, la centaine d'occupants du campement se dresse immobile au milieu des deux lignes de tentes. L'étroite scène de vie de ces réfugiés figure au centre de l'attention, au beau milieu d'un paysage urbain qui semble à cet instant précis s'organiser autour d'elle. Simultanément, la ribambelle d'uniformes opère telle une césure sur le territoire, y dessinant quelque chose comme un « hors-lieu ». Sous l'empire du dispositif policier, le campement n'existe que paradoxalement : il tient suspendu à sa propre disparition.

« Le potentiel est ce qui toujours s’ouvre à ce qui pourrait être, à ce qui serait, à ce qui devrait être. Il propose de faire du conditionnel le temps de nos habitations ».

Il est 10h00. Quelques passants se pressent sur l'esplanade de la Rotonde de la Villette. L'imposant monument, situé à l'extrémité nord de la Place de la Bataille de Stalingrad, se dresse face au bassin de la Villette. Construit par Claude Nicolas Ledoux juste avant la Révolution, il sert alors de barrière d'octroi du mur des Fermiers généraux. Aujourd'hui, il fait office de bar-restaurant affublé, en ses pourtours, de généreuses terrasses chauffées. En demi-cercle, l'esplanade se déploie devant le bâtiment sur un rayon d'une centaine de mètres, échouant au nord sur le bassin de la Villette. Sur une large partie de son périmètre, à droite comme à gauche de la Rotonde, ce demi-cercle voit se dresser des butes d'une dizaine de mètres de haut. Sur les flancs, ces butes présentent six escaliers pour l'une, quatre pour l'autre, séparés par des étendues d'herbes sèches et clairsemées. En leur sommet, ces deux butes proposent une coursive qui tient lieu de point d'observation privilégié sur les environs. Sur le flan droit de cette Place de la Rotonde sont constitués deux groupes d'une cinquantaine de personnes chacun. Ces femmes et ces hommes viennent pour la plupart des multiples campements alentours installés sur quais, esplanades, trottoirs et autres étendues disponibles. Assis sur deux rangées d'escaliers, serrés les uns contre les autres de la première marche jusqu'à la dernière, les réfugiés font face à deux petits tableaux blancs. Chacun tient dans ses mains une feuille de papier et un crayon, y recopiant des lettres, des mots, des phrases. A la baguette de ces cours de français organisés par le BAAM (pour « Bureau d'Accueil et d'Accompagnement des Migrants »), un homme pour le groupe plus au nord, une femme pour le groupe plus au sud. Celle-ci, en réalité, chante bien davantage qu'elle ne donne sa leçon. Face à elle, c'est non une classe mais un choeur qui répète consciencieusement chacun de ses phrasés. C'est un écho bientôt puissant, une transe par moments. Les mains de l'enseignante, ouvertes et jetées au devant d'elle, portent chacune des syllabes à l'auditoire sur-attentive. Ses jambes arc-boutées font balancer son corps d'avant en arrière. C'est une incantation, une invocation formidable, une danse retentissante. Jaillissent par moments quelques rires aux éclats. Des passants font halte, écarquillent les yeux. Certains s'assoient parmi les dits « apprenants ». Une œuvre saisissante a lieu, une charge contre le marasme ambiant. Une assemblée se tient là, droite, au devant d'une conquête.

« Aux présents suroccupés, la pensée potentielle oppose des présences. Etre là, non dans l’enracinement des causes et des fatalités, mais pour s’arracher à la liste des échéances, surprendre les futurs déjà écrits, s’obliger à désoccuper l’avenir ».

Il est 10h15. Une pelleteuse et trois hommes en combinaison blanche, façon intervention chirurgicale, ont rejoint sur le quai les hommes en uniformes. Quelques pions disposés sur un échiquier déjà dissymétrique, quelques rouages supplémentaires d'une mécanique lente et certaine. Les hommes pris au piège rassemblent quelques affaires, se tiennent à quelques mètres de la formation compacte qui obstrue toujours le chemin de leur fuite. Sur la rive en face débute le premier cours d'un studio de projet qu'avec Charlotte Cauwer, architecte associée au PEROU, nous développons à l'Ecole nationale supérieure d'architecture de Paris Malaquais. « Construire l'Action », tel en est l'intitulé. Il s'agit de faire école hors les murs, considérant que les crises se déclarant dans la ville sont l'affaire des étudiants qui l'habitent. Il s'agit d'affronter la violence qui prolifère avec les armes de la création, avec les ressorts du projet, avec la complicité d'une jeunesse désireuse. Il s'agit d'inviter à nous rejoindre d'autres écoles, d'autres groupes d'étudiants, d'autres laboratoires de recherche et de faire ainsi s'activer « l'Ecole des Situations » du PEROU : une constellation oeuvrante au travail de produire des savoirs naissant sur les chantiers à venir, au défi de faire mourir aussitôt que possible ce qui s'éteint laborieusement sous nos yeux. A l'orée de ce premier cours du semestre avec la vingtaine d'étudiants qui nous accompagne, nous commençons par tenir les yeux rivés sur les hommes qui s'avancent, sur les hommes qui reculent. A l'appui d'une petite enceinte portative que nous installons sur le quai, nous diffusons simultanément la voix de Bernard Heidsieck. Résonne ainsi « Tout autour de Vaduz », fameuse psalmodie créée en 1974 par le poète sonore à partir de la liste des peuples habitant les pourtours de la capitale du Liechtenstein, micro-pays s'il en est. En presque douze minutes, partant des lisières de Vaduz, le chant composé de proche en proche nous entraîne tout autour du monde. Sous nos yeux on coupe et découpe, casse et fait disparaître ; dans nos oreilles on considère et accueille, compose et construit. C'est un point de départ : nous travaillerons à coudre à la main, à arpenter le chemin des proximités, à reconstruire l'infini du monde ici-même, à recomposer les nous-autres que nous ne cessons de devenir, à faire retentir des histoires inouïes. Un homme en uniforme sort une camera. Au poing, il filme l'assemblée que nous formons outre-rive. Ce faisant, il enregistre l'oeuvre extraordinaire du poète, l'inscrivant au registre des archives de la gendarmerie nationale. Les failles sont béantes, les troupes ridicules. Chacun sait que les manœuvres en cours sont désespérantes et désespérées ; chacun sait que le campement se reformera quelques heures plus loin. Ce théâtre ne tient là que de la pauvre fascination qu'il opère, que de la puissance qu'on lui prête. En réalité, il n'y a rien à voir. Rien n'a lieu, rien ne fait lieu. En réalité, ici-même, nous n'avons rien à apprendre. Nous plions donc bagages alors que les réfugiés s'échappent enfin, se rapprochant d'associations qui leur fourniront de nouvelles tentes pour ce soir. Nous quittons le quai rive droite alors que, rive gauche, entrent en jeu les hommes déguisés en blanc pour mimer le risque d'épidémie, et que les accompagne la pelleteuse qui détruira le campement comme s'il s'agissait d'une forteresse. Nous nous dirigeons sur la place de la Rotonde où, sans matériel rutilant, retentit une salve d'avenir.

« Les fictions qui nous sont imposées depuis le début du XXIe siècle sont des « enclosures ». Elles remplissent le présent d’hypothèses fermées ».

Il est 11h15. Sur place publique, par voie de presse ou d'affichage, un concert d'indignation occupe les esprits et organise la controverse sur le dit « problème des migrants ». Alors même que des dizaines de personnes chantent l'alphabet sur la Place de la Rotonde parvient dans la boîte mail du PEROU une pétition signée par d'éminents intellectuels narrant l'histoire d'un Etat social-traitre, gouverné par le néo-libéralisme et le Grand Capital omnipotent. Son titre : « Solidarité avec Calais et les migrantEs ». C'est qu'à Calais, la situation se tend et une procédure en référé vient d'être déposée la veille au soir par les associations pro-migrantes. La douleur et la détresse, la violence et ses logiques structurelles y sont surexposées. Elles saturent ainsi la pensée commune, l'accablant d'un interminable récit des impasses, d'une exaspération inlassablement ressassée. Sur des affichettes flanquées à même les immenses pilonnes supportant le passage de la ligne 2 du métro aérien, les mots « rafles », « crimes » et « racisme » jouxtent des pictogrammes de silhouettes courbées et fuyantes. La fascination du pire prolifère d'un pas cadencé, au rythme de celui des troupes misérables et de leurs actions sans avenir. Dans le même élan, la plainte ne cesse de se porter en haut-lieu, instituant l'Etat comme tout à la fois responsable du vaste désastre et responsable des solutions heureuses. Paradoxe des temps présents : aux agents d'un prétendu « fascisme » qui ne dirait pas son nom, on réclame avec fermeté un geste de clémence et de bonté, la « prise en charge » enfin de migrants prétendument « vulnérables », « d'une part » tout au moins de cette foule malheureuse. « Faire l'effort », tel est le leitmotiv des élus de gauche de la Mairie de Paris en cette rentrée d'année électorale, en contrepoint des interventions policières quotidiennes programmées sur le territoire non sans l'appui des équipes municipales. Ainsi, à l'heure précise où un camion de la propreté de Paris vient parfaire le nettoyage du quai du Canal Saint-Martin, d'autres agents municipaux font s'activer d'autres machines à quelques centaines de mètres plus au nord afin de parachever l'aménagement d'une ancienne halle ferroviaire pour y accueillir un « camp ». Porte de la Chapelle, 400 réfugiés y trouveront dans quelques jours le gîte. Dans cet abris de bord de périphérique aménagé en vaste dortoir, ils seront « accueillis » par des travailleurs experts en « diagnostics sociaux » et dirigés, sous dix jours ouvrés maximum, vers des « Centres d'Accueil et d'Orientation » ouverts sur le territoire français. Ainsi se déroulent les plans d'une politique dite « généreuse » traduite en opérations de gestion de crise. Ainsi s'administre l'hospitalité, de dispositifs en dispositifs, de « prises en charge » en « orientations » mobilisant expertises sociales et sanitaires. Ainsi se gère le flux humain, avec l'humanité caractéristique des temps présents, avant retour à la normale assure-t-on, et reprise des activités régulières entre parisiens fêtards, hagards, badauds et passants. Demeure hors champ du « problème des migrants » ce qui ne relève pas dudit problème, ce qui s'affirme, se construit, s'invente, comme autant de traces d'un avenir encore inimaginable, comme indices d'un futur insistant. Demeurent donc impensés en tant qu'actes porteurs d'une puissance collective recouvrée les surgissements observables tout autour, tels que ce cours de français heureusement baptisé « Bienvenue chez toi » par le BAAM. Au mieux apparaît-il dans le fil de l'histoire officielle comme une brève logée dans la rubrique « solidarité citoyenne ». Aux cris d’orfraie frappés d'incontestabilité morale répondent des gesticulations grandioses d'acteurs public passablement désorientés, inaptes aux mondes qui viennent et aux mouvements des populations qui les constitueront. A l'affliction généralisée répondent des solutions massives et accablantes. Au ballet des pelleteuses détruisant un campement s'articule celui de pelleteuses construisant un camp.

« Il manque à ce monde, un principe d’expansion. C’est ce principe d’expansion que la pensée potentielle cherche à établir à toutes les échelles de nos existences individuelles et collectives ».

Il est 12h00. Les badauds ont quitté le promontoire où les ont remplacés quelques occupants de feu le campement. Ceux-ci observent, matelas, baluchons et couvertures en mains, la fin des opérations de nettoyage en contrebas. Rive droite, le Point Ephémère a ouvert ses portes. Quelques clients en occupent déjà la terrasse, des musiciens commencent à l'intérieur la mise en place de leur matériel pour le concert du soir. Nous nous retrouvons avec les étudiants en architecture dans l'une des généreuses salles de l'établissement en compagnie de Baptiste Pelletan, initiateur du projet « Bienvenue chez toi » du BAAM, afin d'établir les plans du travail à venir.

Nous décrirons, et redécrirons, ce qui a lieu, ce qui fait lieu, afin de re-présenter autrement la situation de Stalingrad, de la rendre littéralement « autrement présente au monde ». A la force de cette politique, en actes, d'une attention renouvelée, nous nous affranchirons des savoirs martelés nous inculquant qu'il n'y a rien de fondamental à apprendre, et suivrons l'expérience de ce qui s'invente en contrefeu du désastre, en contrepoint des plaintes nous acculant à l'impuissance et la tétanie. Nous cartographierons tous les attachements et tous les harnachements, nous documenterons les gestes et les actes d'hospitalité risqués en dissidence, nous consignerons les présences bâtisseuses, nous en apprendrons ainsi sur notre puissance collective renouvelée. Nous ferons apparaître des constructions en puissance.

Nous fabulerons ensuite, et nous emplirons de l'ivresse d'écrire des récits d'avenir, de nous aventurer dans des futurs que l'on prétend impossibles. Nous mépriserons, par le projet, le présent gelé, assailli par un passé rejoué, et l'obsession généralisée pour tout ce qui termine, pour tout ce qui finit. Nous effacerons de nos plans stratégiques la formulation de ce que nous ne supportons plus, inhérente à la plainte et l'affliction, et démultiplierons sur la page de nos desseins des énoncés comprenant des « oui » en cascade, nous exerçant ainsi à des souffles nouveaux, à une pensée politique de l'affirmation enfin. Nous procéderons avec application à l'élaboration de plans sur des comètes, et décrirons à partir des lueurs d'ici le chemin exact nous reliant à ces horizons qui ne paraissent lointains que parce qu'ils ne sont pas visés. Nous envisagerons l'ailleurs comme le fruit d'un jardinage de l'ici, et tracerons le dessin d'à venir en jouant de multiples techniques d'augmentation, d'extension, d'exagération des présences réjouissantes rencontrées en chemin. Nous parlerons du présent comme d'un espace d'éclosion de tout ce qui peut et veut devenir. Nous décrirons Stalingrad, à revers des témoignages d'actualité l'instituant comme théâtre de notre défaite, comme un lieu de l'actuel, au sens où l'emploie Michel Foucault : comme théâtre de notre devenir.

Nous réaliserons enfin des promesses nécessaires, nous rendrons possibles ce que nous avions oublié d'imaginer, nous comprendrons l'architecture comme technique de consolidation de nos convictions. Nous créerons des passerelles entre les établissements alentours, et décréterons l'école comme activité centrale ou marginale des lieux de nuit et de jour, des restaurants et des théâtres, des trottoirs et des places. Nous ferons s'étirer l'espace de la solidarité active, tracerons au sol la mémoire et le devenir des constructions engagées, déborderons pour les engloutir les césures, empêchements, obstacles, cordons en tout genre. Nous débusquerons sur les murs du quartier les prolongements de tableaux bancs, sur les escaliers tout autour des extensions de l'amphithéâtre, sur les scènes à profusion les sols démultipliés à même d'accueillir la danse des enseignants. Nous ferons apparaître une école en constellation et, avec elle, le désir d'apprendre d'un corps étudiant sûrement pas « vulnérable » et, avec elle, le désir de transmettre d'un corps professoral constitué de riverains sûrement pas « exaspérés ».

« Ce que nous visons, lorsque nous proposons de réfléchir à des institutions potentielles, des musées potentiels, des écoles potentielles, des pédagogies potentielles, consiste prioritairement à définir, cerner, élaborer les multiples répertoires d’un savoir à naître ».

Demain matin, en ouverture du prochain cours que nous donnerons non loin d'ici­, nous commencerons par relire « Contre ! » écrit par Henri Michaux en 1934, afin de nous souvenir que s'il ne peut en être autrement, il n'en a jamais été autrement.

Je vous construirai une ville avec des loques, moi !
Je vous construirai sans plan et sans ciment
Un édifice que vous ne détruirez pas,
Et qu’une espèce d’évidence écumante
Soutiendra et gonflera, qui viendra vous braire au nez,
Et au nez gelé de tous vos Parthénons, vos arts arabes, et de vos Mings.
 
Avec de la fumée, avec de la dilution de brouillard
Et du son de peau de tambour,
Je vous assoirai des forteresses écrasantes et superbes,
Des forteresses faites exclusivement de remous et de secousses,
Contre lesquelles votre ordre multimillénaire et votre géométrie
Tomberont en fadaises et galimatias et poussière de sable sans raison.
Glas ! Glas ! Glas sur vous tous, néant sur les vivants !
Oui ! Je crois en Dieu ! Certes, il n’en sait rien !
Foi, semelle inusable pour qui n’avance pas.
Oh ! Monde, monde étranglé, ventre froid !
Même pas symbole, mais néant, je contre, je contre,
Je contre et te gave de chiens crevés,
En tonnes, vous m’entendez, en tonnes, je vous arracherai ce que vous m’avez refusé en grammes.
 
Le venin du serpent est son fidèle compagnon,
Fidèle, et il l’estime à sa juste valeur.
Frères, mes frères damnés, suivez-moi avec confiance.
Les dents du loup ne lâchent pas le loup.
C’est la chair du mouton qui lâche.
 
Dans le noir nous verrons clair, mes frères.
Dans le labyrinthe nous trouverons la voie droite.
Carcasse, où est ta place ici, gêneuse, pisseuse, pot cassé ?
Poulie gémissante, comme tu vas sentir les cordages tendus des quatre mondes !
Comme je vais t’écarteler !

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