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7 JANVIER 2018 - PAR YOUCEF BENZATAT
L’archéologie religieuse est parvenue à nous expliquer comment les rites païens sont réinterprétés et appropriés par les religions monothéistes pour les besoins de leur construction idéologique. Cette méthode est toute indiquée pour nous éclairer sur la construction mythologique autour de la Kaaba. Ainsi, Il est dit dans le Coran que ce serait Ibrahim qui l’aurait construite sur injonction de Dieu. Alors que l’archéologie des religions nous enseigne que la construction de la Kaaba fut un long processus qui résulta d’une série de facteurs qui se sont enchainés tout le long de sa cristallisation, jusqu’à son appropriation par le pouvoir politico-religieux musulman naissant. En substance, l’archéologie religieuse nous enseigne que ce sont les pratiques païennes des tribus nomades arabes qui ont présidé à son édification. Ces derniers étaient connus pour avoir comme dieu protecteur, pour chaque tente, une pierre noire, censée abriter « Rab El Beyt », une sorte de dieu personnel qui veille sur une famille ou une tribu entière, qu’ils transportaient au gré de leur pérégrinations dans le désert et qu’ils disposaient non loin de leur tente à chacune de leurs haltes. Au moment de leur sédentarisation à la Mecque une pierre de ce genre fut disposée à l’emplacement actuel de la Kaaba et fut entourée d’un muret, afin d’éviter que les animaux domestiques ne pénètrent dans ce lieu sacré et y déposer leurs excréments. Ce muret n’a cessé de s’élever à partir de ce moment, car en plus des animaux, la Mecque se trouvant dans une vallée, sujet à des crues épisodiques, le besoin se faisait de plus en plus d’élever ce muret afin d’éviter que la pierre protectrice ne soit emportée par le torrent de boue que les crues successives déversaient. Cette pierre est enchâssée aujourd’hui dans l’un des angles de la Kaaba. Un secret bien gardé et interdit d’enseignement dans les programmes de l’éducation nationale, où le mythe est professé comme une vérité dogmatique et quiconque déroge à cette règle est considéré comme apostat. Les conséquences d’une telle imposture font que la population musulmane est condamnée à l’aliénation dans l’imaginaire mythologique religieux et il serait donc impossible pour elles de franchir le pas vers la contestation, d’une citoyenneté républicaine, laïque et démocratique et qui l’amènerait à remettre en question les régimes totalitaires qui prennent en otage leurs libertés individuelles et politiques. C’est ainsi que la mosquée Bouteflika se dresse aujourd’hui comme un immense muret pour boucher tous les horizons vers les lumières citoyennes et démocratiques, devant lequel les intellectuels et les journalistes qui ont la barbe qui pousse à l’intérieur se murent dans un silence complice.