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Billet de blog 27 octobre 2014

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Ukraine : Porochenko dégringole déjà, abstention aux étoiles - Marco Santopadre. Documents : exécutions sommaires en Ukraine.

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27.10.14  -  Pendant que nous écrivons, n'ont pas encore été divulgués les résultats définitifs des élections organisées hier en Ukraine - du moins les territoires qu'elle contrôle ou occupe - par le régime nationaliste issu du coup d'état philo-occidental de février. A rendre difficile le décompte, c'est sûrement la forte différenciation politique entre telle et telle région du pays, ainsi que la forte désagrégation du cadre politique, caractérisé par un marché consistant d'achat-vente des voix - coût moyen 12 euros - et par la prolifération de partis personnels fondés dans les dernières semaines par des oligarques à la recherche d'une place au soleil.

Le seul donné certain pour l'instant est que le bloc chapeauté par le président Petro Porochenko n'a pas du tout percé comme avait été par contre prédit par les sondages. Pendant la nuit le Front National du premier ministre Arseniy Iatseniuk a même dépassé la coalition conduite par le 'roi du chocolat', revenue ce matin à un léger avantage avec 22% des voix. A la troisième place, pour l'instant, les nationalistes du 'parti' philo-Ue Samopomich ("Nous nous aidons par nous-mêmes") avec environ 11%, conduits par le maire de Léopole, Andriy Sadovy. Derrière les autres partis libéral-nationalistes et d'extrême-droite, qui feront du parlement la proie des affrontements de pouvoir entre les différents courants de la soi-disant 'révolution' d'EuroMaidan.

Si les rapports de force venaient à se confirmer, Iatseniuk pourrait demander et obtenir de diriger de nouveau l'exécutif, et pour Porochenko et les siens ce serait un souci pas moindre. S'il est vrai que du point de vue idéologique et surtout économique, entre le président oligarque et son premier ministre sortant, il n'y a pas de différences notables, c'est au niveau des liens internationaux que les chemins entre les deux s'éloignent. Si Porochenko est un libéral pragmatique et enclin aux compromis, Iatseniuk est par contre férocement anti-russe et contraire à toute forme de négociation sur le futur des régions du pays qui se sont insurgées après le putsch puis transformées en Républiques Populaires. Désormais si indépendantes de Kiev, qu'hier pas une seule urne n'a été ouverte à Donetsk et Lugansk, dont les populations par contre iront voter pour élire un parlement autonome le 2 novembre prochain.

En outre, en ballottage entre Porochenko et Iatseniuk, il y a aussi les rapports internationaux avec les parrains du putsch de février : tandis que le premier est plus enclin à un rapport privilégié avec Berlin même si coordonné avec Obama, le second tend plus vers le 'mur contre mur' promu par Washington et par les pays de l'Europe orientale ennemis jurés de Moscou.

Le vote d'hier a néanmoins signalé le déclin politique de celle qui, pendant les manifestations sur la place de l'Indépendance à Kiev ayant débouché après sur l'assaut violent des palais du pouvoir, était décrite par les médias occidentaux comme la 'pasionaria ukrainienne'. Le parti Patrie - Batkivshchyna - de Iulia Tymoshenko a littéralement coulé après que Iatseniuk et d'autres leaders aient décidé de se détacher de l'ex premier ministre finie en prison pour malversations, et en l'état actuel il n'est pas dit que la marraine de la 'révolution orange' parvienne à dépasser le seuil de 5% et à entrer à la Rada Suprême. Une entreprise qui semble par contre avoir réussi au soi-disant Bloc d'Opposition, un chaudron composé par des morceaux de l'ex Parti des Régions et par d'autres formations locales, qui s'est approché de 10% en pêchant des consensus surtout en Ukraine centre-orientale, tout en catalysant les voix de cette partie de la communauté russophone qui a décidé d'aller aux urnes.

Une des données certaines du vote d'hier est en effet l'augmentation considérable de l'abstention qui semble avoir impliqué surtout les Ukrainiens de langue et culture russe et les électeurs de gauche. L'afflux dans celles qui auraient dû être "les premières élections libres de l'Ukraine" depuis plusieurs années à aujourd'hui, du moins si on s'en tient à la propagande des partis nationalistes, a à peine dépassé 52% des ayant droit, tout en infligeant un coup non moindre aux aspirations du nouveau régime à une légitimation populaire. Particulièrement bas l'afflux aux urnes dans des villes importantes comme Odessa ou Kharkov, où évidemment l'adhésion de la population au nouveau cours des choses est assez peu solide.

Le Parti Communiste Ukrainien, une des forces les plus importantes de la Rada jusqu'à sa mise au ban de fait à partir du putsch de février, a dû conduire une campagne électorale de fait clandestine, et n'a recueilli hier plus que 2% des voix. "Les électeurs ont été contraints de voter sous les cannes des fusils : et pas au sens figuré" avait par ailleurs dénoncé le secrétaire du PCU, Simonenko, à une délégation du Parlement Européen à la veille du vote.

Un résultat en dessous des attentes pour le Parti Radical aussi - les nationalistes de l'ultra-droite - de Oleh Lyasko, que les sondages donnaient par contre en forte ascension et qui se serait arrêté à 7,5%. Les partis ouvertement nazis n'entreront pas au Parlement - Svoboda et Praviy Sektor - n'étant pas parvenus à dépasser le seuil de 5% . Ils pourraient contribuer dès les prochains jours à augmenter l'instabilité politique dans un contexte caractérisé par une compétition féroce pour le pouvoir entre les différents oligarques. Des urnes sortira probablement une majorité philo-occidentale nette, mais composite et litigieuse, ce qui pourrait être un problème non secondaire pour l'Union Européenne qui inversement aspire à une rapide normalisation de la situation du pays aux prises par dessus tout avec une crise économique et sociale terrible. Une crise qui en l'état actuel ne peut que empirer, tout en créant les conditions pour une ultérieure recrudescence des forces les plus extrémistes et ouvertement militaristes, pouvant devenir le point de repère de ces secteurs de Maidan et de l'opinion publique réactionnaire qui ne se contentent pas de s'écarter après avoir constitué la 'pointe de lance' ayant rendu possible l'affirmation du nouveau régime. Les 30 sièges à la Rada restés vides en représentation des populations de Crimée et du sud-est n'ayant pas voté, d'ailleurs, risquent de se transformer en un aveu  coupable de faillite pour les forces nationalistes hégémoniques, conjointement à un taux de corruption qui après la soi-disant "révolution" a augmenté à démesure. Ce sont des arguments que l'extrême-droite nationaliste et néo-nazie agite déjà sur les places et dans les casernes tout en prospectant un nouveau Maidan contre les alliés d'hier, accusés d'être trop accommodants avec Moscou et d'avoir trahi le programme de la révolte d'automne. Dans la tentative de s'accréditer en tant que 'homme fort' de la situation, hier de manière surprenante le milliardaire Porochenko a débarqué à Kramatorsk, ville à quelques dizaines de kilomètres de Donetsk arrachée par l'armée de Kiev aux républiques populaires pendant l'été et de fait occupée militairement par les forces du régime contre la volonté d'une population qui a déserté les sièges, nonobstant les menaces et le harcèlement des bataillons néo-nazis qui depuis des mois stationnent dans celles qui sont de fait les arrières gardes du front.

Porochenko a visité un siège électoral à Kramatorsk et a distribué une certaine dose de démagogie à bon marché qui évidemment n'a cependant pas servi à grand chose si on s'en tient aux résultats du vote : "Votre sacrifice à l'Ukraine est un succès. Pour moi et pour des millions d'Ukrainiens, vous êtes des héros auxquels nous devons notre paix" a dit le 'roi du chocolat' face à la caméra. Pour tenter de remonter en selle et concéder quelque chose à Iatseniuk, Porochenko pourrait maintenant ordonner une nouvelle offensive militaire contre les milices de Donetsk et Lugansk, qui, depuis des jours, se préparent désormais à la résistance tout en dénonçant que Kiev, a massé des troupes et des armes tout près du front juste pendant les dernières phases de la campagne électorale.  

Marco Santopadre 

Contropiano.org 

http://contropiano.org/internazionale/item/27147-ucraina-poroshenko-gia-traballa-astensione-alle-stelle

Note ajoutée l'après-midi : Il faut quand même souligner que l'analyse de Marco Santopadre a été faite avant les résultats définitifs, - comme précisé en début d'article. A cet égard il faut préciser d'une part que le Parti Radical de Oleh Lyasko a eu encore moins avec 6,4%, mais que Svoboda est bien parvenu a entrer à la Rada avec 6,3% tout autant que Patrie de Iulia Tymoshenko qui fait quant à elle, 5,5%. Ce qui change un peu les conclusions qu'on peut en tirer. (données extraites de l'article du site du East Journal)

Pandora TV - Documents - Exécutions sommaires en Ukraine.

PTV 25.10.14  -  La source qui nous a envoyé cette vidéo affirme qu'il s'agit d'hommes du bataillon Donbass, de la Garde Nationale ukrainienne. Ce sont les images d'un téléphone portable fixé sur le tableau de bord du camion tombé par la suite dans les mains des partisans. La zone précise n'est pas définie, probablement près de Donetsk. Les meurtriers ont peut-être été capturés, peut-être ont-ils été tués à leur tour. Une chose est certaine : ici on voit une fosse commune de civils au moment où elle a été inaugurée, dans l'exultation des assassinats. C'est cela la guerre de Kiev.

http://www.youtube.com/watch?v=4M5uIYgT3fs

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