Sekhmet-Sab

Syndiquée au Comité des Précaires et Privés d'Emploi de la CGT, dans lequel je m'occupe d'une commission handicap avec d'autres camarades.

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Billet de blog 22 décembre 2024

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Syndiquée au Comité des Précaires et Privés d'Emploi de la CGT, dans lequel je m'occupe d'une commission handicap avec d'autres camarades.

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Le sexisme existe encore

« Aujourd'hui, je n'aime plus ce travail, aussi j'ai raccroché mon taille-haie et mon sécateur. [...] Malgré une évolution de la condition féminine, certains secteurs d'activité recèlent encore d'irréductibles machos » : témoignage d'une ancienne ouvrière paysagiste.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je suis une femme… Je suis une femme, avec une forte personnalité, un esprit libre, qui ne se complaît pas dans les diktats et les traditions d'un autre âge. Bref, je suis un être humain, souffrant et pensant !

J'ai passé dix ans de ma vie, en qualité d'ouvrier paysagiste, métier que j'ai choisi, appris et chéri. Aujourd'hui, je n'aime plus ce travail, aussi j'ai raccroché mon taille haie et mon sécateur.

On peut se demander pourquoi. Oui, pourquoi ? Alors voila….

Il était une fois une jeune fille dynamique, qui aimait la nature, le contact avec la terre. Munie de son BAC Pro "Aménagements Paysagers" tout neuf, de son énergie à revendre et de son amour du travail, elle se mit en quête d'un emploi dans son secteur d'activité.

C'est ainsi qu'elle atterrit dans une première entreprise d'entretien et création d'Espaces Verts. Ce fut merveilleux les premiers temps : la joie de travailler dans un métier passion, être dehors, l'odeur de la terre, le bruit des machines, ses chers arbres et fleurs ; et puis…

Voici venu le temps des nuages noirs qui se profilent à l'horizon. De manière insidieuse, tout d'abord : des mots grivois, des réflexions sur son physique, sa féminité, des blagues grasses et lourdes, sur ses seins, ses fesses. La jeune fille tente de faire bonne figure, mais cela la gêne en réalité.  Alors elle cache son corps de femme sous des vêtements informes et coupe ses cheveux, singe un comportement masculin, pour ne pas provoquer de tentation…

Puis viennent les gestes : une main massive et velue, se perds sur ses formes féminines, sans consentement aucun, des avances brutales et non désirées. La jeune fille se plaint à sa hiérarchie, qui répond :"C'est un métier d'homme, adapte toi !" ou la sacro-sainte phrase "Tu n'a pas d'humour, détends toi un peu !"

La colère se mit à enfler en elle, et avec elle un profond mal être. Elle n'a pas su "s'adapter", a commencé à devenir agressive, voire franchement désagréable, alors elle a fui vers d'autres horizons, en espérant trouver ailleurs de meilleures conditions de travail.

Plusieurs contrats saisonniers, ou en intérim : il y a eu moins de mains baladeuses, mais les mots restent : "Tu n'est même pas capable de soulever 40 kg !" ; "Les femelles au fourneaux !" ; "Mal b...sée!"; "ADAPTE TOI !"

Alors elle fait contre mauvaise fortune, bon cœur : elle ne demande plus d'aide à ses collègues pour les tâches difficiles, par peur des moqueries. "ADAPTE TOI !". Lorsqu'elle à envie d'uriner, on lui demande d'aller s'accroupir dans un buisson, car pas de toilettes à disposition. Facile pour les hommes qui pissent comme les chiens auprès des arbres ! Alors elle s'abstient de boire, pour ne pas avoir envie d'uriner et subir l'humiliation de se mettre cul nu dehors , même en temps de canicule, et tant pis pour l'insolation qui ne manque pas de venir ! " Sort de ta zone de confort !", lui a-t-on dit.

Elle fait ce qu'elle peut, mais son corps souffre par trop de contraintes, des larmes lourdes commencent à perler un peu trop souvent de ses paupières. Epuisement moral : elle a envie de hurler, ne veut plus aller au travail.

Pourtant, les connaissances sont bien ancrées dans son cerveau : elle sait tailler et planter dans les règles de l'art, appelle les arbres par leur nom scientifique, sait leurs caractéristiques, parfois bien mieux que tout ces "biceps" avec des pattes ! Mais ça ne suffit pas, il faut toujours plus !

Alors le doute l'envahit : "Suis-je une bonne à rien ?", "Pourrais je retravailler un jour , sans qu'il y est de lourdes conséquences sur ma santé physique et mentale ?" Dégoûtée, elle finit par renoncer : fini les Espaces Verts , elle tentera de se reconvertir, vers un métier plus cérébral que physique. Peut-être que cette fois-ci, elle trouvera la sérénité dans un emploi, qui sait ?

Souvent, elle refait le monde dans sa tête : Dans cette utopie, les hommes et femmes sont égaux en droit, unis et solidaires. Dans ce monde, la femme peut avoir d'autres ambitions que de devenir secrétaire ou nounou. Dans ce monde, on ne la cantonne pas à la cuisine, au ménage, au foyer…. Mais ce n'est qu'une belle illusion : L'espoir fait vivre.

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