Hier, pendant un cours de..., nous devions présenter notre sujet de grand oral. C'est alors que comme tout le monde je vais montrer mes deux questions et en parler avec ma professeure. Je suis étrangère, mais ma langue maternelle est le français, et, mes professeurs, amis, bref tout le monde connaît ma situation dans mon établissement.
Je l'invite donc à lire sur mon téléphone mon introduction et ma conclusion, en indiquant que j'ai mis au propre en reformulant sur une autre fiche, et que sur l'application notes, c'était un brouillon avec des idées dans le désordre. Madame avait déjà trouvé judicieux de me rajouter une faute, évidente, sur ma question de grand oral, un accent sur l'auxiliaire avoir employé à la troisième personne.
Puis, madame ajouta un commentaire qui me choqua, pendant qu'elle lut mon introduction brouillonne. Elle me dit "ah--- argh oh, tu as dû reformuler en..., c'est pour ça ta phrase a une tournure bizarre". Je sentis le mot qu'elle employa, le rappel de la langue, qui n'est même pas réellement "la mienne", le rappel sans cesse que je suis et resterai étrangère, jusqu'au fin fond de mon cœur, car nous sommes au mois de Mai, et elle sait, elle sait que je parle couramment français, elle me m'entend, me lit, bref, ce n'est pas comme si quand je parlais j'employais deux mots en français et 6 mots en... Je ne compris pas le sens de la remarque, jusqu'à maintenant cette remarque me laisse sans voix. Sachant qu'au cours de nos conversations, j'ai dit que j'étais ... au début de l'année, et elle fut fort étonnée par ailleurs.
Ajoutons aussi que pendant la présentation d'un exposé elle a fait une mauvaise blague, où elle s'est esclaffée en criant devant toute ma classe "ahhh vous les... vous avez été les premiers à avoir des antennes géantes pour le piratage de film". Imaginez comment un élève peut être déstabilisé juste par une interruption en plein oral, alors si vous lancez des remarques racistes je vous laisse imaginer. Si je n'avais rien dit elle ne m'aurait jamais dit cela.
Et surtout, je pense qu'on ne peut pas me reprocher le mauvais emploi de la langue française sachant que j'ai eu la meilleure note de mon lycée à l'écrit du bac de français. N'est-ce pas une preuve d'une certaine "maîtrise" de la langue ?
C'est là que je compris, que ce n'était pas de la curiosité "bienveillante", toutes ces questions, toutes ces drôles de remarques sur là où je viens, sur ces grimaces, cet air hautain en parlant de là où je viens, ces paroles sont restées ancrées en moi, car jamais je n'avais je pense pris conscience que j'étais "autre", "différente" comme tant d'autres personnes dans la même situation que moi.
C'est sur cette petite histoire que se base cet écrit, car elle m'a fait réfléchir au sujet complexe, de l'identité, l'identité des étrangers, des préjugés autour d'eux, de la vision que 1 l'on a d'eux, d'après leurs origines. Tout d'abord, qu'est-ce que l'identité personnelle ? c'est son histoire personnelle, l'histoire qu'on écrit avec nos souvenirs, et qui évolue constamment.
L'identité nationale faisant partie de l'identité personnelle, nous en entendons beaucoup parlé par le biais des débats politiques sur le sujet, en abordant essentiellement la peur d’un certain « grand remplacement ». Et les étrangers dans tout ça ? Qu'ont-ils comme identité ? Ils vivent dans un pays autre, loin de leurs terres, de leurs familles, de leurs souvenirs d'enfants... Leurs identité propre, leur identité nationale n'est qu’un vaste souvenir lointain, qu'ils retrouvent en rentrant au pays, 1 fois par an ou plus, tout dépend de leurs situations économiques.
Comment définissent-ils et gèrent-ils la vision de leurs identités ? Identité qui se diluent peut-être à force de "l'assimilation", et de l'adaptation, à des cultures différentes en les adoptant. C'est un choix de partir, un choix de quitter son "essence", sa culture, de quitter "les siens". Mais je veux croire que ce n'est jamais un choix fait de gaité de cœur. On ne quitte jamais son pays par pur plaisir. « Bon vent » comme dirait d’autres, « la France tu l’aimes ou tu la quittes » ceux-là n’ont alors rien compris à la complexité de l’immigration et l’état psychique de tout immigré.
Alors pourquoi venons-nous "envahir" la France ? Si on se plaint, si le pays nous manque, eh bien, libre à nous de faire machine arrière. Mais que faire si on ne peut pas faire machine arrière ? Dans mon cas personnel, c'était comme une "fuite" face à un tournant déplaisant que le pays prenait.
Un tournant qui m'a fait détester pendant longtemps une langue que j'ai rejetée, celle que j'estimais être la langue d'un lointain envahisseur qui était la source de tous mes maux. Tout comme en France, avec les bretons, les corses, les chtis, etc... Chez moi aussi, il y a plusieurs peuples. Celui qui domine, a autrefois décimé les miens, a invisibilisé les miens, a renié et continue de mépriser mon peuple. Il y a une fracture, qui pousse à une souffrance constante, une déchirure, à cause de la haine qui ronge le pays de l'intérieur.
Ma langue maternelle, celle avec laquelle j'ai grandi est le français. Petite, j'ai grandi avec la culture française, et avec la culture ... dont ma famille me parlait de temps à autres, des coutumes, des tissus, des traditions, et surtout des plats aux milles et unes senteurs et saveurs ; de la convivialité, d’une certaine solidarité, hospitalité et vision de l’autre que nulle part je n’ai revu.
Malheureusement je ne maitrise pas cette langue, qui s'éteint un peu plus à chaque génération par manque de transmission. Que faire de cette identité "perdue", que je ne retrouverais sans doute jamais ? Si chez moi, bien avant de partir, j'étais déjà rejetée ? Un rejet de ne pas maitriser la langue, d'avoir un accent, de complexer, de subir du harcèlement sur tout car j'étais différente ?
"Occidentalisée" voilà le mot, ou encore "la française", c’est l’étiquette que l’on m'a attribuée, une identité autre, une identité d’étrangère au sein même de son propre pays. En arrivant en France, en ...., j'ai découvert d'autres cultures, en pensant quitter le pays je pensais soigner cette souffrance qui me rongeait de l'intérieur. Mais ce fut l'inverse. Loin des yeux, près du cœur, en tant que ... donc étrangère, mon pays fait partie de moi. Et quand enfin j'ai pu me réapproprier ma culture, en me mêlant à la "culture populaire" en parlant un peu plus la langue, je me sentis plus acceptée et moins pointé du doigt.
Mais malheureusement Les étrangers n'aiment leurs pays que pour les vacances, une fois la prolongation des vacances, en séjour, il y a le retour du regard que l'on portait sur le pays, le choc violent avec la réalité, le moment où l'onirique, le rêve, s'arrête et il y a un retour à la réalité et qu'on se dit, ouf, un ouf de soulagement, qui veut dire que même si ça nous manque, même si la nostalgie et la mélancolie nous gagne parfois, la vie que l'on a choisi, reste le meilleur choix, (il y a sûrement d’autres situations ou ça ne s’applique pas mais dans le cas de cette article j’ai fait le choix de prendre cet exemple).
La nostalgie donc de l'identité natale, nationale, et culturelle dont on fait partie, quand on arrive ailleurs, mais que devient l'identité des années après notre départ ? Après assimilation, après adaptation, après avoir entamé une nouvelle vie. Changeons nous d'identité ? Il y a une sorte de liberté, une page blanche, pour se réinventer en terre nouvelle. Apprendre, écouter, sentir, et découvrir des cultures nouvelles. Un enrichissement en plus de sa culture. Le tout est de maintenir un équilibre.
Pourquoi écrire tant cet équilibre semblerait évident pour certain ? Écrire dans le but d'exprimer, et de décortiquer des crises existentielles, que l'on peut définir par : "Au sens étymologique, "Crisis" en latin désigne une situation "d'urgence où il faut prendre une décision".
Une crise existentielle se caractérise par des questionnements sur le sens profond de l'existence ; c'est un moment où tout semble perdre sens, jusqu'à l'identité même de la personne." S'adapter est une assez simple tache, c'est même un processus de découverte, et l'accepter c'est avancer vers l'autre, vers l'inconnu, vers l'étranger.
En France nous traversons une crise identitaire, vu le nombre de polémiques journalières, et la préoccupations de nos politiques se concentrant uniquement sur l'immigration et "le sentiment patriote"...Dernièrement il y eut une polémique sur les propos de Mathieu Kassovitz. Les propos soit disant choquants sont les suivants :"la réalité est que nous ne pouvons pas vivre dans une France blanche" ... "il y a des français de souche ça s'appelle des fins de race. Leurs enfants vont se mélanger avec les autres et c'est tant mieux pour nous tous (...) Vous voulez fermer les frontières et rester entre blancs ? ça ne marche pas !"
Voila ce qui a pu choquer et heurter l’extrême droite...Pourtant si on réfléchit bien, Mathieu Kassovitz n'a pas tord. La France Blanche n'existe pas. Ces stéréotypes du fait qu'il y aurait trop de noirs, d'arabes, et d’étrangers (les indésirables), est faux. Ou encore que les "vrais" français seraient blancs, blonds aux yeux bleus...Mais avez vous oublié le passé colonial de la France et certaines de ses colonies qui sont devenues françaises comme les outre mers ? Comment discerner les français de "souche" si on commet tous les jours des délits de faciès ? La France est construite de multiples identités et c'est une richesse ! La mondialisation a permis une évolution des civilisations, en nous permettant de nous mélanger. C'est ce qui fait la beauté de la diversité, et la richesse culturelle de la France. S'attarder sur un problème qui n'en n'est pas un, c'est donner l'occasion aux racistes et à la parole haineuses de se propager, et d’être médiatisé, un peu comme une propagande raciste qui reprend la thèse de Renaud Camus sur le "grand remplacement"... Mais pour en revenir au sujet initial, cette polémique est une preuve de la fragilité sur le sujet de l'immigration...Une peur qui cause des souffrances, et de la haine, qui fragilise le sentiment d’intégration des uns et provoque un ressentiment envers les "étrangers", un sentiment de haine et une victime expiatoire de tous les problèmes de la France...Les étrangers pourtant, ne sont pas responsables des vingt-trois 49.3 d’Élisabeth Borne, ni des 3305,3 Md€ de dette...
En conclusion, l’identité étrangère alors, se résumerait comme cela : l’immigration, la nostalgie, et la prise de conscience que même si vous êtes assimilé, adapté, il faudra au moins deux générations pour vous séparer de cette étiquette qui vous colle à la peau.