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Billet de blog 1 mars 2017

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Allez voir «Chez Nous» de Lucas Belvaux

Il faut absolument évaluer tout parti politique dans sa continuité historique et dans ses fréquentations, car un parti qui a été créé sur la base d’idées racistes et qui fréquente des partis néonazis, tout en s’en défendant, ne peut pas servir les intérêts du peuple. Attention le slogan « il n’y a plus ni Gauche ni Droite » sert les intérêts des «enfumeurs»!

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Lundi 27 février 2017, j’ai vu « Chez nous » , film franco-belge de Lucas Belvaux.

Le scénario de « Chez nous »est particulièrement intelligent et les personnages, sont davantage bien campés que caricaturaux. C’est l’histoire

d’une infirmière généreuse et très appréciée ayant deux enfants et un père silicosé; elle se laisse endoctriner très subtilement, dans les rangs d’un parti nationaliste populiste. La chute du film est inattendue mais réussie, dommage pour « l’happy end », quand même!

Émilie Dequenne, dans le rôle de l’infirmière Pauline Duhez, est admirable de réalisme en montrant tous les sentiments qu’elle devait éprouver :

dévouement, courage, agacement, révolte, amour, déception…

André Dussolier, dans le rôle du médecin Berthier, est très convaincant et tout en finesse. Cela excuse Pauline de s’être fait convaincre. Ce personnage ambigu est fondamental pour comprendre ce que sont les dirigeants d’un parti populiste qui, sous des apparences convenables, cachent leur véritable identité.

Stéphane Stankowia, joué par Guillaume Gouix, est un des membres des troupes de l’ombre, qu’affectionnent particulièrement tous les partis

d’extrême-droite: mercenaires, miliciens, casseurs… C’est aussi un personnage central et ambigu qui cherche une rédemption par l’amour de Pauline mais qui est trahi par son téléphone portant la preuve de ses activités racistes récentes.

Guillaume est émouvant, kafkaïen écrasé par son appartenance à ce réseau paramilitaire sur lequel le film insiste beaucoup en montrant les entrainements et les sévices qu’ils font subir à des réfugiés sans défense. On arrive à plaindre Guillaume.

Le père de Pauline, Jules Duhez, est remarquablement interprété par Patrick Descamps. Ancien métallo communiste en train de mourir de silicose, il a perdu sa femme malgré les soins du « bon »docteur Berthier (ai-je mal compris quant à l’idée qu’il lui aurait abrégé la vie ?) auquel il avait longtemps interdit d’entrer chez lui car le docteur avait été député européen du Bloc national, parti national pronazi.

Une interrogation peut-être : Pauline pouvait-elle être une oie, aussi blanche, avec un tel père ?

Jules D., le père, est aussi un personnage important dans l’aventure de Pauline. Les luttes des prolétaires déjà décrites par Zola, et menées par les

syndicats et les partis de Gauche sont à la base des valeurs de la Gauche comme l’idéologie nazie l’est pour des partis d’Extrême Droite. Les combats sociaux sanglants, très douloureux ont magnifié les valeurs « Liberté, Egalité et Fraternité »de la Gauche et nous ont apporté des acquis certains: merci au Front Populaire, en particulier ! C’est pourquoi, il ne faut pas jeter l’opprobre à ces valeureux communistes, tels que Jules Duhez les incarne, sous prétexte que des tyrans (Staline, Pol Pot…) ont trahi l’authentique communisme; comme les islamistes dévoient l’Islam, comme l’Inquisition et les conversions colonialistes ont détourné le message chrétien…

Catherine Jacob incarne Agnès Dorgelle, la cheffe du parti RNP, personnage à peine caricatural car les intonations, le vocabulaire, la façon de

s’exprimer, la dureté des relations avec ses proches et son côté lisse people de magazine illustrent parfaitement le comportement de la responsable d’un parti populiste.

Agnès D. est sûre d’elle: s’élève contre les injustices, défend le peuple contre les magouilleurs en place… enfin elle choisit les mots que tous les gens blessés et se sentant délaissés, ont envie d’entendre. Son programme, dit-on, dans le film « n’est qu’une publicité que personne ne lira ». Arrêtons pour cela de juger un candidat uniquement sur son programme !

Deux autres personnages sont encore importants mais insuffisamment développés:

Anne Marivin interprétée par Nathalie Leclerc est l’amie de Pauline dont elle garde les enfants. Anne M. dérive vers l’extrême droite jusqu’à ne pas désapprouver l’appétit de son fils pour des sites islamistes violents.

Enfin Stéphane Caillard,alias Victoire Vasseur, est restée quant à elle insensible aux appels populistes. Elle est outrée quand des jeunes racistes la

menace lorsqu’elle déchire une affiche du RNP.

A cet instant, on ressent bien que l’appel à la haine du RNP déclenche la violence.

En conclusion, je trouve ce film admirable, que tous les citoyens devraient visionner et en particulier les jeunes électeurs qui pourraient être bernés à la seule lecture des programmes.

Ce film fournit des réponses argumentaires efficaces aux idées de l’extrême-Droite:

Il faut absolument évaluer tout parti dans sa continuité historique et dans ses fréquentations, car un parti qui a été créé sur la base d’ idées racistes et qui fréquente des partis néonazis, tout en s’en défendant, ne peut pas servir les intérêts du peuple,

par contre le slogan « il n’y a plus ni Gauche ni Droite » sert les intérêts des «enfumeurs».

Merci d’avoir donné ces clés aux citoyens afin de ne pas se laisser berner comme Pauline Duhez.!

Bravo, à vous Lucas Belvaux ainsi qu’à toute votre équipe pour ce film réaliste, aussi émouvant que didactique et tellement précieux pour éclairer les citoyens à la veille de cette élection présidentielle.

Que votre film soit le détonateur d’une prise de conscience face à la « peste brune »!

Fait à Paris le 1er mars, 2017 par Serge CASSAGNE

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