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Billet de blog 5 janvier 2023

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Omar Sy

Omar Sy est factuel, mais la réalité est à nuancer. L'indifférence qu'il insinue doit s'appliquer aux auteurs des attaques odieuses contre lui.

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Les vœux de quiétude et d'apaisement, formulés à l'occasion du nouvel an, semblent déjà compromis aux premières lueurs de l'année 2023. Dans le sillage de la sortie de son film qui est une œuvre essentielle dans la perspective historique, Omar Sy se retrouve au centre d'une controverse assortie d'attaques odieuses.  A l'origine de cet emballement éruptif, apparaissent deux déclarations, qu'on peut dans un monde civilisé, critiquer dans la courtoisie et idéalement avec des arguments.

Selon l'acteur - en le paraphrasant gentiment, on ne s'intéresse pas à l'Afrique, et ceux qui ont versé leur sang pour la France sont (plus) dignes de ses hommages qu'une célébrité américaine en week-end à Paris. Sur une photographie instantanée, si l'honnêteté est un critère de validation, on peut en effet se demander pourquoi une telle polémique, et à ce titre Omar Sy est factuel. Pour la petite histoire, concernant la reconnaissance, un discours similaire résonne outre manche depuis plusieurs années chez les indo-pakistanais et afro-descendants, estimant qu'ils incarnent mieux le Global Britain avec les sacrifices et le prix du passé, que les européens de l'Est fraîchement débarqués pour faire du fric.  C'est un vrai sujet sur lequel on peut débattre. Toutefois, en observant de plus près, notamment sur la partie "des guerres", Omar Sy balaie très vite une série de faits qui forcent la nuance, et c'est là où ses propos sont critiquables et même inquiétants au regard de l'influence qu'il a: faire allusion à un conflit soudain, potentiellement dévastateur pour toute la planète, et évoquer des guerres récurrentes moins globalisées mais plus complexes, n'est pas consistant de sérieux. Ensuite, manipuler ces sujets dans une approche comparative est risqué dans une époque aussi fragile. 

Comme je crois la connaître un peu et que j'aime la facilité, prenons le cas de l'Afrique, présente dans le désordre médiatique actuel. Il s'agit tout simplement de la région au monde qui a abrité le plus de conflits armés depuis les indépendances - et certains parmi les plus longs et les plus meurtriers. Mais ce n'est pas tout, c'est aussi la partie du globe qui concentre la majorité des missions des institutions internationales au service de la paix, de la prévention des conflits à la mise en place et au respect du cessez-le-feu depuis 1960. Bien que de multiples erreurs et dérapages s'inscrivent dans l'histoire de l'assistance et de la solidarité envers ce continent en proie à une instabilité endémique, on peut difficilement affirmer qu'il ait été lésé. 

Plus encore, quand on s'intéresse à continent de 54 (55) pays et à ses conflits, il est impossible d'affirmer qu'une intervention telle qu'elle a été opérée pour l'Ukraine aurait été salvatrice, si par exemple on avait massivement distribuer des armes sophistiquées aux chefs de guerres en Afrique, personne ne serait aujourd'hui capable d'y mettre les pieds dans l'espoir de ressortir en un morceau. 

Des choix plus réalistes ont prévalu avec la France et d'autres puissances occidentales au Mali, en RDC, au Burundi, en Centrafrique, la corne de l'Afrique, pour mieux coller aux spécificités locales, et aussi avec de nouveaux outils comme l'africanisation des soldats des troupes internationales désormais majoritaire, la montée en puissance de la Chine aussi bien en hommes que dans la formation. Le service de surveillance par drone des européens et américains, présent en Afrique, sert essentiellement aux Etats africains dans la lutte contre le djihadisme. On peut citer comme ça pendant longtemps, une myriade d'actions aussi visibles que discrètes, à l'opposé du récit naissant de l'Afrique ignorée - au moins sur l'aspect sécuritaire. 

Bien sûr, on déplore que le traitement des réfugiés, dont la plupart doivent leur statut aux conflits armés, ne soit pas déployé de la même façon pour tout le monde, mais dans le fond, loin des projecteurs, les différences s'étiolent dans la réalité, autant pour ce qui est donné que ce qui est attendu. 

Pour parler de la France, de l'Afrique et l'Ukraine, qui sont le fil conducteur de cette polémique qu'on aurait pu économiser, la France a accueilli dans le silence, des étudiants africains d'Ukraine, sans aucun lien avec elle, et qui étaient plutôt à la charge de leurs pays d'origine qui les ont purement abandonné et ignoré, et personne n'a rien dit.

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