En cette semaine de noël, je propose un exercice de rhétorique et de présentation médiatique du problème climatique.
À partir de ce graphique représentant les écarts à la norme de 1981 à 2010 pour la journée de Noël, deux titres sont possibles.
[Graphique 1]
Agrandissement : Illustration 1
« C’est le Noël le plus froid depuis 15 ans » :
C'est un titre accrocheur, sans nuance, focalisé sur le froid, qui laisse croire à un événement exceptionnel. Mais celui-ci masque totalement la dynamique des 15 dernières années, dominées par des Noël largement plus doux que la normale. Elle banalise l’évolution de fond.
« Il faut remonter à 15 ans pour retrouver un Noël aussi froid, après 15 Noël trop doux ».
Moins émotionnel, moins cliquable, ce titre est cependant beaucoup plus factuel. Le message change complètement : le froid n’est plus l’événement, c’est sa rareté qui devient l’information centrale.
En résumé, le choix des mots change le récit.
Soit on surinterprète un épisode banal en l’isolant de son contexte climatique, soit on replace cet épisode dans une trajectoire de long terme qui montre clairement que le froid est devenu l’exception, et non plus la norme.
[Graphique 2]
Agrandissement : Illustration 2
Se focaliser sur cette période de froid, pourtant banale à l’échelle climatologique, masque complètement la dynamique réelle du climat sur l’ensemble de l’année (et même sur l’ensemble du mois de décembre !).
C’est d’autant plus absurde que cette anomalie froide de Noël intervient après un mois de décembre marqué par une anomalie thermique plus de dix fois supérieure, mais dans le sens du chaud.
Autrement dit, ce « Noël froid » est noyé dans un océan d’anomalies chaudes. L’isoler du reste de la série temporelle revient à faire disparaître l’information essentielle : la tendance de fond.
On ne parle plus de climat, mais d’un instantané choisi pour provoquer une réaction émotionnelle.
Faire d’un tel épisode un titre « Le Noël le plus froid depuis 15 ans » est donc un non-sens scientifique. Ce n’est pas un signal climatique, c’est un artefact de calendrier. Le froid devient l’exception. C’est précisément cette rareté qui est instrumentalisée pour fabriquer du « putaclic ».
Le vrai sujet n’est pas qu’il ait fait froid un jour de décembre. Le vrai sujet, c’est que cela fait désormais événement (alors qu’avant les années 2000, ce type de température à Noël était courant, parfois une année sur deux !).
Quand un froid banal devient un titre national, c’est que le climat, lui, a déjà profondément changé.
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Par Serge Zaka, Président-Fondateur d'AgroClimat2050 : www.agroclimat2050.com / Outil gratuit d'agrométéorologie : www.agrometeorologie.fr /Site de chasseur d'orage : www.serge-zaka.com
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