Dans le paysage musical français actuel, on peine à trouver des artistes qui ont à la fois la voix, les mots, la musicalité, une présence scénique qui se pose là et une sensibilité qui met les poils.
On vit dans une époque où la culture aurait tendance à être nivelée par le bas, ainsi, certains artistes peinent à être reconnus et à exister.
Il en est un qui résiste, qui continue d’y croire, et à en juger par les commentaires admiratifs et la sympathie qu’il suscite chez ceux qui l’ont écouté et/ou vu en concert, il a bien raison.
Il s’appelle Soan. C’est une silhouette, un chapeau, une clope, des yeux fardés de noir, une façon de bouger… C’est une voix qui vous fait rire ou pleurer, qui vous tient aux tripes ou vous emporte loin.
Alors, Soan, c’est qui finalement ?
C’est d’abord un artiste qu’il est facile de caricaturer, de juger même, parce qu’il n’est pas formaté, il sort du lot au premier regard, et dès qu’il parle on sent bien la franchise et la passion autant que l’humour et la sensibilité. Du coup, il n’est pas rentré dans le moule de Sony, et les médias le boudent, seuls les journalistes ou présentateurs un peu culottés se sont donné la peine de lui offrir la parole. Mais ces moments là se comptent sur les doigts.
Soan c’est le genre de gars qu’on aime ou qu’on déteste, comme il le dit, il est « trop ». Excessif. Un homme entier en fait. Il ne fera donc pas dans la mièvrerie pour se faire aimer. Il préfère partager avec des gens ouverts et heureux de l’écouter plutôt que de se plier à une médiocrité bienveillante pour faire parler de lui : « j’en ai rien à foutre qu’on m’aime moi ou d’être le meilleur copain imaginaire ». Il a ce qu’on pourrait appeler une grosse personnalité, avec un look hors norme, il s’assume, parce que ce qui compte pour lui : « Jugez moi sur le fond, pas sur la forme. Je vais pas m’excuser d’être moi »…
Il sait, au fond de lui, que ce qu’il propose n’est pas mauvais. Il aimerait seulement que d’autres le reconnaissent, il aimerait qu’on ne juge pas sa musique sans avoir fait l’effort de l’écouter. Il ne vit « pas dans l’œil de l’autre mais sous l’œil de l’autre » si la nuance est subtile, elle est assez importante pour être précisée. « Faut pas être obsédé par l’image, le capital sympathie c’est un truc tout pourri mais par contre faut pas tomber dans l’excès inverse genre « je fais ce que veux », faut tenir compte de son prochain, même dans son projet intellectuel personnel, son propre développement, sa sérénité mentale »… Contre tous les clichés qu’on a lus ou entendus sur lui, Soan est un homme équilibré, conscient, réaliste.
C’est tout môme que Soan rêvait de monter sur scène, à dix ans il ne voulait pas de jouets, il voulait une guitare. Il voyait les artistes sur scène, à la télé et ça lui donnait envie de vivre ça.
La Vie. C’est bien ça qui motive l’artiste en fait, c’est de la vie que parlent ses textes, une vie pas toujours rose mais dont il sait se souvenir du meilleur même s’il précise : « Je me souviens de tout quoi… Malheureusement, c’est un peu le drame de ma vie, je me souviens de tout, tout le temps… Lorsqu’il était dans le métro, il y a forcément vécu des moments pas terribles. Mais ce qu’il retient surtout ce sont les regards de ceux qui s’arrêtaient pour l’écouter, de ces rencontres qu’il a pu faire, dont certaines étaient d’ailleurs fort jolies. « A chaque situation y’a du bien, y’a du pas bien. C’est l’humanité que tu croises, donc des fois l’humanité te rend heureux, des fois elle crée ta peine. »
Il est humain avant tout Soan, ce qui l’émeut, c’est le quotidien des autres, de ceux qui gardent la tête haute tout en travaillant péniblement.
S’il a rencontré Mélenchon, c’est surtout pour rencontrer un homme et des idées, car Soan est préoccupé par la Vie, pas seulement la sienne, mais celle d’une société de plus en plus dure pour les plus faibles. Il n’est pas un artiste engagé, il est un homme, un citoyen dans une société qui va mal, il cherche comme beaucoup d’entre-nous comment faire pour un peu de mieux, de beau, pour pouvoir se projeter dans l’avenir, se faire plaisir… Pour autant, il ne prétend pas être un chanteur engagé. « Dire ce que tu penses, est-ce bien de l’engagement ? Je prends pas de gros risques, j’ai juste mangé avec Mélenchon, j’ai pas tenu des barricades… Je suis pas un chanteur engagé, je suis un chanteur concerné par son prochain ».
Soan a envie comme beaucoup d’entre nous de voir la société changer : « Si y’a un moment où on peut dire 2/3 idées folles c’est maintenant, ça se tente, c’est déjà tellement la merde… »
Se projeter dans l’avenir… Pour Soan, c’est un peu compliqué. Lâché par Sony, il n’a pas été courtisé par les producteurs. On est en droit de se demander pourquoi. Car nous sommes nombreux à espérer l’entendre, le voir, à espérer un nouvel album, une nouvelle occasion de le voir sur scène.
C’est après s’être « fait lourdé de chez Universal avant même qu’on fasse le disque » que Soan a tenté la Nouvelle Star.
La Nouvelle Star a été une expérience enrichissante à différents points de vue pour Soan. Et il y croyait comme personne. « L’artiste prétentieux qui sommeille en moi était sûr que j’amenais un truc plus intéressant que la moyenne des autres, je me disais je vais gagner, c’est sûr… Et puis toujours, l’être l’humain qui se disait "ouais mais t’as vu la tête que t’as, t’es tatoué"… ».
Il a gagné ! Avec un jury très divisé, très septique… A qui il dit : « Je vous en veux pas… m’en veuillez pas non plus… » Le public était là, il a su séduire autant par sa voix que sa personnalité un peu (beaucoup ?) barrée !
Tout n’est pas tout rose malgré tout : « J’ai appris que t’es pas partout chez toi… J’ai entendu des réflexions que j’étais pas sensé entendre, de gens qui sont dans la production, du genre « le gars se croit dans son petit bistrot de quartier de pauvres… Tu vois que c’est pas que de l’illusion à la télé mais l’illusion c’est aussi dans les couloirs. J’étais peut-être pas armé pour vivre ça. C’est ce que j’ai compris. Et qu’on peut pas gagner tout le temps et que même quand on a gagné on a pas forcément gagné »
On pourrait se dire qu’un gagnant de la Nouvelle Star avec un tel potentiel n’as pas spécialement d’efforts à fournir pour vivre de ce qu’il sait et aime faire. Mais l’après Nouvelle Star n’a pas été forcément idéal. Il y a cru pourtant, il espérait pouvoir gagner assez avec les bénéfices de son premier album pour pouvoir produire d’autres artistes. Il existait alors un tel phénomène « Soan », même en Angleterre où il avait été qualifié de « Piaf au masculin »…
Il est sorti de là plutôt enthousiaste, porté par un élan qu’il attendait depuis pas mal de temps. « tu viens de chopper un peu d’argent alors qu’avant t’étais au RMI comme un connard à traîner ta gueule dans le métro, du coup ça rend la vie plus facile, ça enlève un poids… Et juste après y’a ma petite sœur qui meurt… J’ai vécu l’après comme tout le reste, je peux pas dire c’est blanc ou c’est noir… »
Aujourd’hui, Soan est debout, il avance, pas à pas. Soutenu par sa compagne et ses amis proches. « Je viens de faire 2 disques en un an, pour tout dire je suis un peu sur les genoux, c’est de plus en plus d’auto-prod, à la limite je deviens de plus en plus un connard de producteur, je suis obligé de faire des comptes ! A répondre à des mails sérieux… ». Un travail dont l’artiste se passerait bien… « je retournerais bien en maison de disques mais sous d’autres conditions qu’avec Sony » ;
Malheureusement, les choses ne sont pas si simples… « Y’a un genre de petit boycotte du métier, j’ai tout fait pour m’adapter, j’y suis pas arrivé… » Il ne demande pourtant pas grand-chose :« j’aimerais bien juste faire mon art, sans faire trop de bruit ».
Alors il ne lâche rien. Bien que les médias le boudent, ceux qui ont eu le plaisir de l’écouter savent ce qu’il en est, et ont envie de l’écouter encore, de le voir sur scène encore. Parce que quoiqu’on puisse dire, Soan possède un talent rare, qui s’apparente à de grands Noms tels que Brel, Piaf, Barbara, Ferré…
C’est donc en passant par Ulule et les réseaux sociaux qu’il a monté son projet actuel : un album acoustique. Une forte mobilisation des très nombreux fans, des précommandes pour ceux qui n’avaient pas suivi Ulule, et le tour est presque joué, l’album sortira prochainement, avec de la chance il sera disponible en magasins.
Soan dit de lui qu’il est à la fois « introverti autant qu’exubérant, timide autant que grande gueule », c’est peut-être ce qui fait que beaucoup se reconnaissent un peu en lui. Soan ce n’est pas un long fleuve tranquille, ni un volcan en éruption, c’est tout ça en même temps.
Il ne faut pas chercher à comprendre qui il est en fait, il suffit de l’écouter chanter, et de se laisser emporter. Ce qu’il est, finalement, ne concerne que lui et ses proches…
Ce qu’il offre par contre, concerne tous ceux qui aiment les vrais artistes, ceux qui ne veulent pas se contenter de préfabriqué ou de rimes en séries. C’est toujours en réaction à quelque-chose que Soan construit, se construit, des réactions de colère souvent, parce qu’il possède une sensibilité et une conscience qui l’amènent à voir plus loin que sa propre personne, son propre avenir.
Oui, c’est une grande gueule. C’est aussi un timide « Tous les gens qui ont une grande gueule sont timides. Même Mélenchon quand il te regarde dans les yeux c’est un exercice de style ». En fait, Soan est un homme vivant, entier, un artiste rare, et pour mieux se faire un avis, il suffit de l’écouter. Ne cherchez pas d’où lui vient la fêlure qui nous émerveille… Soan, malgré son extravagance, est un homme pudique et l’important c’est de ne pas oublier que sa vie lui appartient, et qu’il nous appartient de rencontrer l’artiste au travers de ses albums…
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