C'était hier soir sur France 3, dans l'émission de Taddéi, qui a de la culture, pour un animateur, ça change et ça mérite d'être souligné en aparté.
Bref, hier soir dans Ce soir ou jamais, on causait Mitterrand. Il y avait Péan, Nay, Sapir, Charasse, Moix, Ouraoui. Deux interventions furent, à mon sens, importantes.
D'une part celle de Jacques Sapir, qui a fort bien expliqué quelles furent les conséquences du virage à la "réalité" effectué à partir de 83, et le fait que le franc soit passé à l'avant-poste des préoccupations, pour satisfaire aux exigences de l'euro futur : installation du chômage de masse à 'perpet' quasiment, aveu arraché à tout le monde qu'on avait menti aux français en leur vendant la prospérité, dérégulations monétaires et désindustrialisation du pays - délocalisations quoi, et chute libre des salaires ( 6 points, a-t-il dit sans être démenti ).
Monsieur Charasse n'a rien contesté, par contre il a expliqué le pourquoi de ces choix : l'obsession d'abord ( c'est son terme ) : la paix par l'Europe, la paix qui ne peut passer QUE par la construction européenne. La certitude qu'après les finances tout suivrait. Le fait qu'il n'aurait jamais accepté la disparition des composantes sociales de l'Europe - mais le fait aussi que ces composantes sont à la trappe et qu'on ne pourra pas les imposer aux autres pays.
Toute cette vente mensongère d'un avenir radieux au peuple français a été assumée par le fait qu'on construisait la paix entre les Etats Européens.
Soit - mis à part sur le mensonge, ça fait très "Après moi le déluge" et ce n'est pas de lui. Mais il a agi de cette manière, en ne voulant pas savoir que, in fine, le mensonge apparaîtrait.
Mais que voit-on ? La paix ? La fraternité entre les Etats ? Non. On voit juste l'inverse. On voit des pays qui imposent aux autres de rester dans l'euro, sans aide - ou aide à la noix, vous savez, aide qui fait tellement monter les taux d'intérêts des remboursements qu'à moins d'étrangler la population on ne pourra jamais rembourser.
On voit des pays qui profitent de l'euro pour exporter vers les autres pays de la zone. Sans l'euro, les marques allemandes verraient leurs prix majorés de 20 à 30% par rapport aux pays plus faibles, comme la Grèce.
Que l'Allemagne se félicite de son commerce extérieur, c'est bien. Que personne ne dise que cela s'est fait en tondant les Grecs jusqu'à l'os et en refusant obstinément de les aider, c'est moins bien.
On voit des pays qui sont au-dessus des 2% de la BCE - d'autres dont l'inflation est inférieure. Dont la France et l'Allemagne. Au passage, c'est la déflation qui a conduit Hilter au pouvoir, l'hyper-inflation, c'était dix ans avant, et pour la combattre on avait imaginé : la déflation et le peuple allemand a eu l'air d'apprécier tellement qu'il a mis au pouvoir celui qui promettait de les sortir de là. Au passage....
On voit des pays qui s'entre-traitent de Pigs - on ne fait guère plus charmant.
Bref, des pays qui sont en compétition au lieu d'être en harmonie, des pays qui se dumpent les uns et les autres, des pays qui finissent par se détester à force de vouloir imposer tel ou tel modèle à tous les autres, des pays qui sont tous prêts à basculer vers les extrêmes de droite, qui parlent tous de nations et qui, quand ils sauront ce qui compose le FMI européen, et qu'il faudra payer, n'hésiteront pas à se remettre sur le coin du nez, pour parler par euphémisme.
Yann Moix disait que Mitterrand méprisait l'économie. Malheureusement elle existe, malheureusement cette construction européenne n'a fait que le bonheur des très riches, malheureusement tout ceci se faisant aux dépens de population, aux dépens des principes démocratiques, ne peut que nous conduire à des situations explosives. L'Europe c'est la paix fait partie de ces dogmes qui pavent l'enfer. Pas n'importe quelle Europe, pas en jouant des populations les unes contre les autres.