La dissolution de l'Assemblée nationale décidée par M. Macron ouvre un moment à la fois très court et tout à fait crucial pour le pays dans son ensemble, et singulièrement pour les partis ou mouvements de la gauche française. S'il est évidemment très présomptueux de parier sur une victoire de la gauche le 7 juillet prochain, on n'est pour autant pas obligé·e de tout faire pour assurer la défaite.
L'alliance (qu'on l'appelle NUPES ou qu'on lui trouve un autre nom) est indispensable, et même vitale : sans alliance, la gauche sera écrasée par la simple mécanique du scrutin majoritaire à deux tours. Indispensable et vitale, elle l'est d'autant plus que, découplant les élections législatives de l'élection présidentielle, cette dissolution a une chance, mince mais réelle, de déboucher sur une république plus parlementaire.
Je n'ai pas l'outrecuidance de penser que je peux avoir une quelconque influence sur Mme Tondelier ou MM. Bompard, Faure et Roussel. Pour dire le vrai, je suis même à peu près certain·e que je suis très loin de simplement pouvoir me faire entendre de ces responsables. Je ne peux donc que me borner à espérer que les discussions qui seront menées déboucheront sur une alliance la plus équilibrée possible, et donc dans laquelle aucune des composantes ne disposera d'une majorité écrasante par rapport aux autres. Nous avons trop bien vu ce que donnait une gauche surplombée par un Parti socialiste dérivant de plus en plus vers le social-libéralisme, et nous voyons trop bien les limites que pose (ou posait ?) le surplomb de La France insoumise sur les autres composantes de la NUPES.
Si je n'ai pas la moindre chance de me faire entendre des responsables de la gauche française, j'ai une toute petite chance de me faire entendre du lectorat de Mediapart.
Ce que j'ai à nous dire tient en peu de mots : pas d'ennemi·es à gauche. Aucun. Nous n'en avons pas les moyens, certainement pas dans les circonstances présentes.
Cela signifie, entre autres, qu'il serait temps de cesser de guerroyer entre abonné·es sur des notions aussi évanescentes que ce qui est « la vraie gauche » et ce qui ne l'est pas, ce qui est « la gauche de gauche » et ce qui ne l'est pas. Ce genre de dispute tend à devenir quasiment une affaire de foi, n'aboutit jamais à rien sinon à fracturer là où nous avons besoin (mais vraiment besoin) d'unité d'action.
Il est inutile de pleurer sur le lait renversé. Ce qui est fait est fait, y compris ce qui m'a enragé·e autant que d'autres ici, mais il ne sert à rien de ressasser les vieilles rancœurs. Nous ressemblons aux anarchistes d'aujourd'hui qui se disputent avec les trotskistes d'aujourd'hui en invoquant les mutins de Krondstadt : c'est tout bonnement ridicule. J'ai beaucoup de mal à supporter les règlements de comptes rances qu'on lit trop souvent dans les commentaires, règlements de comptes qui n'apportent rien d'autre que rajouter du ressentiment au ressentiment. Or le ressentiment est un ingrédient politique extrêmement périlleux, incendiaire même.
Si nous voulons avoir une chance, même toute petite, de gagner le 7 juillet prochain, je ne sais pas le dire autrement : je vous en supplie, pas d'ennemi·es à gauche. PAS D'ENNEMI·ES À GAUCHE !
S'il vous plaît.