La finance a un visage !
Cela n’est pas une découverte qui date d’aujourd’hui bien entendu, mais les dernières études sur le sujet ont de quoi faire réfléchir, d’autant plus qu’elles concernent les plus fortunés d’entre nous. En effet, 20 des 1000 plus grosses fortunes françaises ont décidé d’aller placer leur argent ailleurs, plus exactement en Belgique, pays beaucoup plus clément en matière de fiscalité pour la gestion de patrimoine. Ce sont donc en tout 17 milliards d’euros qui auraient quitté nos banques pour aller rejoindre celles de notre voisin européen, doté de taxes moins importantes sur les grosses fortunes, représentant bien sûr un manque à gagner de notre côté.
Des chiffres révélés aujourd’hui
C’est dans le quotidien économique l’Echo que l’on a pu découvrir ces chiffres plutôt éloquents, concernant ce départ de nos richesses. Et bien sûr, ce n’est pas forcément un déménagement concret qui est concerné, mais plutôt le fait que certains biens ou sociétés sont hébergées en Belgique pour certains de nos milliardaires.
Selon le quotidien, un patron français sur dix vit en Belgique ou du moins y est domicilié. Le montant global de leurs avoirs en Belgique s’élèverait à environ à dix-sept milliards d’euros.
Dans ce wagon, on trouve bien sûr Bernard Arnault, mais aussi Pierre et Chantal Mestre, fondateurs de la chaîne de distribution de vêtements pour enfants Orchestra ; Jean, Patrick et Mariette Mulliez ; Jean-Sébastien Decaux, le plus jeune des trois fils du fondateur du groupe actif dans l’affichage public ; Paul Despature, héritier du groupe Damart et quarantième fortune de France. C’est le cas également de Grégory Marciano et d’Hervé Louis, deux des trois fondateurs de la chaîne Sushi Shop. Voilà quelques exemples, mais il y en a d’autres, comme le présentateur Arthur, qu’on ne présente plus, à la tête de la 224e plus grande fortune de France ; les frères Grosman, fondateurs de la chaîne de vêtements Celio ; Olivier Halley, un des héritiers de Carrefour, etc. Comme quoi, la finance a des visages.
Bien entendu, comme le soulignent ses auteurs, l’enquête du quotidien L’Écho est perfectible. Il n’empêche. Vingt des cent plus grosses fortunes françaises sont présentes en Belgique et une dizaine y sont domiciliées. Et si on étend les recherches aux cinq cents plus grandes fortunes et qu’on additionne les capitaux de toutes les structures, on obtient le montant que j’évoquais, plus de 17 milliards d’euros.
Ce montant colossal pose la question de l’harmonisation des normes fiscales à l’échelle européenne et des outils dont nous pouvons nous doter pour que nos ressortissants fortunés qui résident à l’étranger soient tenus de déclarer au fisc la totalité de leurs revenus, à l’image de ce qui se fait aux États-Unis.
La fraude et l’évasion fiscales sont en effet l’une des conséquences de la soumission des États à la puissance du marché, l’une des conséquences de la concurrence fiscale et de la course au moins-disant fiscal en direction des multinationales et des plus gros détenteurs de patrimoine. La lutte contre l’évasion et la fraude fiscales pourrait être l’occasion d’une prise de conscience de la nécessité pour les États de reprendre la main. C’est aussi pourquoi nous y attachons tant d’importance, sans compter les bénéfices en termes budgétaires pour nos comptes publics.
En votant la loi FATCA, les États-Unis ont ouvert la voie à un type de mesure extraterritoriale qui représente une avancée importante, car il permet de contourner le secret bancaire des autres places financières en obligeant les institutions financières à soumettre un reporting périodique et automatique aux autorités fiscales américaines sur les comptes de leurs clients ressortissants américains dépassant 50 000 dollars. S’ils s’y refusent, une retenue à la source de 30 % sur les paiements des revenus est prévue. Cette sanction est particulièrement dissuasive. De fait, les Américains ont obtenu que 77 000 banques dans quatre-vingt pays s’engagent à collaborer avec les États-Unis et adaptent en conséquence leurs systèmes d’information.
Les dispositions de cette loi ont suscité la controverse. Le principal reproche que l’on peut faire aux États-Unis est que, dans les accords types qu’ils proposent aux autres États, les échanges se font essentiellement dans un sens…