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Des milliers de défenseurs de droits humains dans le monde arabe ne croient plus en l’universalité du droit humanitaire international. Heureusement qu’il y a eu les voix de ces femmes et hommes juifs – aussi minoritaires soient-ils - qui ont sauvé l’honneur et redonné confiance en ce qui constitue le socle des valeurs que devrait partager l’humanité et que nous devons continuer à défendre.
Par delà les massacres génocidaires1, le pilonnage de gaza jour et nuit par des bombes au phosphore que des experts ont documentés, cette guerre aura révélé une autre face des atrocités de l’occupant israélien, la routine de la violence et l’emprisonnement administratif, une procédure à la totale discrétion de l’armée israélienne renouvelable indéfiniment.

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Cette mesure ne concerne pas que les 2070 otages politiques de l’armée, mais elle s’abat également sur les enfants coupables de jeter des pierres. Leur nombre s’est accru avec les nouvelles arrestations opérées concomitamment aux libérations des otages. Ils sont plus de 200 actuellement à être embastillés dans des camps échappant à tout contrôle judiciaire, livrés au bon vouloir d’une armée agissant dans l’impunité la plus totale, soumis à des actes de torture et des traitements dégradants, selon Amnesty International. La plupart sont des adolescents, le plus jeune des libérés, Ayhem El Basti de Jérusalem n’a que 13 ans ! Ce qui a conduit certains à dire qu'Israël fait la guerre aux enfants palestiniens.
A l’occasion de l’échange des otages (mineurs et femmes), le voile s’est déchiré sur cette face cachée de l’armée d’occupation. Ces enfants sont coupables d’être nés Palestiniens ! Et puisqu’ils refusent d’oublier que cette terre leur appartient et qu'elle est occupée depuis 75 ans, leurs jeunes corps porteront les stigmates de la Nakba. Cette mémoire inscrite dans leurs gènes est qualifiée de « haine » par les médias mainstream, davantage motivés pour maquiller les crimes des oppresseurs qu’à révéler une vérité qui disqualifie le narratif israélien des gentils colons en situation de légitime défense. Ces médias ne se sont pas posé la question de savoir pourquoi la majorité des enfants otages de l’armée israélienne libérés sont originaires de Jérusalem et de Cisjordanie où les colonies ont métastasé sur tous les territoires supposés être sous autorité palestinienne.
Les nombreuses couches de propagande israélienne reprises en chœur par des médias biaisés ont réussi à faire oublier un passé très récent : les expulsions des autochtones à Cheikh Jarrah en janvier 2022 au profit des colons venus les dégager de leurs maisons pour y habiter sous la protection de l’armée israélienne et avec la bénédiction légale des autorités. L’invasion de la mosquée d’El Aqsa en mai 2022 par des centaines de colons sous la protection de l’armée accourue pour arrêter les Palestiniens qui s’opposaient à la profanation de leur sanctuaire.

Marah Bakir qui vient d’être libérée est de Jérusalem comme la plupart. Elle a aujourd’hui 24 ans ; elle en avait 16 au moment de son arrestation voilà 8 ans et elle vient d’être condamnée il y a 2 semaines à 12 ans de réclusion par une cour militaire, pour tentative d’homicide sur un soldat qui l’avait criblée de 12 balles réelles. Il était en situation de « légitime défense »: il avait trouvé dans son cartable un couteau !
Maysoon Al Jebali, de Bethléem, condamnée à 15 ans de détention, elle, ne verra ses anciennes amies que furtivement. Des soldats israéliens ont fait irruption dans son domicile et fourni à la famille une « liste d’interdits ». Car les familles palestiniennes n’ont pas le droit d’exprimer publiquement leur joie et les journalistes ne doivent en aucun cas en témoigner, cela porterait atteinte au moral des troupes !
Amin Abbassi 16 ans est aussi de Jérusalem (14 ans au moment de son arrestation), il n’aura pas droit à manifester la joie des retrouvailles familiales ; des représentants de l’armée en faction devant son domicile2 veilleront à limiter les manifestations de sa joie.

En effet, après le premier jour des échanges d’otages qui a été marqué par des explosions de joie, l’armée israélienne a dressé une liste d’interdits et menacé les familles des enfants libérés de représailles sur leurs proches s’ils ne s’y conforment pas. Parmi ces interdits : les bannières et drapeaux palestiniens, la présence de journalistes ou de proches et la distribution de BONBONS !
Il en était ainsi pour Noufoudh Hammed, 16 ans, interdite de fêter sa libération par les forces de sécurité qui ont investi sa maison avant son arrivée.
Les journalistes ne devront pas non plus documenter les tortures infligées à certains de ces enfants comme Mhamed Nazel, 16 ans de Jenine, qui est rentré avec les deux bras et les doigts fracturés suite aux coups reçus en prison, une semaine avant sa libération et il était resté tout ce temps sans soins jusqu’à sa libération où des médecins de la croix rouge l’avaient plâtré.

Pour ces enfants, il n’y a pas que les prisons militaires, il y a également la « prison à domicile », comme Ayhem Slayma, frère de Ahmed Slayma aujourd’hui 14 ans et qui vient d’être libéré de la prison administrative dans le cadre de l’échange des otages . Ayhem vit la prison à domicile à Jérusalem depuis 6 mois sans détermination des délais. Ayhem avait 11 ans quand il a été condamné par l’armée israélienne à ne pas quitter les murs de la maison familiale. A la question d’une journaliste d’Al Jazeera :« de quoi rêves-tu? » Il répond « revenir à mon école et revoir mes copains de quartier » !
Malak Salman (16 ans actuellement) a, elle, été privée de scolarité depuis 8 ans passés en détention « ils m’ont privée de l’amour de ma mère...Ils ont volé mon enfance » déclarera telle à sa sortie de prison.

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Ahmed el Munasra détenu à l’age de 12 ans et maintenu en isolement depuis 2015 restera en prison malgré la détérioration grave de sa santé mentale, selon son avocat Salah Hamouri .
La plus grande victime collatérale de la guerre contre les enfants de Gaza menée par l’État israélien et ses alliés américains et européens, a été l’universalité des droits humains, signant ainsi la faillite des valeurs portées jusque là par un Occident donneur de leçons et très peu porté à faire son examen de conscience concernant ses crimes coloniaux.
Heureusement qu’il existe des hommes et des femmes d’honneur parmi les juifs qui ont osé dénoncer le génocide palestinien, comme le Dr Mate Gabor, un survivant de l’Holocauste et ces courageuses voix qui se sont élevées pour dire « pas en notre nom », ceux qui ont osé rétablir les faits, comme Norman Finkelstein. Même si leurs voix sont marginalisées et qu’ils subissent une répression, comme Meir Barushin ils sauvent à mes yeux ce qui reste de l’universalité des droits humains.
L’autre victime, c’est le système des Nations Unies qui est discrédité, comme l’a souligné le directeur du bureau de New York du Haut commissariat, Graig Mokhiber, dans sa lettre de démission. La justice et la reddition des comptes est le seul levier pour une paix durable.
La Cour pénale internationale est devant un grand défi: examiner les plaintes qui lui ont été soumises et juger les crimes d’Israël ou se disqualifier irrémédiablement. Les Nations unies sont sommées de trouver un mécanisme pour mettre au ban des nations les Etats qui violent allègrement sa Charte, c’est la condition sine qua non pour réhabiliter cet organisme qui a perdu toute crédibilité aux yeux des peuples.
Tant que les crimes coloniaux – à leur tête ceux en train d’être commis par Israël soutenu par les USA – restent impunis, la barbarie humaine aura de beaux jours devant elle.
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