"Ecoute, petit homme..."
C'est la leçon qu'a souhaité m'adresser Plenel lorsque je l'ai convoqué à un édito sur les questions de la réforme de la psychiatrie, voulant ainsi, de son point de vue, me manifester la vanité de faire appel au "chef" pour prendre position sur les choses de la vie ordinaire dans ce journal.
Du point de vue où il se place, rien à dire. Sauf, peut-être, la question des rapports de force. Ce qui motive ce billet, c'est la proximité extrême d'un vote au Parlement, pour faire adopter le dernier avatar d'une politique du "tout sécuritaire" au détriment des gens les plus perdus en ce bas monde, les malades dits psychotiques
Depuis des lustres ils sont stigmatisés, à l'instar des délinquants dangereux, alors même qu'ils sont trop souvent, par la perversité croissante des relations humaines, victimes désignées des violences les plus animales de gens dits "normosés". Or l'Etat, supposé défendre les plus faibles, les ramène au rang des individus par essence dangereux, induisant ainsi une discrimination dont je serais bien intéressé de savoir ce qu'en dirait une cour de justice. Et donc envisage à leur propos, des mesures de contention, de répression, de contrôle et de déchéance sociale de fait.
"Ecoute, petit homme", dans ton grand palais! Arrête de ne penser à autre chose qu'à ravir le tiède pékin qui a peur de son ombre, qui tremble devant tout ce qui lui est étranger, qui rejette à tire-larigot tout ce qui lui paraît une menace contre ses biens, sa tranquillité, son territoire. Arrête de faire comme si tu ne savais pas ce qu'est la souffrance mentale, comme si tu n'avais pas la haine envers ce qui, d'une manière ou d'une autre, affecte ton espace personnel.
Pense à tout ce qui impose notre nécessaire humilité devant ce que nous ne comprenons pas, et qui pourtant fait partie de notre société aussi bien que de notre propre "être au monde".
"Ecoute, petit homme", tu as encore une chance de te grandir dans cet espace humain que tu as ambitionné de gouverner: en retirant cette prétendue loi, en fait un règlement (de comptes?) bâti sur de l'imaginaire pur, celui de tes propres peurs, et en reconnaissant avec sagesse que tu t'es emporté, que tu le regrettes, parce que tu es humain, et que jamais tu n'as en fait voulu stigmatiser ainsi les champs de la souffrance psychique de cette manière.
"Ira furor brevis est", n'est-ce pas? On se calme, "petit homme", OK?
JCD