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Billet de blog 16 juin 2024

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Quand le carriérisme pollue la campagne du Nouveau Front populaire

Depuis samedi, quelques voix dites "discordantes" chez LFI n'ont pas été réinvesties pour cette campagne des législatives. Les élu·e·s concerné·e·s n'ont pas su mettre leur égo de côté, à 2 semaines du scrutin.

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Ce n'est pas faute de l'avoir martelé auprès de nos élu·e·s de gauche tout au long de ce début de campagne : NO. FUCKING. FIGHTING. Ce n'est tout simplement pas le moment, alors que l'extrême-droite pourrait arriver clés en main aux portes du pouvoir.

Depuis l'annonce des investitures chez la France Insoumise, les interventions à l'encontre de ces choix se multiplient au sein du parti. Les noms de Hendrik Davi, Frédéric Mathieu, Danielle Simonnet, Raquel Garrido et Alexis Corbière n'ayant pas été renouvelés pour un nouveau mandat, leurs réactions ont sans doute été à la hauteur de leur déception. Mais certainement pas à la hauteur de l'importance de cette campagne.

À nouveau, on parle de "purge", de "sectarisme", on compare Mélenchon à Staline, et on s'insurge d'une telle décision qui empêcherait le Nouveau Front populaire de mener à bien une campagne décisive. Le soutien public de François Ruffin et Clémentine Autain aux pestiféré·e·s a révélé que les dissensions chez LFI étaient toujours aussi prégnantes.

L'investiture d'Adrien Quatennens (qui s'est aujourd'hui retiré) est vue comme un crachat au visage de ces ex-député·e·s qui sont pourtant si engagé·e·s en faveur de la lutte contre les VSS. Citons le tweet de Ruffin à ce propos : "Vous préférez un homme qui frappe sa femme, auteur de violences conjugales, à des camarades qui ont l'impudence d'avoir un désaccord avec le grand chef." Ambiance.

Intérêts personnels sur fond de jérémiades

Ces réactions indignées ont pullulé sur les réseaux sociaux et les plateaux télé, histoire de montrer que chez LFI, on aime laver son linge sale en public. Saluons ici la réactivité de Monsieur Corbières, qui s'est levé aux aurores samedi matin pour afficher son indignation à 8 heures pétantes sur BFM TV. Saluons également l'égoïsme de ces insoumis·e·s qui ont préféré présenter leur candidature malgré tout, s'opposant de fait aux candidat·e·s investis pour le Nouveau Front populaire.

Raquel Garrido présentera donc le même programme qu'Aly Diouara, président du mouvement citoyen Seine-Saint-Denis au cœur. Un homme qui connaît son terrain et ses habitants, mais qui, selon Garrido, ne serait pas apte à réunir assez de voix. Plutôt qu'essayer de comprendre pourquoi on préfère investir cet homme plutôt que sa personne, qui représente la bourgeoisie parisienne de gauche et la gentrification de la politique en banlieue, elle accuse une forme de xénophobie liée à sa nationalité chilienne : "Il se présente contre moi parce que je ne suis née ni à Drancy, ni à Bobigny ni au Bourget ? [...] Votre antiracisme de pacotille serait donc xénophobe ?" Oui Raquel, c'est sûrement ça.

Écoutons la conception de la politique que se faisait Danielle Simonnet sur franceinfo ce matin : "J'ai entendu, moi, que les meilleures incarnations de la démarche de la culture, du programme du Front populaire sur ma circonscription, eh bien, c'était ma personne." Moi. Ma circonscription. Ma personne. On a l'impression que les intérêts des Français sont peu d'importance face au carriérisme de Simonnet.

Une goutte d'eau dans l'océan des possibles du Nouveau Front populaire

Comme si la priorité était là. Comme si la politique n'était qu'affaire de pouvoir, d'individualités, de conceptions personnelles de la vie publique. Nos représentant·e·s de gauche n'ont toujours pas compris que par définition, la politique est chose publique : elle appartient à tous et toutes, et personne n'a le droit de s'ériger en représentant·e unique des aspirations de chacun·e.

Peut-être qu'il y a bien eu purge, et peut-être que ces figures dérangent bel et bien au sein de LFI. Mais on le répète : ce n'est pas le moment. Cette "affaire" (si affaire il y a) est une goutte d'eau dans l'océan des possibles que nous offrirait l'accession du Nouveau Front populaire au pouvoir. Pour les partisans, ce qui se joue publiquement depuis hier est insupportable : c'est donner du pain béni aux éditorialistes et aux opposants pour mettre de côté un programme salutaire au profit d'une guerre d'égos.

Il est pourtant parfaitement possible de faire abstraction de ses intérêts, comme l'a fait la députée sortante de l'Isère Salomé Robin : "Malgré la déception, je mesure l'importance du moment historique et la nécessité de battre l'extrême-droite et le macronisme." Pour votre bon sens, merci Madame.

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