On est tombé de très haut. Ou, disons plutôt que le miracle n’a pas eu lieu. Nos Mourabitounes sont sortis ce mercredi du CHAN sans les honneurs. Une cuisante défaite 4 à 2 face aux Panthères du Congo n’ajoute certes rien à une sentence déjà connu depuis samedi dernier, quand ils avaient perdu bêtement leur second match, face aux Burundais, en prenant un but à la 94ème minute. Il y a un diction chez nous qui dit que quand on est déjà sûr d’aller en prison, on ne craint plus de commettre une faute de plus (el habs ma yenzad). Sans doute que sans ce mauvais coup du sort, le 2-2 qu’ils tenaient allait continuer à nourrir leurs espoirs – et les nôtres – de les voir aller plus loin dans ce qui est leur première grande aventure africaine.
Pourtant, les Mourabitounes n’ont rien à se reprocher. Leur exploit contre le Sénégal était en lui-même un sacre. Leur seule faute est de nous avoir permis de rêver. Un rêve qui a coûté cher aux pauvres citoyens entraînés, malgré la précarité de leurs conditions de vie, dans une levée de fonds qui, finalement, risquent de suivre les voies insondables de la mauvaise gestion. Déjà l’on murmure que le ministre des Finances a empêché le président de la FFRIM de tirer quelques millions du compte spécial dans lequel les 500 millions et quelque des Mourabitounes ont été placés. Certaines mauvaises langues indiquent même que les 50 millions d’UM donnés par le président Aziz à des associations de jeunes, lors de l’ouverture du Festival des Villes Anciennes de Oulata, proviennent de ce fonds ! Ces on-dit vont même plus loin : Dans la perspective de la présidentielle de juin 2014, des politicards en panne de « bonnes idées » chuchotent dans l’oreille du Raïs que les Mourabitounes ne pouvant pas aller très loin dans ce CHAN, l’argent du téléthon peut servir comme « aliment » de bétail campagne ! Et l’opposition du ministre des Finances à l’utilisation de ce « butin » par le président de la FFRIM est toute trouvée ! Un match dans le match quoi.
Et ces colporteurs de vraies-fausses informations de faire un parallèle entre ce qui se passe dans le foot et d’autres secteurs comme la Défense, l’agriculture, les infrastructures routières et les aéroports. Un exemple parmi tant d’autres de ces financements à « usages multiples ». Le pouvoir du président Aziz décide de déterrer ce vieux projet d’aéroport international de Nouakchott. L’idée était de le faire construire en donnant le marché aux Chinois contre…la valeur en minerai de fer ! Maaouya parti, le « président démocratiquement élu » en 2007 ne peut accomplir ce deal parce que le partenaire chinois veut qu’on tienne compte du prix fluctuant du minerai de fer. Evidemment, la Mauritanie dit niet. A l’arrivée d’Aziz, l’on maintient cette idée de « génie » mais avec une variante sur l’objet du troc : ce sera des centaines d’hectares (l’ancienne ceinture verte de Nouakchott et l’actuel aéroport) au lieu du fer de la SNIM ! Le ministre des Affaires économiques que l’on soupçonne d’être derrière cette idée permettant à l’Etat d’avoir son aéroport pouvant accueillir les plus gros porteurs et 2 millions de passagers par an, pavoise. Mais pas pour longtemps : La société Najah chargée de ce projet a vite montré ses limites. L’Etat ordonne à la SNIM de lui « prêter » (hum) 15 milliards d’ouguiyas ! Quelque temps après, le gouvernement emprunte auprès d’un fonds arabe quelques autres milliards pour l’équipement de cet aéroport qui commence à devenir un véritable gouffre. Mais on peut me dire : quel rapport entre une équipe nationale de football qu’on « finance » avec un téléthon et un aéroport payé « cash » en terrains à très haute valeur commerciale ? Aucune en apparence. Ou plutôt si : pour ne pas avoir à satisfaire nos besoins essentiels (santé, éducation, eau et électricité), nos dirigeants nous vendent les illusions : celle d’avoir, du jour au lendemain, une équipe capable de remporter le CHAN, la CAN et, pourquoi pas, le Mondial, et un aéroport qui peut accueillir 2 millions de « Martiens » alors que, pour faire venir 200 touristes français au Festival de Oulata, le gouvernement mauritanien a pris tout en charge !