Ils sont 700 en confiance
Après une si longue attente
700 qui se projettent sans filet, ni gilet
Embarqués dans ce rafiot rouillé.
Ils quittent le supplice de la Libye
Et du bagne de la torpeur
Sous la croyance des passeurs
Fossoyeurs des abysses.
A bord d’un navire vers l’avenir
D’une vie promise
Sur des terres libres
Entourées d’eaux claires et limpides.
Ils forcent la cadence
Femmes et enfants avancent
Dans une cale aussi profonde
Que la gorge de Poséidon.
Ils quittent Tobrouk le 9 juin
Pour une traversée sans plainte
Malgré l’odeur et la chaleur
Ils se laissent flotter entre le désir et la peur.
Les bébés crient, les femmes pleurent
Enfermés dans cette coquille
Dans le courant d’une Méditerranée éblouie
Par les codes de sécurité maritime.
C’est sur son flanc que le navire chavire
Raclant des corps avalés par les courants
A bâbord des routes migratoires
Sans alerte, ni moratoire.
En une bouchée et sous apnée
Des centaines de corps se déchainent
Sous les eaux non surveillées
Ils nagent et se débattent contre le fond de mer.
Jusqu’à plus de souffle
De femme, d’enfants, d’hommes et âmes qui pansent
Les blessures des peaux sombres et douces
Des bébés que les histoires déchantent.
Ce seront les marées qui les ramèneront
Ou les filets qui pêcheront
650 corps sans identité
Qui ne crieront plus
Ne demanderont plus
Des papiers pour vivre en paix.
So BAB – Juin 2023.