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Billet de blog 11 décembre 2015

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Venezuela: Menaces et Mic Macs du gouvernement

Le 6 décembre dernier les Vénézuéliens se sont exprimés massivement contre le résultat de la politique de Hugo Chavez, pour la première fois depuis des années, nous avons un espoir de faire marche arrière sur les mesures communistes et populistes qui ont profondément détruit notre économie pendant que la junte au pouvoir s'en mettait plein les poches.

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Le rêve de Chavez est devenu à moitié réalité:
Chavez rêvait d'une élection où 10 millions de personnes voteraient pour lui, cela a été le cas, mais les 10 millions ont voté contre sa révolution, contre la Junte au pouvoir, la différence de votes entre l’opposition et le gouvernement a été supérieure à 2 millions de votes ce qui a rendu toute triche impossible (les militaires ont à priori également fait comprendre au gouvernement qu'il n'accepteraient pas de violence dans la rue et qu'ils connaissaient les résultats). L’opposition a obtenu 112 places sur 167 ce qui lui donne une majorité qualifiée des 2/3, suffisante pour promulguer les lois nécessaires à la sortie de crise du pays.
Les critiques de la base du Chavisme se concrétisent pendant que le gouvernement nage dans le déni:
Dès la victoire de l'opposition, des membres du parti et notamment des intellectuels du think tank Chaviste Aporrea ont demandé la démission du gouvernement. Les Chavistes qui avaient été passés sous silence ou évincés du gouvernement suite à leurs critiques osent enfin critiquer publiquement les agissement de la direction du parti. C'est le cas de Jorge Giordani et Hector Navarro, anciens ministres qui ont offert une conférence de presse mercredi dernier. Giordani (ex-ministre de planification et finances) déclare: "Le 6D, ce n'est pas l'opposition qui a gagné, c'est la dirigeance du PSUV (partit socialiste uni du Venezuela) qui a échoué".
Critiquant enfin le népotisme qui caractérise le processus révolutionnaire depuis ses débuts, il ajoute: "Le bureaucratisme est une des pires erreurs de la révolution (...) cela rend le pays ingouvernable et il faut être disposé à arranger ça. Beaucoup de membres de famille et amis occuppent des postes importants dans des organismes publics, ce n'est pas normal".
"1/3 de la rente pétrolière est partie en fumée à cause de la corruption"
Leur conférence de presse ne pourra malheureusement pas aboutir, en effet une 40aine de militants violents du PSUV ont par la suite fait irruption dans la salle de conférence, menaçant les gens et accusant les deux ex-ministres d'être des traitres.

Illustration 1
venezuelan-che


Si seulement c'étaient les seuls... De plus en plus de personnes s'insurgent contre les actions du parti, le "Ché Venezuelien", symbole du peuple Chaviste déclare qu'il suivra le président actuel car c'était le choix du président Chavez mais que Chavez ne lui avait pas dit de se comporter comme un imbécile fonctionnel.
Il réfute les dires du gouvernement en termes de guerre économique, "Je ne crois pas que la patrie soit en danger, ce qui est en danger c'est l'estomac du Venezuelien". Il déclare par ailleurs qu'il faudrait décorer les entrepreneurs car "malgré la crise économique, malgré le manque de devises, on continue de trouver de la farine de mais et les produits produits par ces entrepreneurs" (NDLR: il fait allusion aux entreprises Polar dont le chef a été traité de traitre et accapareur d'aliments par le gouvernement en période pré-électorale). Il critique ensuite le manque de productivité des entreprises et terres expropriées par le gouvernement qui ne produisent rien de nos jours et sont en mains su socialisme "je ne sais même plus ce que c'est que le socialisme ou avec quoi ça se mange, on dirait que Chavez a emporté ça avec lui". Il critique par la suite la présence de délinquants au sein de gouvernement qui "ne sont jamais jugés, ils sont juste changés de poste". "Tu sais combien de délinquants il y a dans la mission Vivienda qui crient "Je suis Chaviste! Viva Chavez" alors qu'en fait ce sont des paramilitaires Colombiens à qui on a donné des cartes d'identité."

Les critiques dignes d'un membre de l'opposition (ce n'est pas comme si nous dénoncions ça depuis plus de 10 ans) continuent: "Dis moi toi si je gouverne et j'obtiens les dollars a 6,30 et je te propose de te les revendre à 500 (NDLR: alors que le prix du marché noir est à 900 actuellement), ben tu vas me dire que oui. La solution c'est d'arrêter de distribuer des dollars, d’acheter la matière première et de la revendre en bolivars à 6,30 aux entreprises afin qu'elles produisent". Il finit par critiquer l’Église catholique qui est inexistante au sein de la population et confinée à un parti avant de conclure. "Patrie ou Guerre, mais ça c'est quand la patrie est en danger, et là elle n'est pas en danger, c'est l'estomac es enfants du Venezuela qui est en danger"
Vidéo en Espagnol:

El "Che" venezolano fustiga a Maduro en marcha contra el paramilitarismo © El Nacional Venezuela

Ce n'est pas un hasard si l'opposition a eu tant de votes dans cette élection, ils ont réussi à obtenir 2/3 des postes de l'assemblée alors que le gouvernement avait redécoupé en 2010 (où l'opposition avait déjà eu 400 000 votes de plus que le gouvernement mais avait obtenu moins de députés) la carte des représentants afin de favoriser les états qui étaient historiquement Chavistes. Le fait est, que pour les militants les plus fervents de Chavez et du Chavisme, les exactions, la corruption et l'inutilité du gouvernement actuel sont évidents.


Les menaces et les tentatives d'apeurer le peuple continuent:
Il l'avait fait en période pré-électorale, signifiant que si l'opposition gagnais il n'y aurait plus de programmes sociaux, que si l’opposition gagnais, la révolution descendrait dans la rue et ce serait moche "Il vaut mieux nous laisser ici, bien tranquilles, car si on nous force à prendre les rues, alors je ne répond plus de rien". (voir article: http://blogs.mediapart.fr/blog/socializ/231015/les-menaces-du-gouvernement-democratique-venezuelien)
Il a déclaré dernièrement au peuple: "J'allais construire 500 000 habitations cette année, mais maintenant je ne sais pas (..) non pas parce-que je ne puisse pas les construire, car je le peux. Mais je t'ai demandé ton appui et tu ne me l'as pas donné"
D'autres déclarations de sa part et de la part du président de l'Assemblée Diosdado Cabello, relayées par les feuilles de choux communistes telles que le Grandsoir ou le blog Venezuelainfo (tenu par un Français qui travaille pour le gouvernement Vénézuélien) dont certains porte paroles publiant des billets sur ce blog adorent reprendre les articles dans Mediapart et continuent de tenter d'apeurer le peuple, leur faisant croire que les programmes sociaux vont disparaitre alors que les premières mesures prévues par l’opposition sur ce sujet visent au contraire à renforcer ces programmes sociaux (de toutes façons, ils sont loin d'être idiots et savent qu'ils ont été élus avec au bas mot 1/3 si ce n'est 1/2 des voix du Chavisme, s'ils veulent garder le soutien du peuple, ils ne peuvent faire machine arrière sur les acquis sociaux).

Prenons par exemple la "Mission Vivienda" qui consiste à construire des maisons pour les pauvres. Au final ce ne sont rien d'autre que des HLM car les habitants ne sont pas propriétaires des lieux et sont souvent poussés à militer et voter pour le gouvernement au risque de perdre leur maison s'ils refusent (c'est d'ailleurs la même histoire pour les universités bolivariennes, si les étudiants ne participent pas aux manifestations, ils sont virés). Une des premières mesures de la nouvelle assemblée sera de passer une loi permettant aux occupants des lieux de devenir propriétaires. C'est de même pour la plupart des institutions, elles seront améliorées et épurées des arrivistes et corrompus qui font qu'elle sont aujourd'hui largement inefficaces. Quand à l'abrogation de lois telles que la loi de réforme agraire, la crise économique et surtout la crise de productivité est justement le résultat de ces lois et certaines autres comme la loi de pêche, il est donc grand temps de les abroger.
Peur et manœuvres avant le changement de l'assemblée:
La nouvelle assemblée prendra possession des lieux le 5 janvier. D'ici là, la junte au pouvoir remue des bras pour tenter d'éviter de se noyer, ils vont renouveler l'intégralité des magistrats du tribunal suprême pour tenter de garder la main mise sur l'institution devenue un bras militant de l'exécutif, ils vont également tenter de passer des mesures pour bloquer les actions futures du nouveau parlement.
Et c'est qu'ils ont peur car dès Avril, l'Assemblée pourra convoquer à un référendum pour destituer le président, elle pourra également passer des lois autorisant l'extradition des narcogénéraux et membres du gouvernement qui participent à l'un des plus grands réseaux mondiaux de passage de cocaïne Colombienne. Avec la majorité de 2/3 que l’opposition a, elle pourra également, isoler l'Exécutif en destituant les magistrats fraichement nommés afin de redonner une indépendance au Tribunal Suprême qui en 10 ans ne s'est jamais prononcé une seule fois contre le gouvernement (sur 40 000 cas étudiés). Les membres du gouvernement ont peur d'aller en prison, ils ont peur que l’opposition réussisse à redresser le pays et surtout, ils ont peur de perdre tout l'argent qu'ils ont volé et qui sera sans aucun doute réclamé aux banques et institutions internationales une fois que la justice sera redevenue indépendante.
Avant tout le parlement travaillera sur le sujet de la crise économique et l'insécurité:
L'appel général de l’opposition (malgré quelques dérapages dus au sentiment de ressentiment après tant d'années de souffrance) est néanmoins de garder le calme et surtout, de ne pas faire aux Chavistes la même chose qu'ils nous ont fait pendant ces 16 ans car nous ne serions pas meilleurs qu'eux si nous tombions dans ces jeux (détentions arbitraires, expropriations, fermeture des chaines d’opposition etc etc etc).

Aujourd'hui les Venezueliens espèrent avant tout que des réponses seront données aux problèmes économiques (le Venezuela sera le pays avec la plus grande inflation au monde cette année) et d'insécurité (car le Venezuela est le deuxième pays le plus violent du monde). Les premières lois (mis à part celle d'amnistie pour les 80 prisonniers politiques et 4700 jeunes poursuivis par la justice) iront donc sans doute dans ce sens. Par ailleurs, autant les premières mesures seront simples à passer (en matière d'économie et de justice sociale), autant les suivantes seront plus complexes à implémenter compte tenu que l’opposition est un groupe de partis divers allant de la gauche à la droite équitablement représentés au sein du groupe parlementaire.
Avec ce vote historique, la dictature constitutionnelle prendra fin le 5 Janvier et l'avenir du Venezuela sera un peu moins sombre, le peuple restera cependant en alerte au cas où que les nouveaux venus tomberaient dans les mêmes cercles de corruption, populisme et népotisme que leurs prédécesseurs.

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