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Avant-Propos: Pour que vous puissiez vous faire une idée de l'équivalent des sommes en dollars, j'ai calculé l'équivalent des chiffres cités à partir de deux taux: le taux officiel (TO) à 6,8 Bvs (donnée de la Banque Centrale) pour un Euro et le taux Marché Noir (TMN) qui ce matin est à ~941 Bvs pour un Euro. Pour plus d'informations sur le taux de change et ses implications dans l'économie Vénézuélienne, je vous invite à consulter les premières lignes de l'article suivant: https://blogs.mediapart.fr/socializ/blog/281015/venezuela-83-smic-pour-nourrir-une-famille-de-5-personnes
Au sujet de l'article ci-dessous:
Le CENDAS-FVM (Centre de documentation d'analyse sociale de la fédération Vénézuélienne des enseignants) a publié des chiffres concernant le prix de "La canasta Alimentaria" (Il s'agit d'un ensemble d'aliments exprimé en quantités suffisantes pour satisfaire les besoin caloriques d'un foyer. Quand bien même cela représente un minimum alimentaire à partir d'un modèle de consommation d'un groupe de foyers de référence, les aliments présents dans la "Canasta Alimentaria" n'apportent pas tous les nutriments nécessaires à l'organisme).
Etat des lieux du mois de Novembre
La canasta básica familiale a atteint la somme de 110 116,47 (16 193€ au TO et 117€ au TMN) bolivars en octobre, a informé le CENDAS-FVM.
L'incrément par rapport au mois de septembre a été de 12 824,61(1885.8€ au TO et 13.6€ au TMN) bolivars (13,2%).
Selon le rapport du Cendas-FMV,la canasta a augmenté de 314,3% en un an soit d'un total de 83 540,43 bolivars (12285€ au TO et 88€ au TMN).
Il faut actuellement 14,8 SMIC pour pouvoir acquérir la canasta basica familiale (cinq membres).
Le prix desix rubriques a augmenté.
La variation mensuelle est causée par l'augmentation des prix de 6 des 7 groupes qui la composent. Au premier lieu, l'investissement moyen en vêtements et souliers qui a augmenté de 2 912, 23 (428€ au TO et 3€ au TMN) bolivars, montant de 7624,44 (1121€ TO et 8€ au TMN) à 10 536,67 (1549€ et 11€ TMN) bolivars soit 38,2% d'augmentation.
Les loyers des foyers ont augmenté de 19% par rapport au mois de septembre, de 3 270 (480 TO et 3,4 TMN) bolivars à 3890 (572€ TO, 4,1€ TMN).
Les dépenses liées à la santé ont augmenté de 14%, de 513 (75€ TO, 0.5€ TMN) à 585 (86€ TO, 0.6TM) bvs.
Les aliments ont augmenté de 7970,17 bvs (1172€ TO, 8.5 TMN) , passant de 61 897,91 (9102€ To, 65,7€ TMN) à 69868,08 (10274€ TO, 74€ TMN) bvs (12,9%)
Les onces rubriques de la canasta alimentaria ont augmenté de prix: sauces et mayonnaise; 47,7%; graisses et huiles, 40,3%, café, 19,2%, céréales et produits dérivés, 18,7%; lait, fromages et œufs, 16,9%; racines, tubercules et autres, 14,6%; viandes et dérivés, 14,1%; graines, 12,5%, fruits et légumes, 9,8%; suivre et sel, 5,8% et poissons et fruits de mer, 4,5%.
La différence entre les prix contrôlés (prix de vente imposé par l'Etat forçant souvent les producteurs à vendre à perte ce qui cause encore plus de pénuries car ils préfèrent détruire les denrées plutôt que de les vendre à perte ndlr) et les prix du marché est de 1 563,23%.

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Pénuries
Un total de 22 produits (37,93% des 58 produits que contiens la canasta) ont été touchés par les pénuries: lait en poudre, conserves de sardine à prix régulé, conserves de thon, poulet, viande de bœuf, margarine, sucre, porc, huile de maïs, fromage blanc dur, haricots, petit poids, lentilles, riz, farine de blé, avoine, pain, pates alimentaires à prix régulé, farine de maïs, café, mayonnaise et fromage jaune.
Par ailleurs, il y a également des pénuries sur d'autres produits de base tels que: le savon de bain, détergents, lave-vaisselle, cire pour sols, compotes, céréales pour enfants, PQ, couches, serviettes sanitaires, serviettes en général, lait condensé, lait liquide d'un litre, clore, adoucissant, rasoirs jetables, pâte dentifrice, shampoing et gel pour cheveux sans alcool.
Les articles d'hygiène personnelle et nettoyage du foyer ont augmenté de 2 314(340€ TO,2.45€TMN) à 2 477,33(364€ TO, 2,6€ TMN) bvs soit 7,1% d'augmentation.
Éducation
Le cout de l'éducation a augmenté de 6%, passant de 18 021 (2650€ TO, 19€ TMN) à 19 108,77 bvs (2810€ TO, 20€ TMN). Le prix des listes d'uniformes et matériel scolaire (maternelle à terminale) est passé de 46 077,07 (6776€ TO, 49€ TMN) à 229 305,20 (33721€ TO, 243,7€ TMN) augmentant de 183 228,13 (26945€ TO, 194,7€ TMN) bolivars (397,65%) entre octobre 2014 et octobre 2015. Il faut 30,9 SMIC pour couvrir ces frais.

Prix des repas
Le cout moyen d'un repas pour un travailleur est de 490 (72€ TO, 0.52€ TMN) bolivars. Le montant d'un ticket restaurant va de 75(11€ TO, 0.079€ TMN) à 112,50( 16.5€ TO et 0.119€ TMN) bolivars.
Un travailleur doit gagner trois smic mensuels juste pour pouvoir couvrir ses frais de transport et nourriture, en prenant comme référence une dépense moyenne de 1000(147€ TO, 1.06€TMN) bolivars et une semaine de 5 jours travaillés.
Fin de l'article que vous pourrez trouver en version originale ICI
Comment en sommes-nous arrivés là?
Il existe deux discours:
- Le premier, celui du gouvernement, repris par ses défendeurs, qui consiste à dire que le Venezuela est victime d'une guerre économique. Cette guerre serait menée par la droite fasciste et impérialiste (gentil terme permettant d'identifier toute personne qui s'oppose au gouvernement dans le pays ou à l'international) dans le pays ainsi qu'une coalition, que dis-je, une conspiration! internationale de la droite captialiste et l'impérialisme Américain visant à faire du mal au peuple Vénézuélien courageux et souverain qui résiste encore et encore!
- Puis le second, celui qui ne se veux pas populiste ou prosélytiste et se contente d'observer les faits: Les premières lois passées par Chavez soit les lois agraires et de la pêche ont mené à une transformation de la production nationale qui devait augmenter notre souveraineté alimentaire. Les nationalisations massives de centaines d'entreprises qui s'en sont suivit, visaient à assurer la souveraineté alimentaire mais également énergétique en plaçant les entreprises sous le giron de l’État comme la nationalisation de PDVSA et les entreprises gérant la production pétrolière, CANTV (télécoms), Sidor (Sidérurgie), Cemex (ciment), Los Andes (produits laitiers), Asfalto Oriente (goudron), Soltuca (soudures, tuyauteries), du coté de l'électricité, l'Etat a fusionné 10 entreprises d'Etat et 6 entreprises privées pour créer en 2007 le géant Corpoelec.
Mis à part ce contrôle exercé par l'Etat sur ces compagnies, ce dernier contrôle également la circulation de devises dans le pays. En clair, pour obtenir des dollars, il faut demander au gouvernement, par conséquent, pour importer des denrées, il faut demander au gouvernement, ce dernier attribue les devises et possède donc des données exactes sur qui à touché combien, quand et pourquoi.
Et pourtant, les installations électriques tombent en décrépitude faute de maintenance et de personnel qualifié, Sidor est souvent arrêtée par manque de matières premières ou à cause de grèves des travailleurs pourtant majoritairement Chavistes (de toutes façons lorsque l'on travaille pour l’État au Venezuela on est forcé de militer au Partit du pouvoir et d'assister aux manifestations du pouvoir) qui se plaignent du manque de moyens et des salaires dérisoires. De même il est difficile de trouver du ciment ou des produits laitiers qui sont en grande pénurie.
Pourtant, avant l'expropriation, il n'y avait pas autant de problèmes. Avant le contrôle de devises et l'arrivée de la Révolution il n'y avait pas de pénuries et le pétrole n'était pas aussi cher qu'il l'a été sous l'ère de Chavez. Que je sache, les marchés internationaux ne sont pas fermés au Venezuela qui est libre d’acheter et importer des matières premières au même prix que les autres pays et le gouvernement qui a pourtant main mise sur l'industrie de bon nombre de denrées et matériaux de base n'arrive pas à apporter de preuves de cette supposée guerre?
Pourquoi toutes ces pénuries et cette crise économique alors?
Plusieurs facteurs entrent en jeu. Le contrôle de changes étant à mon sens au cœur du problème. Ce contrôle dure depuis des années et l'écart entre le taux officiel et le marché noir ne cesse d'augmenter au fil du temps. Plus cet écart se creuse, plus les disparités se font sentir dans un pays qui persiste à opérer et baser son économie sur un taux de change fantôme. La banque centrale est obligée d'émettre de l'argent pour couvrir les besoins monétaires du gouvernement en interne ce qui a pour effet d'augmenter l'inflation, par ailleurs, la production a chuté grandement à cause de la gestion du gouvernement et l'on a préféré pendant des années utiliser l'argent à autre chose qu'à maintenir les installations (et la corruption et le clientélisme y sont grandement pour quelque-chose). Par dessus le marché, les revenus de L’État ont été divisés par quatre avec la chute brutale du cours du pétrole, il n'y a donc tout simplement pas assez de dollars pour couvrir les besoins en matière d'importation et maintenance tout en continuant de subventionner les aides sociales et les cadeaux faits à la population. Par ailleurs, des centaines d'entreprises ont fermé leurs portes, chassées par le gouvernement ou fuyant les conditions économiques du pays qui est engagé dans une spirale inflationnaire qui s’aggrave de plus en plus mois après mois et dont on ne vois pas la sortie...