Monsieur le Maire,
En tant qu’élue marseillaise, écologiste et profondément humaniste, je vous adresse cette lettre pour vous demander solennellement de suspendre le jumelage entre la Ville de Marseille et celle de Haïfa.
Face à l’horreur des événements en Palestine — guerre, famine, destructions massives, souffrances humaines inacceptables — notre ville ne peut rester silencieuse. Marseille, riche de son histoire de solidarité, de résistance et de paix, se doit de réagir.
Depuis octobre 2023, plus de 62 000 Palestiniens ont été tués dans la bande de Gaza, dont 17 500 enfants et plus de 11 000 femmes. On compte plus de 121 000 blessés, 1,7 million de personnes déplacées, et une grande partie du territoire réduite en ruines. Les Nations Unies et de nombreuses ONG alertent aujourd’hui sur une famine imminente. À ce jour, plus de 14 000 enfants de moins de cinq ans risquent de mourir dans les 48 heures, faute d’aide humanitaire suffisante.
Dans un tel contexte, il n’est plus possible pour Marseille de maintenir un jumelage avec Haïfa sans porter atteinte à ses propres valeurs. D’autres pays et collectivités ont déjà pris leurs responsabilités : la Bolivie a rompu ses relations diplomatiques avec Israël, tandis que la Colombie, l’Afrique du Sud ou encore le Belize ont suspendu ou réévalué leurs liens. En France, la ville de Gennevilliers a suspendu sa coopération avec Kiryat Yam, dénonçant l’ampleur des crimes commis à Gaza.
Notre propre président de la République, aux côtés du Royaume-Uni et du Canada, a récemment exprimé une inflexion dans sa position, soulignant que nous atteignons un point de bascule moral. Nous ne pouvons plus tolérer l’intolérable.
Marine Tondelier, secrétaire nationale d’Europe Écologie Les Verts, a dit avec justesse : « À Gaza, on laisse se dérouler un génocide sans rien faire. » En tant qu’élue écologiste, je m’inscris pleinement dans cette analyse, que je porte depuis le début des bombardements. Je la porte aux côtés des Marseillaises et Marseillais qui, chaque semaine, battent le pavé pour crier justice, pour les enfants, les familles, les survivants de Gaza. Cette clameur populaire, douloureuse et digne, ne peut rester ignorée plus longtemps.
Marseille est une ville-monde, une ville-carrefour, une ville-métaphore, que le poète Édouard Glissant décrivait comme porteuse de la Relation. Elle a toujours incarné la fraternité entre les peuples. Suspendre ce jumelage serait un acte de conscience, un message d’espoir et de justice, au nom des enfants, des femmes et des civils victimes de cette guerre.
C’est aussi affirmer, fermement, notre attachement au droit international, à la dignité humaine, et à la paix. Je suis convaincue que cette décision serait comprise, soutenue et portée avec force par de nombreux Marseillais et Marseillaises.
Monsieur le Maire, vous êtes le garant de cette histoire fraternelle que notre ville incarne. C’est avec tout le cœur que mérite ce combat que je vous remercie de votre écoute.
Je vous prie d’agréer, Monsieur le Maire, l’expression de ma haute considération.
Soilihi Chahidati
Élue chargée des luttes contre les exclusions, la solidarité et l'écologie populaire à Marseille