Monsieur Arnauld CARPIER
Citoyen habitant l’Hérault
Lettre ouverte[1]
Vendredi 27 novembre 2020,
Monsieur Patrick VIGNAL
Député de la 9° circonscription de l’Hérault
Monsieur le Député,
Vous vous êtes abstenu sur le vote, en première lecture à l’Assemblée Nationale, de la loi dite « Sécurité Globale ». J’imagine que vous nous expliquerez, comme lors du vote sur la déchéance de nationalité, qu’étant en accord sur certains points et en désaccord sur d’autres, ce vote au final s’imposait à vous.
S’il est de bon ton aujourd’hui de mesurer chichement son électorat pour ne froisser ni les uns ni les autres, je croyais, eu égard au ton et au verbe haut que vous affectionnés que vous sauriez mesurer plus au fond les risques que cette loi fait courir à notre République.
Cette loi égrène différents articles qui entament sévèrement la liberté d’expression et l’exercice de la citoyenneté dans ce pays : bien sûr la question de la captation et de la diffusion d’images des forces de l’ordre, mais également le renforcement de la surveillance des citoyens hors des actes délictueux, ou bien encore le glissement vers des forces de sécurité privées pour assumer des fonctions régaliennes.
Faut-il que votre majorité se soit autant isolée et claquemurée dans ces certitudes pour ne pas s’interroger sur le sens historique de ce texte ? La fuite en avant vers plus d’autoritarisme est-elle alors le chemin en tous domaines pour imposer les volontés de l’exécutif ? Le gouvernement que vous soutenez a sapé de lui-même et perdu la confiance d’une large partie de la population. C’est dramatique au regard du fait qu’on ne peut inciter une Nation à faire face à l’adversité sans un minimum de cohésion et d’adhésion. Mais cette adhésion, en démocratie, elle se gagne par le dialogue, la confrontation d’idées et le respect des institutions élues et dédiées à la gouvernance. Et surtout la vérité, les yeux dans les yeux.
Faut-il également qu’elle ait perdue tout sens politique pour ne pas anticiper sur ce qui représenterait une victoire politique majeure des ennemis déclarés de la République, à droite, y compris dans vos rangs et à l’extrême-droite. C’est avec celles et ceux qui déclarent vouloir sortir notre pays de l’état de droit, qui contestent la cour européenne de justice ou les institutions internationales ou qui appellent de leur vœux un pouvoir autoritaire que la très grande majorité de votre groupe a mêlé ses voix.
Suffit-il alors de s’abstenir ?
C’est votre droit.
C’est le mien d’être vigilant. A ce titre, je souhaite également attirer votre attention sur l’abaissement des pouvoirs du Parlement et note ce matin que le Ministre de l’Intérieur et le gouvernement, après avoir obtenu le vote honteux de sa majorité, vous désavoue en recourant à une commission indépendante pour faire modifier l’article 24. On touche véritablement le fond.
Bien à vous Monsieur le Député,
Arnauld CARPIER.
[1] Envoyé par courriel.