A Lyon, 300 personnes réunies en soutien à Kélé et à tous les jeunes frappés d’OQTF

Le rendez-vous est donné à 18h, mais dès 14h, les bénévoles s’activent pour préparer la soirée.

Le buffet s’installe : mise en place de plateaux préparés par des membres du collectif RESF Val-de-Saône et de la chorale Les Chant’ Sans Pap’Yé. Xavier s’occupe des branchements sur scène, il sera en charge de la technique tout au long de la soirée.

Les bénévoles ont entre 30 et 70 ans, beaucoup font partie du Collectif de Soutien à Kélé ou du Collectif Jeunes RESF-69, et tous⋅tes connaissent 

Kélé depuis plusieurs années et sont bien au fait des difficultés rencontrées par les jeunes dans sa situation. Notamment les familles Montabroud Rongier et Delorme qui ont pris soin de Kélé dès le début et le soutiennent depuis 10 ans. Certains soutiens sont très actifs dans les milieux associatifs, d’autres s’impliquent ponctuellement, au gré de leurs disponibilités ou de leur proximité avec un jeune sous le coup d’une Obligation de Quitter le Territoire Français (OQTF). Dans le sillage de ces jeunes comme Kélé, on retrouve systématiquement des éducateurs, des professeurs, des employeurs, des collègues, des accueillants, des ami·es, … des personnes qui ont touché du doigt la brutalité de l’administration française par le biais d’un jeune dont elles étaient proches, et ont ressenti l’injustice dont elles étaient témoins. Les soutiens qui se forment autour des Mineurs Non Accompagnés (MNA) et des jeunes majeurs sont à l’image de leurs entourages : variés. Dans le cas de Kélé, on retrouve de nombreux⋅ses artistes, puisque Kélé écrit de la poésie, fait partie de la Chorale Les Chant’ Sans Pap’Yé et a fait partie de deux compagnies de théâtre.

A partir de 18h, les organisateurs⋅rices commencent à accueillir le public. Quelques-un⋅es tiennent un point presse en compagnie de trois jeunes

majeurs auprès des journalistes présent⋅es. A l’intérieur, des groupes se forment, l’ambiance est conviviale et les conversations emplissent la salle. Certain⋅es consultent le recueil de poèmes de Keletigui Sylla, « Ecrire Sans Arrêt », et le livre de Mamadou Sow et Azouz Begag, « Né pour partir ». On prend connaissance d’une tribune des milieux de la culture, en soutien à Kélé, signée par 162 artistes et personnalités culturelles, dévoilée pour la première fois à l’occasion de cette soirée, de la pétition, des communiqués des différentes associations présentes, des témoignages de jeunes accompagnés par RESF, des articles de presse sur Kélé…

Bassirou Sigué expose une quinzaine de ses dessins et peintures, qui sont autant d’instantanés autobiographiques. Il présente aujourd’hui ses productions les plus récentes, qui racontent des épisodes de sa vie en France, des images ou des personnes qui l’ont marqué, les sentiments qui le traversent. Il échange avec les visiteur⋅euses, et leur présente les deux livres qui regroupent l’ensemble de ses œuvres : « Le Voyage de Bassirou » et « Ma Vie en France ».

Quelques minutes plus tard, la fanfare FAME fait retentir les premières notes de musique. Iels sont une vingtaine de musicien⋅nes, venu⋅es à l’appel de Marie Delorme, une des clarinettistes du groupe. Ils ont préparé des sous-titres, pour les refrains et les slogans qui accompagnent leurs mélodies, imprimés sur de grandes pancartes qu’ils brandissent à tour de rôle et que la salle reprend en chœur. La soirée est lancée, dans une bonne humeur et une énergie communicative.

Peu avant 19h, Sylvie Achard, Armand Creus et Claudine Lebègue, trois des cinq marraines et parrains républicains de Kélé, prennent la parole au nom du Collectif de Soutien à Kélé. Armand retrace brièvement le parcours de Kélé, son combat pour sa régularisation, les épreuves qu’il a dû affronter, celles qu’il doit encore affronter aujourd’hui, après dix ans de présence en France. L’émotion est palpable. Compte tenu des diverses intimidations des autorités depuis l’émission de l’OQTF en mars dernier, Kélé n’était pas en mesure de participer à sa propre soirée. Son absence ce soir est vécue comme une brutalité par ses proches. C’est aussi cela que la loi Darmanin instaure : un climat de crainte et de méfiance. La crainte de ne pas pouvoir faire valoir ses droits convenablement. La méfiance envers des autorités qui traitent les sans-papiers comme des criminels, en les plaçant en Centre de Rétention Administratif afin d’accélérer leur expulsion. Nous vous recommandons d’ailleurs la lecture de l’article de Lionel Perrin au sujet des conditions de rétention sur place, que vous trouverez ici.

La soirée continue avec une lecture musicale de poèmes de Kélé, par les ateliers d’écriture Dans Tous Les Sens, dont Kélé fait partie, sous la houlette du poète Mohammed El Amraoui, accompagné de Dimitri Porcu à la clarinette basse. Thierry Renard s’est joint à eux et déclame un poème qu’il a écrit pour Kélé, dont il est un soutien de longue date. Sept membres des ateliers, ainsi que l’auteure Dominique Paravel, lisent les poèmes qu’ils ont choisis au sein du recueil de Kélé, tandis que Dimitri épice leur lecture de mélodies évocatrices, tantôt apaisées, tantôt agitées. Mohammed conclue l’intervention par le texte « Qui suis-je ? », que Kélé a eu si souvent l’occasion de lire en public, et résonne ce jour d’une toute autre manière.

C’est ensuite au tour de Michèle François, et de 3 jeunes majeurs du Collectif Jeunes RESF-69, de prendre la parole pour informer sur les dégâts causés par les OQTF dans la vie des anciens mineurs isolés et d’autres jeunes majeurs qu’elles frappent. Les jeunes présents témoignent de la cassure provoquée par l’OQTF dans leur situation sociale et professionnelle au moment où elle est tombée, et du systématisme avec lequel leur identité est remise en question par la préfecture après que l’ASE, le Parquet ou un juge l’aient contestée dans un premier temps. Quelques jours auparavant, la Cour d’appel du tribunal administratif de Lyon a annulé l’OQTF de l’un d’eux, et a obligé la préfecture à lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et à réexaminer son dossier. Sa victoire est un espoir pour tous les jeunes que la préfecture malmène. Michèle transmet également le témoignage de Mamadou Sow, qui n’a pas pu se libérer pour être présent. Dans le message qu’il a confié à Michèle, il fait part de sa volonté de réussir sa vie, "de ne pas vivre en l’état de « vagabondage » comme vivent tant de jeunes guinéens dans leur pays", selon ses propres mots. Il insiste sur l’importance de l’école. Pour RESF, Michèle insiste sur la nécessité de refuser le tri opéré parmi les jeunes à coup d’OQTF, ainsi que sur la nécessité de ne pas séparer la défense de ceux qui réussissent le mieux de la défense de ceux qui n’arrivent pas à surmonter les difficultés.

Après un court entracte, c’est au tour de Pat Kalla de monter sur scène. Il chante et narre en musique des contes de son cru, ou transmis de bouche-à-oreille depuis des générations, et poursuit cette transmission en invitant le public à l’accompagner dans ses gestes et ses exclamations. C’est un véritable échange qui se noue, tant le public accompagne la narration de Pat, et l’étoffe de ses voix et de ses cris. Pour finir, il invite le conteur Paul Pons à le rejoindre sur scène, et l’accompagne à la guitare.

Alors qu’on s’approche doucement de la fin de cette soirée de soutien, le visage de Kélé apparaît sur scène. Il a préparé un court message vidéo qui est diffusé sur le rétroprojecteur de la salle. Après avoir remercié ses soutiens, il déclame un nouveau poème « Les Oubliés » qu’il a écrit sur sa situation actuelle partagée avec tant d'autres jeunes. L’émotion est vive parmi l’auditoire. Afin de redonner un peu de baume au cœur à tout le monde, Pierre, qui anime la soirée, annonce que la tribune signée par les 162 artistes qui soutiennent Kélé sera publiée dès le lendemain par Mediapart, à qui le collectif l’a transmise en début d’après-midi. Vous pouvez retrouver cette tribune ici.

Le programme continue avec les Chant’ Sans Pap’ Yé. Sophie Gentils, leur guitariste et cheffe de chœur, prend immédiatement la parole pour dire toute l’indignation que suscite l’impossibilité pour Kélé de chanter sereinement avec la chorale ce soir. Petits et grands entonnent alors les textes écrits en commun, lors d’ateliers d’écriture auxquels Kélé a participé. Peu à peu, leur énergie donne à chacun le sourire, l’envie de les accompagner dans les refrains et fait un peu oublier que Kélé devrait être en train de chanter avec eux.

La soirée s’achève avec Claudine Lebègue, qui déclare sa fierté d’être la marraine républicaine de Kélé, et l’attachement qu’elle a pour lui, et que tant de personnes dans la salle partagent. Entre deux chansons, elle interprète des textes de Kélé qu’elle a piochés dans son recueil. Des rires parcourent la salle à l’écoute de « Match de Foot », un texte plein d’humour qui fait s’affronter différentes mascottes. S’accompagnant à l’accordéon, elle fait entendre les dernières notes de musique de cette soirée.

Il est alors l’heure de nettoyer et de ranger afin de rendre la salle. Un véritable ballet se met en place, auquel chaque personne encore présente participe. Jusqu’au bout, cette soirée aura été sous le signe de la solidarité et de l’entraide.

Le Collectif de Soutien à Kélé et le Collectif Jeunes RESF-69 tiennent à remercier toutes celles et ceux qui étaient présent⋅es, toutes celles et ceux qui ne pouvaient pas venir ce soir mais étaient avec nous par la pensée, les artistes qui sont venu·es se produire bénévolement, ainsi que la mairie du 8ème arrondissement de Lyon qui nous a mis gracieusement à disposition la salle, et sa gardienne qui nous a accueilli·es et accompagné·es dans la mise en place de cet événement.

Pour soutenir Kélé, vous pouvez signer la pétition que vous pouvez trouver ici :

chng.it/nFP6nts9gp

Des mobilisations vont suivre dont vous pourrez être informé⋅es en suivant les réseaux :

facebook : https://www.facebook.com/soutenezkele/

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Si vous souhaitez en savoir plus :

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http://resf-jeunes69.fr/

Pour nous contacter :

Contact du Collectif de Soutien à Kélé : soutenez.kele@gmail.com

Contact du Collectif Jeunes RESF-69 : resfjeunes69@gmail.com