La prevention spécialisée du 86

Les éducateur-rices de rue du 86 (Sud santé-sociaux)

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Billet de blog 5 mai 2024

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Éducs de rue supprimés : un choix politique irresponsable

Le conseil départemental de la Vienne a décidé de diminuer de 250 000€ la dotation annuelle allouée au service de prévention spécialisée qui dépend de l'ADSEA86. C’est 3 quartiers délaissés et donc 400 jeunes et leur famille dont l’accompagnement s’arrête brutalement. Cette décision vient acter le tout répressif et la fin partielle du préventif...

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ÉDUCS DE RUE SUPPRIMÉS : UN CHOIX POLITIQUE IRRESPONSABLE

Le conseil départemental de la Vienne lors de son vote du budget 2024, le 29 mars dernier, a décidé de diminuer de 250 000€ la dotation annuelle allouée au service de prévention spécialisée qui dépend de l’ADSEA86. C’est 5 postes en moins. 3 quartiers sur 9 où les éducateurs de rue ici ne peuvent plus intervenir ; C’est au bas mot 400 jeunes et leur famille dont l’accompagnement s’arrête brutalement. A Poitiers, depuis le 29 avril, plus aucun éducateur de rue n’intervient sur le quartier de Bellejouanne et celui des 3 cités. Bientôt, c’est Le Lac à Châtellerault qui sera délaissé. Cette décision vient acter le tout répressif et la fin partielle du préventif dans une période où  les sujets liés à la jeunesse, à la protection de l'enfance, aux violences et aux incivilités semblent être au cœur des préoccupations du gouvernement. Un vote rectificatif du budget est prévu le 21 juin prochain.

                                   

Illustration 1
Mobilisation devant le Conseil Départemental lundi 29 avril © Emilie Neveux

C’est pourquoi depuis un mois les éducateurs de l’équipe de prévention spécialisée du 86 mais aussi tous les partenaires de la prévention spécialisée (maisons de quartier, missions locales, assistantes de service sociale, éducateurs d’AED et d’AEMO, travailleurs sociaux exerçants dans le soin, CPE, psychologue de l’éducation nationale…) ainsi que les collègues des services de prévention spécialisée ailleurs en France et les habitants de ces quartiers délaissés sont mobilisés pour défendre le caractère indispensable de la mission occupée par les éducateurs de rue. Cette mobilisation est soutenue par l’intersyndicale sud santé-sociaux / CGT action sociale et déjà relayé par de nombreux médias tant locaux que nationaux. Les salariés comme les partenaires sont déterminés à se battre jusqu’à ce que le département revienne à la raison afin que nous retrouvions les moyens d’assurer nos missions sur tous les quartiers. Nous serons présents le 30 mai lors de la prochaine commission permanente et le 21 juin lors du vote rectificatif.

Nous avons créé un site sur lequel se trouve une tribune qui recueille déjà une soixantaine de signataires : http://sauvonslaprev86.fr

Nous portons également une pétition en ligne avec plus de 3500 signatures :

https://www.change.org/p/sauvons-les-educs-de-rue-de-poitiers-et-châtellerault

D’autres services de prévention spécialisée sont ou ont été en danger de la même manière que nous. Ainsi, au-delà de notre situation locale, l'enjeu revêt un caractère national. En effet, si récemment, la prévention spécialisée a été reconnue comme compétence obligatoire des départements (cf article L221-1 et 221-2 du CASF), il n’existe aucun texte légal qui encadre les moyens et donc les financements que les départements devraient allouer à ces services.

Pour ne plus servir de variable d’ajustement budgétaire, il est indispensable de reconnaître la Prévention Spécialisée en tant que compétence et financement obligatoire du Département ou de la métropole. Une mission ministérielle de 2017 sur l’avenir de la prévention spécialisée avait établi 12 recommandations. Pour nous, il est urgent d’engager une réflexion et des actes sur les 3 axes prioritaires suivants :

  • Élaborer un texte réglementaire définissant les orientations doctrinales fondamentales et précisant le cadre de référence de la prévention spécialisée
  • Inscrire toute mesure complémentaire pour la Prévention Spécialisée financée par l’État dans le cadre d’une convention avec le Département ou la métropole, afin de garantir son inscription dans le champ de l’Action Sociale.
  • Exiger une formation de qualité pour les nouveaux professionnel.le.s et une reconnaissance statutaire

Nous interpellons les députés et les sénateurs afin qu’ils se saisissent de ce sujet de société concernant l’avenir de la jeunesse et la prise en compte des problématiques actuelles dans les quartiers populaires où nombre de nos concitoyens se sentent abandonnés par les pouvoirs publics.

Les éducateurs de rue aussi appelés « la prev » interviennent sur les territoires les plus fragilisés des agglomérations. Ici dans la Vienne, nous intervenons au quotidien sur les quartiers populaires (politique de la ville) des villes de Poitiers et Châtellerault. Notre mission est d’aller vers les enfants, adolescents et jeunes adultes vulnérables pour leur offrir un repère dans le temps et être ce lien qui les accompagnent vers les institutions de l'État (l’école, le travail, la culture, les loisirs, le soin…). Nous sommes intégrés au schéma départemental de protection de l’enfance car nous constituons un des premiers maillons du système de protection de l’enfance. Grâce à une présence quotidienne et inscrite dans le temps, nous sommes au plus près des personnes pour repérer, prévenir, alerter et accompagner les enfants, adolescents et jeunes adultes en risque de danger. Nous sommes aussi un des derniers remparts, liens, quand toutes les institutions ont échoué pour accompagner la jeunesse.

Notre travail c’est donc de proposer un accueil inconditionnel à ces jeunes et de trouver avec eux et leurs familles des solutions à leurs difficultés. Faire exister leurs droits et leurs devoirs afin de pouvoir les orienter et accéder à l’autonomie. Les situations que nous rencontrons sont multiples : jeunes filles approchées par des réseaux de prostitution, adolescents victimes de harcèlement, jeunes adultes souffrant de troubles psychiatriques, signalement de maltraitances, soutien à la parentalité… La prévention spécialisée, c’est un travail conçu en partenariat, un maillage fin avec les acteurs du territoire qui partagent avec nous cette attention aux plus fragiles, aux plus abîmés pour leur permettre de s’épanouir et de s’émanciper de leurs difficultés passées, présentes et de prévenir les futures. Selon l’arrêté de 1972, nombre d’actions de la Prévention Spécialisée agissent directement sur le milieu de vie du public rencontré. Elles maintiennent ainsi la cohésion dans des quartiers sinistrés, dépossédés de réponses ou de lieux de droit commun.

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