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Billet de blog 2 juillet 2008

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L'esprit docile.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

108. A notre époque on a le droit de presque tout dire et son contraire. On a le droit de s’insurger, même si certaines précautions sont nécessaires (Moi-même, je prends quelques précautions). Mais le public, de faible curiosité, n’entend pas car il est assourdi, abruti, hagard, sous les assauts audio visuels, ludiques, sérieux-ludiques, à tel point qu’il ne fait pas, en masse, la différence entre la blague et le « sérieux », le vrai et le bidouillé pour rire, ou par propagande, ou les deux. Il n’a pas la ressource de choisir… Ses sources. L’apprentissage tel qu’il a été conçu en application des préceptes d’égalité et de liberté, est obsolète. Dépassé. Il est hors de question, sauf pour une élite qui reste constante, d’apprendre à apprendre, et de se construire un jugement personnel.

109. Vendre, c’est hyper sophistiqué.

Les groupes sociaux-économiques auxquels nous sommes agrégés priment sur l’individu : celui-ci doit apprendre à obéir à des préceptes érigés en religions (dans les grandes écoles notamment, mais aussi dans tous les centres d’apprentissage de plus bas niveau social) : se mettre corps et âme au service intime des empereurs mondiaux, et participer à leurs œuvres de créations de bénéfices immédiats, à leurs formidables guerres féodales (car ils sont en concurrence), et dépenser les riches aumônes qui leurs sont faites. Par exemple, rien qu’en chine, il faudrait une bonne vingtaine de centrales nucléaires neuves, le plus tôt possible, si on veut continuer comme ça. Qui aura le marché ? Moi ! Moi ! Moi ! Allez-y, les gars: IMPOSSIBILITE FORMELLE, CULTURELLE ET PERSONNELLE, D’ESSAYER DE PENSER A AUTRE CHOSE AVANT D’AVOIR GAGNE CETTE BATAILLE. Chaque agent et partenaire de notre groupe est un vecteur de vente et de création de bénéfice. Et vous serez des hommes, vous aurez vos salaires et nous les dividendes à dépenser, c’est pour le bonheur.

Je trouve que ces perspectives humaines, dominantes, sont étroites, et qu’elles ne s’écartent pas du fond d’activité potentiel de tous les êtres vivants, même si elles sont chez nous hyper sophistiquées, hypertrophiées.

110. Temps, remplacement.

Peu importe s’il possède de multiples châteaux-succursales sur la planète, et huit-cent mille fantassins-producteurs et vendeurs, l’empereur doit accroitre son domaine et sa fortune, c’est sa religion qui l’impose : car chaque année, il doit offrir des dons en dividendes et en valeur d’action aux dieux innommables, car anonymes, qui le tiennent dans sa main. Tout le reste est secondaire. Les monothéismes issus de la fixation par l’écriture de mythes et de découvertes sur la nature de l’homme, sont enfin remplacés.

111. Une religion chasse l’autre.

Cet animisme triomphant à notre époque victorieuse, qui consiste à honorer des divinités anonymes par le travail d’une multitude d’individus et l’exploitation (minière) de territoires, montre bien qu’une religion humaine est remplaçable par une autre. Question de temps et de remplacement des générations, d’usure des fidèles et des dirigeants, de changements d’habitudes de croire et de penser, d’opportunités techniques, de peurs. Qui a peur de la mort et de son éternité imagée ? Personne aujourd’hui, on n’y pense pas, elles sont abstraites, prises en charge par des spécialistes cotés en bourse. Je ne miserais pas un centime sur le devenir à moyen terme (quelques siècles) de cette nouvelle religion, ni des autres d’ailleurs, même les plus remuantes. Par contre, je suis certain qu’elles seront remplacées.

112. Des dogmes et des sociétés.

Et justement, qu’est-ce qui peut bien faire que ces dogmes s’installent, puis s’étiolent et soient remplacés au cours du temps ? Ce n’est pas à cause de la découverte d’une vérité, qui permettrait d’éliminer les erreurs du passé, puisqu’il s’agit de dogmes, c'est-à-dire de « révélations » proclamées par des crieurs publics. En effet : aucun dogme ayant fleuri depuis l’avènement de la cérébralité humaine, résultat collatéral de sa conscience, de son inventivité, ne supporte un examen extérieur. Ils ne supportent que l’adhésion ou le rejet. L’adhésion suscitant l’approbation de ses adhérents, le rejet suscitant la désapprobation. Nous sommes, consubstantiellement à notre conscience courte (celle qui s’arrête aux frontières d’une culture tribale), tributaires (c’est exactement le mot) de telles appartenances, qui ne se définissent que par ce seul autre mot: la croyance. D’ailleurs, pourrait-on supporter de vivre sans croire ?

113. Changement de programme, hérésie.

L’effet de groupe est important dans la vie humaine. L’union fait la force. Les dirigeants parlent d’être ensemble et de rassembler pour agir, sous entendu : avancer (conquérir) dans la direction qui nous conduira au bien, en tous cas au mieux. Le fait qu’on puisse éventuellement soupçonner quelques uns de ces dirigeants se songer d’abord à leur propre « bien », à leur propre croissance dans la société où ils se trouvent à l’aise comme un poisson dans l’eau, n’enlève rien de la force du slogan. Aux temps de l’inégalité, il s’agissait de rallier, de gré ou de force, et d’obéir. Aux temps de l’égalité il s’agit de rallier et de se conformer aux préceptes dirigeants. C’est très différent et cela revient au même : plus fort que les voisins, dominer, plus puissants et plus riches ? C’est un programme deux cent fois millénaire. Et si nous changions de programme, ce serait une hérésie humaine ? Ou une hérésie pour tout être vivant qui serait, comme nous, vindicatifs de nature ?

114. Au début était le Verbe .

Dans l’histoire d’une genèse, reprise de la tradition orale de façon à ce qu’elle serve l’utilitaire d’une organisation sociale nouvelle, on trouve en substance : « Alors apparut le verbe, et le verbe était Dieu ». Le verbe, c’est la parole, le langage. Il est certain qu’il faut parler le même langage, au sens propre et au sens figuré, pour faire un groupe humain structuré. Et cette superbe réalisation, si difficile à maintenir avec tous ses singletons et ses sous ensembles qui la composent, avait si bonne presse dans les temps anciens que le concept est passé de bouche à oreille de génération en génération. Puis, il a été écrit dans les ouvrages de référence de religions monothéistes. Mais ce Dieu, à l’origine, n’était-il pas plutôt le groupe constitué, fort, cimenté par un même langage, le dieu de la tribu, sans lequel elle n’existerait pas ?

115. La surrection des dieux.

Les dogmes changent, et les religions aussi, à l’insu de la vie quotidienne : il n’existe pas de monothéisme total. Dès que la pression sociale et pénale se desserre, d’autres dieux osent apparaître, comme spontanément irradiés de nos consciences aux limites mouvantes.

116. Educations.

Un individu qui aurait connu le milieu du 19ème siècle par exemple, ses interdits, ses aspirations dans différents milieux sociaux, aurait été ébahi en visitant la fin du 20ème, avec ses différences d’habitudes de pensées, de vies, de considération des personnes féminines et masculines, des concepts à la mode. Mais, constatons le, des habitudes de pensée et de vie, il y en a toujours chez les hommes. Ce n’est pas leur « qualité » qui compte, c’est leur existence. Par exemple, un musulman intégriste, conditionné socialement pour donner sa dépouille mortelle à la cause de la croissance de la vraie foi, en échange du paradis (c'est-à-dire en échange d’un statut social privilégié dans le groupe humain vivant après la mort, qu’il ne pourrait jamais atteindre autrement), il est inutile d’essayer de lui parler. Il a un langage différent et ne comprendra pas, et on ne le comprendra pas. De plus, sa conscience spécialisée ne peut pas lui permettre d’envisager un autre langage que le sien. Et cet homme là y voit une horreur à abattre en donnant sa vie. Pourtant, c’est un homme comme un autre : plongez-le en bas âge dans une famille moyen-bourgeoise du 19ème siècle en France, et il sera un catholique respectueux du dogme catholique, et des transgressions comportementales que la société autorise aux hommes à cette époque.

117. Des hommes interchangeables ?

Un homme moyen, satisfait de sa conscience courte, réussira raisonnablement partout où il sera parachuté par la naissance et l’éducation, pourvu que la société, le groupe humain où il atterrit soit bien formé, et qu’il n’ait pas d’accident de chance. Est-ce à dire que les hommes sont interchangeables, alors que des sondages de 1000 personnes sont capables d’indiquer les intentions et les avis d’une population entière? C’est discutable, vous ne trouvez pas ? Et peut-être que cette interchangeabilité n’existe que dans le foisonnement d’une population, et non pas à titre individuel ?

118. l’individu et la ruche.

La réunion des êtres humains en groupes structurés font leur puissance. Y-a-t-il un équivalent chez les autres êtres vivants ? La fourmilière ? La ruche ? Ou chaque individu a sa place dans l’organisation commune ? La comparaison ne tient pas : La structure d’une fourmilière d’une espèce donnée est stable. L’individu est condamné à faire les gestes qu’il fait, certes merveilleusement, mais dont l’initiative est calibrée absolument par une règle qu’il ne peut enfreindre volontairement. Il n’en a pas la ressource cérébrale. Les groupes humains sont instables et tributaires de la volonté des individus à ne pas enfreindre la règle qui a été mise en place à la foi volontairement et sous la contrainte, et qui a absolument besoin d’être constamment justifiée et réaffirmée : c’est le rôle de tous, chacun à sa place dans la société, dans un contexte d’initiative individuelle toujours possible, quelle qu’elle soit.

119. L’initiative n’a pas de sens déterminé.

L’initiative individuelle, chez l’homme, va dans tous les sens, et souvent vers une transgression. Si les circonstances sont favorables elle trouvera un écho, souvent après bien des vicissitudes, auprès d’autres individus qui vont peut-être se fédérer, au moins mentalement, autour de cette initiative, qui pourra peut-être s’ériger en système de pensée et d’action. Et puis les décennies passent, les siècles, et d’autres initiatives fédérant à leur tour des groupes humains, prennent le dessus et … s’étiolent et disparaissent à leur tour dans l’armoire à rangement de la préhistoire et de l’histoire, sans que l’on perçoive d’usure dans la motivation humaine. Pendant ce temps la fourmilière, tant que l’espèce donnée perdure, reproduira un même schéma, inamovible, de comportement individuel et collectif, sans que les fourmis s’en inquiètent, il n’y a qu’à voir le cœur qu’elles mettent à l’ouvrage. On ne perçoit pas d’usure dans leur motivation instinctive. C’est le seul point commun avec les sociétés humaines, il me semble.

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