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Billet de blog 7 juillet 2013

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Les mateurs de Roms et leur mode d'emploi

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Christian Estrosi et Oskar Freysinger ne se connaissent pas. Pas encore. Le premier est le beau gosse de Nice, le second le hérault en catogan du Valais réactionnaire. Ils ne se connaissent pas. Mais peut-être devraient-ils songer à organiser, sous le soleil niçois ou valaisan, une conférence internationale portant sur les modes d’emploi pour « mater »Roms et gitans.

En Valais, Christian Varone, le commandant de la police cantonale, et Oskar Freysinger, le nouveau Conseiller d’Etat du Canton du Valais (UDC/extrême droite), soucieux que les événements de l’été passé ne se reproduisent pas, ont choisi le 22 juin 2013 d’organiser une conférence de presse et de présenter leur plan en cas d’occupation illicite de terrains par les Roms. En l’absence de législation cantonale sur le stationnement des gens du voyage, les deux compères de la droite cantonale, hier ennemis, aujourd’hui réconciliés par les gitans, ont fondé leur mode d’emploi sur la clause générale de police, principe constitutionnel qui permet à l’autorité d’intervenir pour préserver l’ordre public. La norme qui permet de tout faire et son contraire. Et c’est ainsi que les deux héraults du respect du droit de la propriété ont savamment conclu un plan. Lequel prévoit d’encadrer l’éventuel lésé (le propriétaire du terrain) et lui garantir le paiement des frais engagés par la police par le séquestre des véhicules du convoi. En résumé : vous les Roms, venez en Valais, on vous séquestrera alors vos voitures, vos caravanes, vos roulottes, dont le produit pourra être utilisé à des fins de remboursement des frais engagés par la police. Et qui sait aussi pour garantir le versement d’une indemnité en faveur du propriétaire mécontent.

Christian Estrosi lui, dans Le Monde du 7 juillet 2013 et dans Le Figaro du même jour, veut « mater les Roms » et prévoit  un autre plan : « « La première chose que je fais, c’est de vous mettre caméras partout, pour surveiller vos faits et gestes dans les quelques heures qui viennent. On va noter ceux qui rentrent, sortent, à quelle minute, à quel moment et ce que vous allez faire partout, dans la ville, dans la métropole, etc. » « Je vais relever les plaques d’immatriculations les unes après les autres », a poursuivi le maire de Nice. « Je fais un référé devant tribunal à titre conservatoire pour pouvoir saisir les véhicules, vous savez ces belles et grosses voitures avec lesquels ils tirent leurs belles et grosses caravanes pour lesquelles les Français, il faudrait quelque fois toute une vie pour se payer la mienne. » En résumé : contrôle de la vie privée des Roms par utilisation de moyens publics massifs (caméras) et accélération des contrôles d’identité (cf. @cestrosi). A ce stade d’intelligence encrassée, on ne peut que conseiller aux Roms de requérir des mesures provisionnelles auprès de la Cour d’appel de Versailles : on ne sait jamais, au bout du processus, ces gens du voyage pourraient obtenir les ressources financières pour renouveler leurs moyens de transports.

Christian Estrosi et Oskar Freysinger savent porter le fer là où ils sont certains de retrouver la fibre patriotique, la peur du lendemain, la crainte d’une sécurité qui serait menacée. Là où ils veulent extraire ces voix populistes dont ils sont convaincus qu’ils feront d’eux les bien-aimés de tous les apeurés sécuritaires d’aujourd’hui et de demain.

Et puis c’est être dans le vent et sous le soleil des médias que de savoir, dans ces zones de forte chaleur estivale, se faire reconnaître comme un fort, un déterminé, un musclé de la chose sécuritaire.

C’est bien beau l’ironie, me lancerez-vous ! Oui, que faire d’autre pour maîtriser les gens du voyage ? Peut-être que cette proposition de colloques entre ministres éclairés aboutiraient à une nouvelle voie de résolution de ces conflits d’été. Les policiers de Nice pourraient passer leu été en Valais et les gars de Varone descendre sur la Côte niçoise. Les uns et les autres emporteraient avec eux leurs Roms, qui découvriraient ainsi d’autres régions du monde et d’autres terrains nus, de football ou de champs de patates.

Ne dit-on pas que les voyages forment la jeunesse.

Et ainsi, entre gens du voyage, la compréhension réciproque renaîtrait. Sous le feu des projecteurs et des soleils réunis de Sion et de la Promenade des Anglais.

Je le sens. Bronzés et culottés, les deux politiques approuveraient déjà cette suggestion impertinente; ils doivent hélas y renoncer. Il en va de l’indépendance nationale : imaginer des Français faire la loi à Massongex ou des Suisses fermer les bars niçois au petit matin, c’est une atteinte trop grande à la souveraineté.

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