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Billet de blog 10 mai 2013

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Hervé Falciani, héros cupide ou saint victorieux

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

En ce matin pluvieux, en ce printemps gris et maussade, je déambulai avec à l’esprit une question tortueuse. Soudain je tombai sur un éminent juge cantonal et lui demandai, oubliant de le saluer : « Connaissez-vous Hervé Falciani ? ». Il ignorait tout du destin de ce brave homme. Je le lui contai, lui rappelant qu’à L’1dex, contrairement à ce que vient de tweeter Thomas Burgener (@ThBurgener : « Il serait bien si I’ndex thématiserait les vrais problèmes du pays et du canton, et pas ceux de quelques gens qui y écrivent », on sait tout de même un peu thématiser l’important. Et, après qu’il eût brièvement saisi les enjeux, je me lançai en la forme interrogative : « Hervé Falciani, un héros cupide ou un saint victorieux ? ». La réponse fusa : « Et si ce n’était pas les deux ». Ou les quatre « tous ensemble » : héros, cupide, saint et victorieux.

La bataille juridique gagnée en Espagne par Hervé Falciani fait assurément de cet homme, sorti vivant de ce combat, un victorieux, célébré par exemple par la Rédaction de Mediapart (s’abonner à Mediapart, voilà, en ces temps troublés, un acte citoyen).

Saint, il l’est aussi devenu, dans son acception morale, car Hervé Falciani, au sein de l’Europe fiscale et transparente, est devenu vénérable et vénéré. On peut aussi dire, avec Le Robert, Dictionnaire historique de la langue française, que cet homme, qui travaillait en Suisse, a été rendu sacré et inviolable.

Le héros est un « homme de grande valeur », pouvant désigner un chef militaire, un homme digne de l’estime publique par son génie, sa force d’âme. On va admettre ici que l’acte de dépouiller informatiquement un établissement bancaire de la place genevoise autorise Hervé Falciani à soutenir qu’il a vécu une aventure extraordinaire. Il devient le personnage principal d’une saga qui aura certainement des suites littéraires ou cinématographiques.

Et puis que dire de l’être cupide ? Cupide est un dérivé de « cupere : désirer, avoir envie de ». On parle alors souvent d’un désir violent et sensuel. On a osé proposer un rapprochement avec le sanskrit « kùpyati » « il bouillonne » ou le vieux slave « kupitù ». Et puis le mot s’est évaporé pour renvoyer à un homme avide de richesses et d’argent.

Dans ce fatras d’interprétations portant sur l’acte posé il y a peu par Hervé Falciani, je peux aussi m’interroger. La décision de vouloir faire, par exemple, de son métier l’acte de rendre quotidiennement la justice, a-t-il été dicté pour ce juge par la volonté de recevoir mensuellement une juste rétribution ou par le désir de rendre vraiment au plus profond de son être la justice à ses concitoyens ?

Hervé Falciani n’est probablement ni un héros, ni un saint, ni un victorieux, ni un cupide. C’est un homme qui a choisi et qui sait aujourd’hui, au plus profond de son être, que tout vrai choix est sacrifice.

Post Scriptum : Si Thomas Burgener accepte l’invitation de L’1dex (à débattre une heure, enregisteur enclenché), qu’il se prépare à répondre à l’une ou l’autre question tortueuse sur le politique dominé par la finance

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