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Billet de blog 13 juin 2013

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Les Ricains de la BCVs

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’heure est grave en Helvétie. Pour les banques, pour les employés de banque dit-on aussi et, par effet de ricochet, pour tous les citoyens de ce pays d’Europe. L’heure est donc aussi grave pour les Valaisans, pour les guichetiers et les techniciennes de surfaces de la Place des Cèdres et pour la BCVs. On imagine donc que le quotidien cantonal, l’ami du peuple, aura enquêté sur la place financière cantonale. On peut imaginer Jean-Yves Gabbud ou Jean-François Fournier (je vous l’accorde, sur ce coup j’exagère !) poser à la direction de la BCVs une série sérieuse de questions impertinentes :

  • Quel était l’état des dépôts de clients américains à la BCVs au 31 décembre 2007 ?
  • A la fin 2010 ?
  • A ce jour ?
  • L’augmentation des dépôts à la BCVs émanant de clients américains après le 31 décembre 2008 a-t-elle sa source dans la venue de ces étrangers éconduits de l’UBS, du CS, de la Banque Cantonale de Zürich, de celle de Bâle-Ville ou de banques privées ?
  • Pour quels montants ?
  • Combien de clients étrangers, toutes nationalités confondues, sont devenus après le 31 décembre 2008 des résidents fiscaux valaisans ?
  • Combien y a-t-il parmi eux de bi-nationaux qui ont exigé de leurs conseillers bancaires de changer l’inscription de leur nationalité dans les registres de la banque ?
  • Combien de clients américains ont encore aujourd’hui des fonds déposés à la BCVs et pour quels montants ?

Ces questions ne sont pas des questions oiseuses ou foireuses. Ce sont des questions essentielles dès l’instant où la Banque Cantonale du Valais appartient à l’Etat, à vous, à moi, à tous. Ce sont des questions d’importance cantonale puisque l’Etat du Valais offre sa garantie et a nommé presque tous les administrateurs de la BCVs. Ce sont donc aussi des questions qui doivent malaxer l’esprit non seulement des remarquables journalistes d’investigation du NF et du Journal de Sierre, mais aussi de tous les députés du Haut, du Centre et du Bas.

Je le sais, ce beau monde a d’autres tâches essentielles, d’autres devoirs, d’autres ambitions. C’est la raison pour laquelle L’1dex a enquêté pour eux. Dans les carnotzets, dans les parkings, sur les trottoirs, au gré d’une balade en voiture sur la Rue des Amandiers, dans les halls bancaires, dans un bureau de notaire, dans un cabinet d’avocat, au téléphone, dans l’administration cantonale (et même, fortuitement, dans une boulangerie près de la gare, au comptoir, après l’achat de biscuits maison). Une enquête pointue, difficile, ardue et presque exaltante, qui s’est achevée ce soir dans un verger de Conthey lors d’une balade avec mon chien.

Les réponses ne seront pas évasives; elles seront définitives et claires, quoique retranscrites de telle manière qu’elles ne lèsent pas les sources qui ne doivent pas être reconnues (la préservation des sources, écrit Edwy Plenel dans « Le Droit de savoir », est un élément-clef de la transparence de l’information).

Alors ces investigations approfondies, citoyennes et intransparentes (sauf pour moi !) conduisent à un résultat stupéfiant, en quelque sorte étincelant et captivant : la BCVs n’est pas en mesure de répondre à ces questions. Non pas en raison du respect du secret bancaire; non pas par souci de discrétion du fait des âpres discussions au sein des commissions au Palais fédéral; non pas à la suite d’une promesse réciproque faite aux autres au sein du Groupement des banques cantonales; non pas par crainte des menaces américaines liées à un procès ultérieur; non pas à la suite d’une injonction formelle de la FINMA (qui donc en Suisse craint encore ces procureurs de pacotille; non pas par crainte de révélations prochaines de la CIA ou de Edward Snowden. Non, la raison est beaucoup plus simple : les dirigeants de la BCVs, les hauts cadres, les administreurs, les réviseurs externes, les auditeurs internes, les réceptionnistes et les caissiers ne le savent tout simplement pas. Ils l’ignorent. Pire ou mieux encore : ils ne peuvent pas le savoir. Car aucun instrument de pilotage de cet objet bancaire d’imtérêt mondial, â tout le moins cantonal, n’a été encore conçu dans ce but.

Dans le monde de la banque, contrairement à toutes les foutaises ressassées, n’est pas venu le temps de la transparence.

C’est définitivement peut-être le temps du noir d’ébène.

Post Scriptum I : le lecteur ne doit pas croire que cette ignorance de la BCVs n’est pas aussi celle de ses concurrentes. Peut-être est-ce là d’ailleurs que vient la certitude du Conseiller d’Etat vaudois Leuba selon laquelle la Banque cantonale vaudoise ne serait pas concernée par la Lex USA. Et pour cause personne n’a pu lui donner une information contraire.

Post Scriptum II : une surprise est née de cette enquête : les gestionnaires suisses de Hedge Funds suisses, voulant même oeuvrer aux USA, ne se sentent absolument pas concernés par cette Lex Americana.

Post Scriptum III : un regret : que les finances de L’1dex ne m’aient pas permis de m’envoler pour la Floride la semaine prochaine : l’aurais-je pu, un autre scoop valaisan eût immanquablement éclos. Aux lecteurs de soutenir L’1dex, peut-être.

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