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Billet de blog 17 juin 2014

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Dans un stade, la foule ne devient jamais peuple

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

(Par JACQUES KÜHNI)

Quand Pinochet prend le pouvoir, ses sbires transforment les stades en camps de détention et en scènes d’exécutions sommaires. On y écrase les doigts des musiciens et la tête des poètes. Là on peut dire que cette foule de maltraités appartenait au peuple.

Il arrive parfois qu’une clameur salue la beauté d’une action footballistique, cette clameur peut être considérée comme un cri du peuple puisqu’il vient du souffle commun des nôtres et des autres. Sur deux cent heures de match, on doit pouvoir trouver deux minutes de clameur. En étant optimiste.

Le foot est un sport populaire où les joueurs gagnent en une année le salaire de plusieurs siècles de labeur prolétaire. Le foot est un sport collectif où, dit-on, aucun génie ne peut s’exprimer sans le travail de l’équipe ; mais le mercato vend et achète des stars en solo, comme le capital abonde les nantis sur les cadavres des esclaves. Le foot remplit des stades gigantesques de trois sortes de gens, les pour nous, les contre nous et les flics, dont le travail est de limiter le massacre des uns par les autres.

Le foot a la réputation de fabriquer de l’appartenance, on y agite les drapeaux et les oriflammes de la nation. Au stade on acclame les nôtres sous nos couleurs, en oubliant que, trois mois plus tôt, on a décidé d’empêcher l’immigration de ceux qui nous font gagner. Le match est la quintessence de notre inconséquence politique et la trace de notre petitesse amnésique d’opportuniste.

Le foot fait croire aux pauvres qu’ils peuvent devenir millionnaires, et c’est une vérité statistique infinitésimale qui prend la vertu d’un miracle possible, à peu près aussi tangible que la vie éternelle.

Le stade prétend être le lieu d’un affrontement loyal, mais sa réalité est celle des trucages et des marchandages.

Les footballeurs se vendent et s’achètent comme des marchandises de luxe, mais, pour leurs anniversaires, on leur offre des femmes qui se vendent et s’achètent sur un marché voisin. Parce que le foot est absolument un marché de dupes. Joueurs et supporters sont au moins les dindons des publicitaires.

Ce jeu n’en vaut vraiment pas la chandelle.

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