Une proche amie m''a' offert en forme de gag un cadeau pour que je l'ouvre devant le sapin. Trop impatient, et très chanceux, j'ai décidé de ne pas attendre d'avoir savouré un chapon pour connaître ce qui devait me faire sourire.
Et c''est ainsi que me voilà avec en mains Le journal d'un prisonnier édité par Fayard et signé d'un nom peu inconnu et du prénom de mon frère disparu.
Ni une, ni deux, je me suis décidé, non pas à lire ce journal d'un condamné, très peu prisonnier, mais à tenter le sort d'une phrase surgie donc du hasard. Me voici donc à la page 55 avec cette interrogation : "Mon crime aujourd'hui serait-il de ne pas être de gauche ?". Cette question suffit à mon bonheur, je vais pouvoir disserter avec autant d'entrain que Nicolas a mis à créer son chef-d'oeuvre.
Avocat de profession, Sarkozy sait qu''être de gauche n'est pas inscrit dans les infractions du code pénal. Il sait aussi que ce syntagme affiché à droite n'est pas plus un délit pénal. On va lui pardonner cette confusion procédurale car il ne s'est jamais affiché comme un pénaliste averti. A l'exemple d'une certaine procureure dans le Bas-Valais confuse dans sa compréhension des éléments objectifs et subjectifs d'une simple infraction pénale accessible aux plus cancres, il a préféré agiter de l'air sachant que ses lecteurs étaient au moins aussi ignorants que son majordome dans le champ du droit pénal spécial.
S'il avait lu attentivement le jugement le condamnant ou s'il avait compris les multiples démonstrations de sa présumée innocence émanant de Fabrice Arfi de Mediapart, il aurait compris qu'un candidat à la présidence de la république n'avait guère été prudent, charitable euphémisme, d'envoyer ses proches camarades, signifiant de gauche !, négocier près de Kadhafi avec un terroriste condamné à perpétuité, recherché en France pour purger sa peine, qui voulait sans se confesser obtenir une absolution presque papale d'un prochain président de la république.
Imaginer ensuite que des magistrats voulant enquêter, analyser, comprendre, mettre en examen, accuser puis condamner ces fripons sans foi ni loi ne seraient qu'haineux à son égard relève d'un sens de la loi et de la morale qui annoncent un caractère peu frappé par le sceau de la sainteté.
Asséner même sous une forme imaginative qu'il aurait été poursuivi du fait de sa droiture relève d'une manipulation telle que l'on comprend comment cet asticot a pu berner un peuple entier et apparaître comme une victime d'un complot judiciaire dans lequel seraient impliquées des dizaines de magistrat.
"En prison, il n'y a rien à voir, ni à faire" énonce la quatrième de couverture à sa première phrase. Nicolas Sarkozy eût dû songer à penser à la hauteur de la fonction qui, s'il l'avait assumée, l'eût conduit à botter le cul à celui qui avait songé à accepter l'invitation du poseur de bombe. Le critique doté d'une imagination aussi défaillante que celle de l'auteur de ce best-seller pourrait conclure qu'il n'a pas songé à cette sanction car le créateur de ce désastre était peut-être simplement un ancien ministre oeuvrant à la Place Beauvau.
Appréciant le chiffre 7, par fausse bonne conscience, je me suis plongé vers la page 77 : "j'ai eu aussi la bonne surprise de découvrir que le monde des journalistes et des médias était moins frivole et cynique que je l'avais souvent pensé". Que voilà le signe d'un retour vers l'éthique puisque Nicolas reconnaît ainsi à l'insu de son plein gré de la vertu chez Fabrice Arfi, tout en faisant découvrir au lecteur scrupuleux que la frivolité et le cynisme rappelés renvoyaient par effet de projection à ses propres qualités passées aujourd''hui abandonnées par la grâce d'un court séjour en prison.
Cette découverte ultime m'a conduit à la dernière phrase : "A la Santé, j'ai recommencé ma vie". La prison a fait renaître Nicolas Sarkozy. Merci à elle.