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Billet de blog 26 juin 2013

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La finesse psychologique de la FIFA

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les Brésiliens sont dans la rue. Et devant leur poste TV. Et admirent simultanément les couleurs des trottoirs, les pas de danse des manifestants, les dribbles de Neymar et la joie des buteurs. Pauvres parmi les pauvres, ils se veulent aussi à travers les courses des joueurs et les mouvements du ballon riches parmi les riches. Comme le dit l’envoyé spécial du Monde, Benoît Hopquin (Le Monde du 25 juin 2013), ils sont « tiraillés entre amour du foot et écoeurement devant ses dérives financières ». Les Brésiliens sont donc nos frères.

La FIFA elle, par la bouche de l’ineffable Sepp Blatter, est moqueur et condescendant, méprisant et hautain : « Le football est plus fort que l’insatisfaction des gens… Cela va se calmer ». Il expose ainsi son désir : que le football dans les stades vive en paix et que les pauvres restent dans leurs favelas et n’importunent pas les supporters passionnés. La FIFA a même dévoilé au grand jour son amour de la démocratie à travers les lèvres de son secrétaire général Jérôme Valcke : « Un moindre niveau de démocratie est parfois préférable pour organiser une Coupe du Monde ». Dans une précédente vie, Sieur Valcke était pharaon; on lui doit les pyramides de Gizeh. Nul doute que ce brave fonctionnaire sportif est un grand ami de Poutine, qui saura mieux que Dilma Rousseff protéger les intérêts de la FIFA.

Ces ambivalences apparaissent aussi chez les footballeurs eux-mêmes. Rivaldo ose : « C’est une honte de dépenser tant d’argent pour cette Coupe du Monde et de laisser les hôpitaux et les écoles dans des conditions précaires ». Romario, député d’un parti de gauche, relève le « manque de respect et le manque de scrupules » de la FIFA. Ronaldo, membre du comité d’organisation, et qui n’a peur de rien, a fait encore plus fort dans l’indécence : « On ne fait pas une Coupe du Monde avec des hôpitaux ». Il a dû s’excuser.

11 milliards d’euros dépensés pour l’organisation de la Coupe du Monde 2014. Et un pays qui crie sa désapprobation face aux carences des dirigeants, à la corruption intense, à l’incapacité gouvernementale à améliorer la situation des petites gens.

Le Roi Pelé lui-même n’a pas craint de critiquer les manifestations. Lui aussi a dû apporter ses plus plates excuses.

Et les fans de football déjà espèrent que la finale de la Coupe des Condéférations opposera bientôt le Brésil à l’Espagne. Le pays de la pauvreté et de l’insécurité contre le pays des chômeurs (plus de 25 % de chômage, dont près de 50 % chez les jeunes).

Et bientôt @SeppBlatter sur Twitter se félicitera de la qualité du football présenté par les deux Barcelonais Xavi et Neymar.

Le champagne et le fric défiscalisé couleront à flots. Et Maracaña sourira à notre bienheureux Valaisan, ancienne star du ballon rond du FC Sierre qui, comme nous autres nantis, dormira au chaud et rêvera de ce qu’il aurait peut-être aimé être : un vrai numéro 10. On aurait tant aimé qu’il eût songé l’espace d’une seule nuit à distribuer les milliards du football aux écoliers de Rio de Janeiro ou aux étudiants de Sao Paulo.

Mais c’est promis, dans une prochaine vie, Sepp servira la jeunesse. Ou la lutte anti-corruption. Oui, dans une prochaine vie, mais on ne sait pas encore laquelle.

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