Stéphane ROUSSEL

Abonné·e de Mediapart

4 Billets

0 Édition

Billet de blog 22 juin 2021

Stéphane ROUSSEL

Abonné·e de Mediapart

Briller par son abstention

Lors du premier tour des élections départementales et régionales du 20 juin 2021, il semblerait que la classe politique, médiatique et partisane ait oublié d'appuyer sur le bouton de la participation. Les voilà donc devant en catastrophe se rattraper pour le second tour en martelant dessus. Quid de ces zinzins et du dispositif de commande ?

Stéphane ROUSSEL

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il est remarquable comment les uns et les autres disposent des événements et des personnes sur le papier. Ou comment par la parole, tout un petit monde, précisément minoritaire, exhortent quand ils ne commandent pas à aller voter. Au diable nos convictions ! Ces éditocrates de plateau ou de derrière-un-écran, nous soufflent le sens que doit revêtir notre bulletin. Et même une fois celui-ci déposé : politologues, sociologues, journalistes, politiciens professionnels, éditorialistes, blogueurs, tweeteurs, intellectuels, partisans... bref, tout un tas d'experts et de pseudo(-), sont disposés pour parler à la place des votants comme des abstentionnistes, au travers d'interprétations et d'analyses. Et pleurent autant qu'ils déplorent et s'indignent, de tant de non-participation. Ne pouvant comprendre que la réalité ne colle décidément pas à leurs désirs, et palabrant et chicanant à l'envie, dans l'entre-soi d'espaces de discussion privée à diffusion publique. En clair, comme pour le reste — et comme d'habitude — il ne faut pas s'attendre là non plus à avoir accès à la parole publique dans les médias d'information et à une narration recouvrant nos actes, quels qu'ils soient.

Les abstentionnistes concrétisant cette invisibilité, en font particulièrement l'expérience : en déjouant les attentes républicaines des classes dominantes voulant conserver le statut quo comme de ceux voulant jouer le jeu oligarchique, les malheureux sont vilipendés de toute part, à coup d'arguments rhétoriques et de propagande crasse ; avant de revenir dans l'ombre au profit de spéculations hippiques s'attelant à parler de pourcentages, sans plus évoquer ce qui l'instant d'avant devait servir de faire-valoir pour des représentants en quête de contrats courts. Et tant pis si tout cela ne doit plus avoir grand sens du fait de la proportion des abstentions ! L'enjeu consiste à continuer de dire quelque chose, à combler l'espace pour ne pas que s'entende le silence assourdissant de ceux qui si rarement peuvent parler à la première personne. Comme il en est de la nécessité de figurer un ordre que cette aristocratie soutient et incarne, étant dans l'incapacité de se penser.

Car comme de coutume, il n'y a pas de problèmes. Au mieux, y a-t-il des insuffisances et des parts de responsabilité. Où chacun se défausse, rejetant la faute sur un autre quand ce n'est pas pour promettre de mieux faire la fois suivante. Sans rien modifier, ou à la marge.
De l'art du cosmétique qui confine à la folie.
La source du problème leur pend pourtant au nez. Il leur suffirait juste de remonter la morve qui s'en écoule. Puis par l'entremise d'une glace, de voir leur reflet. Leur trombine. Le fond de leurs yeux. Et d'interroger cette croyance ou cette hypocrisie de se dire en démocratie et d'appliquer la démocratie. Pas en espérant que cela les change, mais pour qu'au moins tout ce petit monde, apparaisse pour ce qu'il est : soit un ensemble d'intermédiaires parasites, entre d'une part les habitants et d'autre part la vie de la cité. Pour que l'illusion enfin cesse.

Ne sous-estimez aucunement ni l'effet délétère ni la force de nuisance des mensonges.
Représentation n'est pas démocratie.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.