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Billet de blog 8 juillet 2024

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Pas de « grand chelem » en Ovalie

La « ville rose » fait encore front (républicain) face à la vague brune montant du Languedoc et du Roussillon, la droite écartelée entre Barèges et Pradié dans l'ex-région Midi-Pyrénées

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Illustration 1
A Toulouse, le nouveau front populaire a célébré sa remontada à la Bourse du Travail © Stéphane Thépot

La campagne toulousaine dégage un parfum de guerre d'Espagne. Retranchés derrière les remparts de la « ville rose », le nouveau Front Populaire a repoussé les assauts de l'ancien Front National, avec la Garonne en lieu et place de l'Ebre. Les phalanges de l'extrême droite se sont hissées pour la première fois au deuxième tour, en duel ou en triangulaires, dans les dix circonscriptions de la Haute-Garonne. Aucun candidat du parti de Bardella n'a toutefois réussi à percer jusqu'au Palais Bourbon sur ces terres historiquement ancrées "à gauche".

Le jeune patron local du RN devra se contenter de siéger à Strasbourg. Protégé de Louis Aliot, Julien Léonardelli s'est cassé les dents face au front républicain déployé par les « extrémistes » dénoncés par le maire (ex LR) de Toulouse Jean-Luc Moudenc. Dans le nord du département, la candidate LFI, la bien nommée Sylvie Espagnolle, n'a pas hésité à se sacrifier pour permettre la victoire du député sortant Jean-François Portarrieu. Ancien collaborateur de Pierre Cohen au Capitole passé avec armes et bagages dans le camp macroniste, cet ancien journaliste de La Dépêche du Midi qui siège dans la majorité municipale de Moudenc sauve une nouvelle fois sa peau de couleuvre, désormais « philippiste ». Quelles mues !

Au sud, l'ancien Gilet Jaune de la CGT Christophe Bex bénéficie d'une remontada quasi miraculeuse face à un ancien attaché parlementaire de Ciotti appuyé par un suppléant de la FNSEA qui siège à la chambre d'agriculture. Le "barrage" des urnes a suivi celui monté cet hiver sur l'A64 à Carbonne. Le député sortant LFI doit une fière chandelle à l'ex-député macroniste Elisabeth Toutut-Picard, qui a elle aussi suivi la «  stratégie des castors » dénoncée par Léonardelli en se désistant. Proche de Ruffin, le député insoumis a toutefois pris ses distances avec Mélenchon pour se concilier les supporters réunis de Delga et de Vincini dans l'ancien fief de Jospin.

Moudenc a voté pour « Madame Irma »

Les derniers fans de Méluche rêvaient à nouveau, comme en 2017, d'un « grand chelem » en Haute-Garonne. Ils sont dépités par la nouvelle défaite d'Agathe Roby, pour moins de 700 voix. « Mamie Borra », l'ex-député socialiste passée chez Macron a fini par jeter l'éponge face au risque du RN comme la sous-ministre Dominique Faure, mais Corinne Vignon est toujours là. Célèbre à l'insu de son plein gré pour ses dons de voyante, la dernière député sortante macroniste de Haute-Garonne bénéficiait du soutien du maire de Balma Vincent Terrail-Novès, patron du parti-croupion de Macron. Même Moudenc lui a donné sa voix. La double peine pour son ancienne « copine » sarkozyste du Capitole Laurence Arribagé, qui avait révélé au fisc les talents de cette « madame Irma » en guise de croche-pied.

Les cartes du second tour dévoilent surtout un regain de rose dans le rouge, avec désormais trois élus socialistes et une verte pour compléter le tableau.

Carayon dans le décor, un sénateur centriste dans un siège-baquet dans le Tarn

L'extrême droite fait aussi chou blanc dans le Tarn. Les opposants à l'A69 n'ont pas hésité à se mobiliser en faveur de Jean Terlier, pourtant dépeint comme « le député des labos Fabre ». Priorité absolue : barrer la route au fiston Carayon, qui se voyait déjà à l'Assemblée en Ferrari depuis qu'il a troqué le vieux moteur LR « à la papa » pour un nouveau bolide customisé par Ciotti et Bardella. Même le soutien de Céline Imart, descendue de son tracteur Bellamy dans la dernière ligne « à droite toute », n'a pas pu sauver le Fangio qui se voyait en Alain Prost de la droite nationale. Carayon junior est battu sur le fil pour 1405 voix.

L'unique député du RN « au pays de Jaurès » a même été stoppé par une panne sèche : renvoyé au garage (44%) par l'ancien maire centriste d'Albi. Philippe Bonnecarrère a fait le chemin inverse de son alter-égo de la montagne Philippe Folliot, quittant un fauteuil confortable au Sénat pour un siège-baquet à l'Assemblée.

Bons « béziers » de Montauban

Le seul motif de satisfaction pour les « anti gauchistes » primaires voyant un couteau entre les dents de chaque candidat se réclamant du petit père Léon (Blum, pas Trostki) est venu de la confluence du Tarn et de la Garonne. Brigitte Barèges, 71 ans, prend sa revanche sur la (trop?) sérieuse Valérie Rabault. La « banquière » du PS n'ira ni à Matignon, ni à Berçy dans les pas de DSK. La « Tatie flingueuse » de Montauban relève le flambeau perdu par Emmanuelle Ménard à Béziers. Avec la bénédiction de l'extrême-droite, la patronne des Républicains du Tarn-et-Garonne a pris sa revanche pour 2.000 voix sur sa défaite de 2012. Mais elle est distancée de 1.000 voix dans sa ville dont elle doit rendre les clés, cumul des mandats oblige. La dernière fois, c'était à cause des juges...

Brigitte Barèges, qui ferraillait jadis contre le socialiste Martin Malvy sous le drapeau sarkozyste dans l'ex-région Midi-Pyrénées, ne se retrouvera assurément pas sur les même bancs que le jeune Aurélien Pradié. L'ancien challenger LR de la présidente de région Occitanie a été reconduit confortablement au volant de sa 4L fétiche dans le très « radical » (socialiste) département du Lot. Le jeune loup de la droite a mené une campagne résolument chiraquienne dans son coin, sous l'étiquette de son propre micro-parti : « du courage ».

Prêt à faire front commun avec Delga et son « voisin » Hollande, de retour dans le département voisin, pour soutenir un gouvernement d'union (extra) régionale ? C'est de l'humour corrézien, comme aurait dit Chirac ! La palme dans ce registre revenant à Philippe Poutou. En dépit de défaite dans l'Aude, le soldat parachuté du NPA a promis de revenir à Carcassonne et s'est déclaré "toujours disponible" pour Matignon.

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