« Un rapport parlementaire à charge, vu la façon dont a été posé le problème", avait prédit Philippe Delorme, secrétaire général de l’Enseignement catholique, le 27 mars dernier. Évidemment, à charge, comment en aurait-il pu être autrement ? Nous sommes en France, et c'est bien auprès de l'éducation des générations futures que l'on devrait refuser en premier lieu des pratiques dignes d'une république bananière.
Sur le site Internet du Secrétariat général de l'enseignement catholique, son président, P. Delorme s’indigne face à ces constats de richesse mal acquise. Ses arguments sont détonnants : « C’est comme si rien ne marchait, que nous n'étions qu’une bande de truands qui nous en mettions plein les poches ! », « Alors que la Fondation Saint Matthieu est parfois montrée du doigt, elle donne 6 M€ par an aux écoles catholiques, ce qui est très peu relativement »... de toute évidence, on n'est pas au million près, dans l'enseignement catholique. Au point même que « le financement de l'enseignement privé sous-contrat n'est pas opaque. Il est transparent et on ne cache pas des donateurs milliardaires qui nous financeraient de façon occulte, loin de là ! ».
On croirait entendre Marie-Antoinette s'ébahir de son « Ils n'ont pas de pain ? Qu'ils mangent de la brioche ! ».
Une mise en abyme à faire avec un réseau sous contrat non confessionnel : les écoles Diwan. Le 12 février 2024, la Chambre régionale des comptes reprochait tout simplement au réseau de ne pas faire comme les Catholiques : « La Chambre régionale des comptes donne des pistes pour diversifier nos ressources, notamment en allant voir des acteurs économiques ». En échange de quelles malversations ?
Le système est opaque. Comme le déclinait l'article de Libération du 18 janvier dernier dans son titre « Comment l'argent public paye les magouilles de l'école privée », les OGEC (Organisme de Gestion de l'Enseignement Catholique) sont gangrénés d'individus siégeant dans les conseils municipaux, départementaux et régionaux, qui parviennent à obtenir des financements publics faramineux, pour « la rénovation de l'immobilier » mais à dire vrai, pas toujours avec une étiquette déterminée, sous mode de « dons à association ». Sans contrôles, jamais.
Dans le rapport, comme dans la presse ou encore par la Cour des Comptes en 2023, ça parle de milliards, le flou reste épais, contrairement aux propos de M Delorme « Je regrette que tous nos établissements ne soient pas contrôlés financièrement chaque année », ceux-ci publiant « un bilan comptable très précis, c'est assez simple de vérifier sans y passer des heures… ». Ils sont bien rares les collègues siégeant en CSE à avoir réussi à voir ces bilans comptables. Dans le primaire, il est même souvent maintenu secret par des présidents d'OGEC aux directeurs des écoles !
Non pas que ce financement soit forcément sale, mais son usage n'est pas toujours des plus nets. Dans le second degré, les salaires des directeurs ne sont pas rendus publics : ils sont renégociés chaque année, lors des « entretiens annuels obligatoires », jusqu'à atteindre des sommes bien au-delà des salaires de PERDIR (personnel de direction) du public, auxquels s'ajoutent des « primes de départ » quand ils changent d'établissement. Rien de public, avec cet argent de nos impôts.
Alors que le scandale « Stanislas » s'étalait dans les médias, M Delorme faisait le tour de France à jouer les pompiers auprès des chefs d'établissement. Pas plus inquiétés que ça, ça se congratule ce weekend d'avril 2024 au Puy du Fou, en congrès des 50 années du SYNADIC (syndicat de chefs d'établissement). Parce que ce que M. Delorme leur a promis à tous, c'est qu'il fallait laisser passer l'orage, et que tout reviendrait comme avant, puisque dans les faits, comment serait-ce possible de mettre en place l'ensemble des 55 propositions des députés Vannier et Weissberg, sous ce gouvernement ?
Que même à la lecture du rapport, c'est avec stupéfaction que le collectif a découvert que parmi les personnes auditionnées, l'un est chargé de la division de l'enseignement privé au rectorat de Rennes et est en fait un ancien d'une Direction Diocésaine ? Que les propos retenus dans le rapport affirment pour la Bretagne « ne pas constater de mise en œuvre partielle des programmes ou de dérives liées au caractère propre de l'établissement » sont un mensonge éhonté : les services de la DPEP de Rennes ont systématiquement refoulé les enseignants rapportant des messes, prières lors de l'hommage à Samuel Paty, dérives d'heures de cours, bénédictions de cartable, journées « temps fort » dédiées aux saints des écoles, journée « Ose » (prier) à Brest, cours de « culture religieuse » et professions de foi sur journées de cours.
Le système actuellement en place est intimement lié à l'église catholique, par un jeu de nominations par évêques dans quasi toutes les instances, jusqu'à la direction d'établissements du secondaire, jusqu'à même noyauter les services du rectorat et les inspections académiques. Il permet qu'aucun recours ne soit possible (l'illusion des recours est cruelle), la maltraitance des équipes en toute impunité, un détournement des moyens, une emprise extraordinaire sur les programmes scolaires nationaux et un dévoiement des valeurs républicaines.
Pourquoi ne pas tout simplement appliquer la loi de 1905 sur la séparation de l’Église et de l’État ?
Collectif StopSouffrancEC
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