Vous Savez Quoi ?
Billet éco-socialiste
La "semaine de la mobilité" est passée un peu inaperçue, c'est bien dommage car elle pourrait être l'occasion de débats citoyens. L'enjeu est fort car la mobilité fait partie des biens communs fondamentaux, une liberté de tout citoyen quand elle est choisie, une contrainte quand elle est imposée. Loin d'être égalitaire, elle est souvent longue et épuisante, et pourtant lourde financièrement.
En Île de France, les transports collectifs sont saturés, les voyageurs n'en peuvent plus de ces conditions qui, sur trop de lignes, se détériorent. A chaque rentrée, c'est l'épreuve, matin et soir : le train sera-t-il à l'heure, sera-t-il annulé, pourra-t-on y monter, sera-t-on encore debout pour voyager ?
La Région Île de France nous promet en 2013 un dézonage : pour les 6 zones, nous paierons le prix des zones 1 et 2. Une bonne chose ! Je n'ai jamais compris que, pour aller au travail ou à l'école, on doive encore payer : comment peut-on l'accepter ? Ainsi pour deux étudiants, par exemple, plus de 1330 euros pour aller à la FAC !
Dans mon village, une femme dit à son enfant : « N'oublie pas la carte de famille nombreuse, elle peut être demandée dans ton bus ». Le collégien, en cette rentrée a mille choses à penser et, un matin de la première semaine, contrôle dans le bus et pas de carte ! Une amende de 60 euros ! « Chef, nous le tenons ! » Encore un courrier de protestation à faire et peut être une entrevue avec le maire, la mère de famille est outrée : il y a de quoi !
Dans les rues d'Aubagne
Comme beaucoup, je crois que, dans l'élan de la défaite de Sarkozy, il faudrait une autre victoire à enjeu social et écologique, une avancée pour passer de la défensive à l'offensive. Celle-ci est partielle, plus locale que nationale, mais répond à une innovation politique, la gratuité des transports collectifs sur toute une communauté de communes autour d'Aubagne (1). Pour nous raconter cette aventure de nos temps modernes, un livre vient de sortir. Voyageurs sans ticket, LIBERTÉ– ÉGALITÉ – GRATUITÉ, de Magali Giovannangeli et Jean-Louis Sagot-Duvauroux. Une expérience concrète sociale-écologique, écrite à plusieurs mains. Avec toutes les questions : comment se dégager des contraintes financières que le marché veut imposer ? Comment batailler et gagner contre des idéologies qui formatent l'opinion ? On y lit que d'autres font aussi dans la gratuité (exemple : Transports en Moselle et Madon). Que la gratuité ne veut pas dire sans valeur. Qu'il faut bien nous armer et faire force politique face au "bon sens" libéral et à sa traduction dans les lois, dans les traités européens, dans les injonctions de l'OMC, de la Banque mondiale et du FMI, car rien ne doit échapper aux lois des marchés, seules habilitées à légitimer la valeur des êtres, des choses et l'activité humaine. La gratuité, c'est blasphémer contre leur "règle d'or" : la concurrence libre et non faussée !
Du lien, de la vie, du bonheur simple mais capital ! Et depuis le début (2009) une augmentation de 170 % de la fréquentation des bus, avec en préparation un tramway flambant neuf, lui aussi gratuit !
Gilles Monsillon, 5 octobre 2012
(1) Nous connaissons bien Aubagne, beaucoup de militants et d'élus s'y réclament de l'ACU, des Verts de gauche appartiennent à la majorité, la devise de la mairie : "Ce qui nous rapproche, nous mène loin".
(Tribune de Cerises n°154)