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Billet de blog 23 avril 2012

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Tout commence !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

(Cet édito et les articles qui suivent sont extraits du numéro spécial de Cerises du 23 avril 2012 à télécharger ici.)

D’abord, aucune voix ne doit manquer pour dégager Sarkozy, en votant François Hollande le 6 mai. Après le résultat de Jean-Luc Mélenchon - le meilleur depuis 30 ans à la gauche du Parti socialiste -, et les positions prises par le Front de gauche et ses composantes, il ne s’agira pas d’un chèque en blanc. 

Ensuite, rendez-vous pour les législatives : prolongeons la présidentielle en envoyant un nombre significatif de députés Front de gauche à l’Assemblée nationale. 

Ces élus auront pour mission non d’accompagner une politique social-libérale ou de faire à la place du peuple, mais de prolonger l’exigence populaire, portée par le Front de gauche et dans les luttes, d’une alternative sociale, écologique et démocratique.  

Dès à présent et après les élections, pour ouvrir une nouvelle étape du combat pour l’émancipation, l’enjeu est de faire durablement force politique commune, en transformant le Front de gauche en un espace politique durable pour tous ceux - forces et citoyens - qui veulent que ça change. A partir de ce qui a déjà été engagé, tout commence !


Mélenchon et le Front de gauche : 11,13 %!

  • François Hollande : 28,63 % - Sans enthousiasme...
  • Nicolas Sarkozy : 27,08 % - Carla, fais les valises !
  • Marine Le Pen : 18,01 % - CQFC (Ce Qu’il Faut Combattre)
  • François Bayrou : 9,11 % - 2017 : essaie encore !
  • Eva Joly : 2,28 % - Dany l’avait bien dit...
  • Nicolas Dupont Aignan : 1,8 % - L’autre petit Nicolas dans les choux
  • Philippe Poutou : 1,15 % - Au moins, il s’est bien marré.
  • Nathalie Arthaud : 0,57 % - Arlette, reviens !
  • Jacques Cheminade : 0,25 % - Reprends ta soucoupe volante !

Le 1er mai, on manifeste.

Le 6 mai, pour dégager Sarkozy, votons Hollande.
Aucun chèque en blanc.

Les 10 et 17 juin, rendez-vous aux législatives. 


 La percée du Front de gauche

Si bien des militants espéraient un résultat plus élevé du Front de gauche ce 22 avril, il faut remonter à 1981, lorsque Georges Marchais (PCF) avait obtenu 15,3 %, pour trouver un score à deux chiffres à la gauche du Parti socialiste à un scrutin présidentiel. La percée par rapport aux précédents scrutins présidentiels est générale, même si Jean-Luc Mélenchon obtient ses meilleurs résultats dans les villes où l’influence communiste reste forte. Près de 4 millions d’électeurs ont voté pour lui.

Le Front de gauche obtient plus de 15 % dans quatre départements (Hautes Pyrénées, Ariège, Alpes de Haute Provence et Seine-Saint-Denis) et moins de 10 % dans vingt autres. 

En Ile-de-France, il obtient 17 % en Seine-Saint-Denis (meilleur score national), 14 % dans le Val-de-Marne, 11,1 % à Paris et 10,4 % dans les Hauts-de-Seine. 

La campagne du Front de gauche aura marqué la période et semé pour l’avenir. Cependant, l’ampleur des scores du Front national relativise sa percée : il n’a pas réussi son pari de le devancer. Si le Front de gauche peut être fier d’avoir engagé un affrontement sans concession avec l’extrême droite, cette bataille-là aussi ne fait que commencer. 

Premières réactions

Jean-Luc MELENCHON : « Notre peuple paraît bien déterminé à tourner la page des années Sarkozy (...) le total des voix des droites recule par rapport à 2007. Le Front de gauche a eu raison de concentrer notre campagne sur l'analyse et la critique radicale des propositions de l'extrême droite, si nous ne l'avions pas fait peut-être le résultat de ce soir serait encore plus alarmant. Nous nous sommes sentis seuls à certains moments dans cette bataille, l'un imitait l'autre ignorait. Honte à ceux qui ont préféré nous tirer dessus plutôt que de nous aider. »

Pour le second tour, « il n'y a rien à négocier, notre engagement n'a besoin d'aucune autorisation ni d'aucune cajolerie, je vous appelle à vous mobiliser aux rendez-vous du 1er mai avec les syndicats et notre camp, notre famille politique, le monde du travail, je vous appelle à vous retrouver le 6 mai pour battre Sarkozy, sans traîner les pieds, à mobiliser comme s'il s'agissait de me faire gagner moi-même, ne demandez rien en échange ».

Fédération pour une alternative sociale et écologique (FASE) : « Nous sommes en train de changer la donne. 

Nous avons réalisé un pas décisif: avec la dynamique du Front de gauche, 11,5 % pour Jean-Luc Mélenchon et la force d’une campagne populaire. L'espoir est de retour, une force de gauche indépendante du PS et porteuse d’alternative s’affirme enfin ; elle peut et elle va se développer. ENSEMBLE, nous avons ainsi fait reculer la résignation.

Une partie des électeurs et des électrices sincèrement de gauche ont voté François Hollande, croyant être ”efficaces” pour éliminer le Président des riches…

Mais la campagne avec Jean-Luc Mélenchon a exprimé les exigences du véritable changement.

Elle porte les espoirs des luttes de 1995, 2003, 2008, de 2009, de 2010… Elle ouvre un nouvel horizon pour l’Europe en renouant avec le vote de 2005 contre le Traité constitutionnel européen.

La priorité : en finir avec le président des riches.

Il y a deux bulletins de vote : SARKOZY, DÉGAGE !

Pas une voix ne doit manquer le 6 mai, pour mettre fin au règne du Thatcher français.

Ce sont les mobilisations populaires qui compteront pour la suite. Il n’y aura pas de véritable changement sans affrontement avec la finance, les actionnaires et le grand patronat.

Dès le premier mai, mobilisons-nous !

Des manifestations sont organisées partout à l’appel des organisations syndicales.
Nous y porterons des exigences de rupture :

  • - Les mesures immédiates contre la misère : Smic à 1 700 €, relèvement des minimas sociaux, droit au logement et accès aux soins...,
  • - Arrêt de la chasse aux immigrés, aux sans-papiers, des poursuites contre les militants,
  • - Des services publics au plus proche des personnes ; des activités écologiquement durables,
  • - Le pouvoir au peuple : annulation des plans de licenciements, audit contre la dette,
  • - Instauration d'une véritable démocratie, de nouveaux droits sociaux et de l’égalité réelle,
  • - Retrait de l’OTAN, pour une politique de paix et de désarmement.
  • - Un Référendum, pour changer les Traités et pour un front européen contre les dirigeants libéraux de l’Europe actuelle, qui veulent imposer un carcan de misères !

Trois enjeux inséparables s’imposent aujourd’hui :

  • Votons le 6 mai pour en finir avec la droite et le sarkozisme, 
  • Renforçons la dynamique populaire du Front de gauche, 
  • Affirmons par nos mobilisations ce qui doit changer immédiatement et construisons un horizon commun pour battre vraiment l’extrême droite partout en Europe. »

Pierre LAURENT (PCF) : « Et maintenant, Sarkozy dehors ! Au nom du Parti communiste français, j'appelle au plus large et au plus fort rassemblement possible de toute la gauche, de tout notre peuple, pour battre Nicolas Sarkozy, en votant pour le candidat socialiste François Hollande. La défaite du président sortant devra être ample, claire et nette, et nous y mettrons toutes nos forces.

Le PCF, le Front de gauche, vont continuer à rassembler autour des choix qu'ils ont portés dans cette campagne. Nos propositions pour mener une audacieuse politique de gauche sont disponibles ; elles sont de nature à sortir le pays de la crise en tournant le dos à l'austérité et en reprenant le pouvoir aux forces de l'argent.

Le 6 mai prochain, la victoire de la gauche est à portée de main. Elle sera complète à l'issue des élections législatives avec la confirmation de la place du Front de gauche dans la nouvelle vie politique française. J'appelle les millions de citoyens qui ont commencé à l'emprunter avec nous à poursuivre la route, à investir le Front de gauche, les assemblées citoyennes, les fronts de luttes, de propositions et d'action que nous avons créés. Faites-en votre affaire, pour réussir le changement auquel notre peuple aspire. »

Et demain ? Construire une nouvelle gauche

D’abord, battre Sarkozy. Puis, poursuivre et amplifier la dynamique du Front de gauche lors des élections législatives. Il faudra ensuite choisir : participer à un gouvernement dominé par le Parti socialiste ou s’attacher à construire une nouvelle gauche ?

François Hollande a indiqué sans surprise, hier soir après l’annonce des premiers résultats, qu’il entend au second tour rassembler une majorité sur son programme. Rappelons qu’il avait expliqué pendant la campagne qu’une telle majorité pourrait aller «au-delà de la gauche ».

Quant à la position du Front de gauche, Jean-Luc Mélenchon l’a clairement exprimée : il faut dégager Sarkozy en utilisant le seul bulletin disponible pour cela. Entre temps, le candidat a appelé à faire du 1er mai une démonstration de force. Une nouvelle fois, la fête du travail devra associer les exigences sociales et la lutte contre le Front national.  

Pour la suite, tout le monde le sait : le Front de gauche et ses composantes n’entendent pas participer à un gouvernement qui mettrait en oeuvre une politique sociale-libérale. Et de décliner depuis des semaines des propositions qui formeraient une véritable rupture avec les politiques d’austérité: le retour de l’âge légal de la retraite à 60 ans pour tous, la décision de consulter les citoyens par référendum concernant le nouveau traité européen (que François Hollande parle de renégocier), la titularisation des 800000 précaires des trois fonctions publiques, la revalorisation subtantielle du SMIC et des minima sociaux (et non un "coup de pouce"), le lancement d’une Constituante en vue d’une VIème République... A cette heure, aucune de ces propositions n’est reprise par le candidat socialiste. 

De fait, d’ores et déjà se dessine le paysage de l’après scrutin de juin. Mais ne sautons pas les étapes : d’abord, les élections législtatives des 10 et 17 juin. L’enjeu est d’envoyer à l’Assemblée le plus grand nombre possible de députés Front de gauche, porteurs de la dynamique engagée. Non pas seulement des représentants d’un programme mais des passeurs, qui porteront au sein de l’hémicycle les exigences des luttes et des aspirations citoyennes. 

Une occasion historique

En cas de victoire de François Hollande, le Front de gauche et ses composantes devront ensuite décider s’ils participent ou non au gouvernement. De fait, la gauche d’alternative va se trouver devant l’occasion historique de construire une nouvelle gauche, loin des logiques habituelles depuis trente ans, où son affaiblissement et son intégration institutionnelle l’amenaient dans des logiques de dépendance, espérant toujours infléchir dans un sens plus social les politiques socialistes, sans en avoir les moyens faute de rapports de forces dans la société. 

L’option de la non participation du Front de gauche au gouvernement signerait une révolution à gauche : la prise d’autonomie de la gauche d’alternative par rapport à la gauche molle, impliquant l’invention de nouveaux types de rapports entre les forces politiques et avec les forces sociales ; la décision de s’atteler, au-delà des moments électoraux, au développement d’un mouvement d’idées et de conquêtes sociales, à la réhabilitation de l’idée d’émancipation et d’un projet de transformation de la société… Cela n’empêcherait nullement de soutenir au Parlement toutes les mesures positives, mais cela produirait un changement substantiel dans l’échelle des valeurs du combat politique : il deviendrait plus important de s’occuper du combat d’idées, de la production d’une cohérence politique alternative, du développement de l’appropriation citoyenne de la chose publique, que d’occuper des positions exécutives et des sièges ministériels.

Une avancée dans un champ qui nous est cher - celui du raccordement entre mouvement populaire et politique institutionnelle - pourrait ainsi se produire non pas à travers la participation gouvernementale de militants portants des exigences radicales, mais, dans un premier temps, par l’association sur le terrain des exigences sociales et politiques, sans perdre de vue la vocation majoritaire de ce combat. De ce point de vue, la campagne du Front de gauche a ouvert de nouvelles possibilités avec certaines organisations syndicales et associations.

Prendre de l’élan pour subvertir les institutions

Bref, nous pouvons entrer - et nous sommes peut-être déjà - dans les travaux pratiques souhaités par Lucien Sève, destinés à déplacer le curseur de la vie politique vers l’appropriation sociale : « Il s’agit en somme d’opérer un fondamental déplacement du centre de gravité de l’action communiste, en substituant carrément au primat de la politique institutionnelle celui de ce que j’appellerai la politique sociale - l’engagement au comptant de l’appropriation sociale par les salariés et citoyens associés ». Au passage, nous sommes surpris nous-mêmes que ces questions, que certains considéraient comme purement théoriques, soient maintenant en débat sur le registre concret d’un choix à faire d’ici quelques semaines.

S’agirait-il de rompre avec ce qui fait une caractéristique majeure du communisme français incarné par le PCF : la recherche d’une participation aux institutions utiles à la société, pour obtenir des droits nouveaux, des avancées sociales, mener des politiques publiques fortes, etc. ? A la fois : oui et non.

Oui, cela romprait avec un phénomène d’institutionnalisation qui a produit, sur fond d’affaissement électoral, de dépendance à l’égard du Parti socialiste, un pragmatisme aboutissant à devoir avaler d’énormes couleuvres voire à un certain opportunisme. Oui, cela romprait avec un certain automatisme de la participation à des exécutifs dès lors que "la gauche" est majoritaire.

Mais la réponse est non si on admet qu’il ne s’agit nullement de renoncer à exercer des responsabilités, mais de peser davantage dans la société pour transformer les institutions en même temps que les orientations politiques. Il s’agit de prendre de l’élan à l’extérieur des institutions pour réellement les subvertir.

N’en doutons pas : la stratégie et l’avenir du Front de gauche sur le long terme, ses formes, l’avenir de ses composantes... seront impactés par le résultat du second tour de la présidentielle, des élections législatives et par les débats et choix évoqués ici. Commençons par là pour que tout commence !

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