La composition et les premiers pas du gouvernement Ayrault envoient des signaux contradictoires. S’agit-il de ratisser large en vue des élections législatives ? Ou de tenter une improbable synthèse entre des lignes contradictoires ? Quoi qu’il en soit, de Manuel Valls à l’Intérieur à Christiane Taubira à la Justice, ou de Jérôme Cahuzac au Budget à Benoît Hamon à l’Économie sociale et solidaire, quelle cohérence ? Les équilibres promettent d’être difficiles à trouver !
Dès à présent, prenons date concernant l’avenir de l’Union européenne. Car, déjà, l’heure de vérité approche à propos de la règle d’or et du traité européen. Beaucoup de citoyens ont d’ores et déjà compris que lui ajouter un volet "croissance" ne serait pas rompre avec ce qu’Alexis Tsipras, leader grec de Syriza, nomme la « guerre » que « le Capital mène contre les forces du travail ». Si, comme l’écrit Francis Wurtz, il faut envisager « une refondation de la construction européenne autrement plus exigeante qu’un protocole additionnel au traité Merkozy ! », nous pouvons exprimer que François Hollande est déjà à des années lumières de l’intention de « dompter la finance ».
Mais alors, cela n’interroge-t-il pas sur l’emploi de l’expression banale « réussir à gauche » et de ses avatars déclinés dans la campagne des élections législatives ? Son défaut est d’annoncer aussi bien la possibilité d’une nouvelle gauche plurielle que, maladroitement, l’ambition du Front de gauche de bâtir à la fois une nouvelle gauche et une alternative politique.
De même, affirmer qu’un nombre important de députés du Front de gauche pourrait « garantir » la réussite de « la gauche » est une maladresse : on ne peut pas gommer l’expérience des années où le PCF, pourtant plus fort qu’aujourd’hui, n’a pas « garanti » l’existence de politiques de gauche.
Il existe une autre manière de formuler la nécessité d’un nombre le plus important possible de députés du Front de gauche, dans la continuité de ce qui a été semé et a mobilisé largement pendant la campagne de Jean-Luc Mélenchon. Il s’agit d’inscrire leurs candidatures et leurs mandats dans la construction d’une dynamique populaire durable, portée dans les têtes, dans la rue et dans les urnes par une nouvelle gauche. L’emploi tous azimuts de la référence à "la gauche" sert-il cet objectif ?
Construire dans la durée les fondamentaux d’une nouvelle gauche et une force politique, contester l’hégémonie du social-libéralisme à gauche, se donner un nombre le plus élevé possible de députés qui s’attèleront à être des élus partenaires des mouvements de la société… tout se tient !
* Gilles Alfonsi
Editorial de Cerises du 25 mai