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Billet de blog 30 novembre 2012

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Il y a parmi celles et ceux qui cherchent à changer la société une interrogation. Après le cuisant échec des tentatives de mettre en œuvre des théories, - je pense aussi bien au modèle soviétique qu’à tout autre "isme" -, la sagesse ne voudrait-elle pas que l'on s'en tienne à une succession de mesures en rupture avec le capitalisme, plutôt que de rêver à un grand soir ? Au fur et à mesure que l’on appliquerait de telles mesures, ne parleraient-elles pas d’elles-mêmes ? Ne vaut-il pas mieux être "concret" et s’en tenir à du pragmatisme ? D’ailleurs les mots "théorique" et "philosophique" ne sont-ils pas devenus synonymes de "hors de la réalité" ? Le problème est que ce type de raisonnement n’a pas empêché la crise de s’aggraver. À cause du rapport de forces ? Soit, mais on ne fait que déplacer le problème : ce raisonnement n’a pas fait bouger le rapport de forces.

Bachelard disait que le pragmatisme ne rapprochait pas du réel. On pense souvent être concret en partant de l’expérience comme si c’était d’elle qu’allait découler l’intelligence des phénomènes. L’expérience de l’exploitation ferait de la classe ouvrière automatiquement une classe révolutionnaire. Faux. Elle produit d’abord du conformisme. L’expérience dessine une normalité : si je suis DEMANDEUR d’emploi, je vérifie par la pratique combien ma vie dépend du bon vouloir de "l’offreur", l’employeur. Sans outils d’analyse, l’expérience me conforte dans un rapport de dépendance.


Profiter de la Sécu sans en tirer la philosophie qui la sous-tend,
l’a rendue vulnérable.

Il y a deux manières d’aborder la même idée. Soit on considère qu’elle se suffit à elle-même, n’entraîne aucune suite ni raisonnement. Elle n’est alors qu’une mode passagère ou, au mieux, elle finit amputée. La Sécurité sociale est construite sur la base d’une idée chère aux communistes : « de chacun selon ses capacités à chacun selon ses besoins ». Mais cette portée n’ayant pas été pensée, elle n’a eu aucun effet de contagion sur quoi que ce soit. Plus grave, de profiter de la Sécu sans en tirer la philosophie qui la sous-tend, l’a rendue vulnérable. On ne peut faire vivre une mesure qu’en l’inscrivant dans un principe. C’est ici qu’un travail théorique participe de la puissance des luttes immédiates.

Si les tenants du capital sont les seuls
à savoir porter un système social et économique,
la lutte est inégale.

Lorsque l’on nous dit que la survie de l’économie, de l’humanité suppose de renoncer à bien vivre pour équilibrer des comptes ou parce que les marchés sont incontournables et sont les plus forts, on nous impose une manière de penser et d’être. Dire NON est indispensable. Mais ne dire que NON ou ne faire que proposer la taxation du capital est aussi efficace que l’a été la ligne Maginot en 40. Je sais qu’après le lamentable échec du soviétisme, la "modernité" prône le refus de tout esprit de système. Mais si les tenants du capital sont les seuls à savoir porter un système social et économique, la lutte est inégale. On dit souvent qu’un but, une visée ne viendrait se greffer qu’en bout de course, au terme d’expériences concluantes. On confond alors processus et intention. Il n’y a pas de processus sans intention. Et l’intention vient au commencement, elle est le moyen de se guider pour élaborer des mesures en toute conscience. Même si elle est processus, on ne fait pas la Révolution par coïncidence.

Les mouvements, les luttes ont un besoin urgent de commencer à tracer non pas le détail, mais la charpente de ce qui pourrait faire fonctionner la société sur la base de "l’humain d’abord". L’expression est belle mais ne suffit pas.

Pierre Zarka, 23 novembre 2012

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