Liberté d’expression, oui bien sûr mais …
Qu’elle est belle cette levée en masse pour la défense de la liberté d’expression, pour manifester notre colère, notre fermeté, notre union devant l’innommable. La place de la République est bondée ce jour, noire de monde et c’est tant mieux. Il est important de se mobiliser devant cette horreur. Non, on ne muselle pas l’expression et je suis fort de cette communion. C’est dit !
Mais … ! Je me demande, en voyant cette foule, aujourd’hui, pourquoi notre communauté humaine ne s’élève pas de la même façon contre les banquiers qui ruinent la Grèce, contre les pétroliers qui attisent les tensions internationales, contre les multinationales qui affament le monde (« Quiconque meurt de faim meurt assassiné ! »), contre les marchands d’armes qui font s’entretuer des enfants, contre notre hyperconsommation qui tue la planète à petits feux, contre ces maîtres qui nous mènent comme des moutons à l’abattoir … Très bien de s’être levé pour défendre la liberté d’expression et pour clamer notre indignation devant cette horreur. Maintenant que nous sommes debout, continuons tous ces combats !
« Ceux qui ne participent pas à la bataille participent à la défaite ! » disait Brecht
Souvenez-vous de votre liberté d’expression du 29 mai 2005 ! Deux Présidents de la République et deux Parlements se sont, sans aucune vergogne, assis dessus. Et parmi les élus qui menaient la manifestation, ceints de leur belle écharpe tricolore ou non, lesquels ont respecté la parole du peuple ?
Cette liberté d’expression n’est rien sans la liberté de penser.
Et pour penser librement, l’information doit être multiple, objective et complète.
Et pour penser librement, l’instruction doit être vraiment gratuite, laïque et obligatoire.
Et pour penser librement, l’éducation populaire politique doit être permanente.
On ne pense pas librement quand la publicité nous matraque, quand les jeux vidéos nous addictent, quand les éditorialistes du Siècle nous gavent, quand la télévision, immense neuroleptique, nous abreuve de séries américaines. Face à la puissance médiatique, aux ordres de la finance, nous avons effectivement le droit de distribuer des tracts sur les marchés de France ! La belle affaire ! Les moutons ne pensent pas librement !
La dictature c’est « Ferme ta gueule », notre démocratie d’aujourd’hui c’est « Cause toujours ». Aujourd’hui, nous sommes debout, il nous faut maintenant marcher vers nos Utopies.