Le délitement de cette société ultra-consumériste a certainement confiné les gens dans l'isolement. Empêtrés dans les fils de la toile, via des "réseaux sociaux" qui leur font croire en un lien social, les humanoïdes (peut-on encore les appeler "humains"?) sont devenus des sortes de zombis. La haine de l'autre est leur carburant. Ils la cultivent sans jamais avoir le moindre sentiment de culpabilité. Le doute est proscrit de leur mode de pensée. L'autre est le mal, celui qu'il faut détruire.
Je ne m'étalerai pas sur ce sujet. Je note simplement que les pleurs, l'indignation et la compassion donnent à tous le sentiment d'être impuissant face à cette barbarie qui croît de jour en jour et aident à ne pas se sentir responsable.
La colère, ce sentiment que tous préfèrent honnir, je l'ai sentie monter en moi au fil des années et elle ne me fait pas peur. Cette colère que beaucoup ont préféré oublier, elle m'habite. Je ne veux pas l'étouffer; elle est nécessaire et m'aide à ne pas sombrer dans l'asthénie qui semble toucher bien des maillons de cette société.
Beaucoup d'entre nous, parce qu'elle est la manifestation outrancière d'un désir de "révolte", la confondent avec la haine. Pourtant, ces deux sentiments ne sont pas issus du même terreau. La haine se nourrit de l'ignorance et la colère de la conscience.
Se réapproprier sa colère sera sans doute le salut de l'humanité. Connue et apprivoisée elle nous protègera de nous-même. Elle a ses racines dans notre conscience et nous maintient en état de veille.
Cette colère à déjà sauvé l'Europe, il y a 70 ans. Aujourd'hui, elle sauvera le monde à condition qu'elle soit vraiment perçue comme un bien précieux.