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Billet de blog 16 mars 2020

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De la restriction de l'art (ou de son confinement)

L'époque est aux arts à ce que nous sommes pour le Pangolin

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

L’époque est à l’annulation des concerts, du théâtre, des expositions, du spectacle donc du vivant. Oui, l’autre n’est plus que le possible vecteur de la fin : nous ne sommes plus les uns des autres, nous ne sommes plus les uns avec les autres, nous sommes les uns contre les autres avec désormais distanciation de sécurité. Nous sommes ainsi les victimes d’un état des choses qui se désagrègent depuis quelques temps et sommes-nous si surpris ? 

Un mal universel s’abat sur l’entièreté du monde, un virus se propage et lui n’a pas suivi les réglementations des frontières. Un corona qui en moins de rien, nous vise tous et nous confine. Notre virus vient de Chine, du petit pangolin, un joli petit animal, qui serait le porteur du virus corona. Si vous cherchez le pangolin, vous le trouverez encore sur internet, il est fait d'écailles, il est le lien entre la chauve souris qui lui transmet le virus et nous.

Le pangolin, avec sa mignonne petite frimousse, est un met rare, qui se vend sur les marchés de Chine et ne pas oublier que cet animal est protégé, il est en effet menacé. Aujourd’hui, il semblerait que cela soit la ligne directe pour comprendre l’arrivée du Corona sur notre planète : de la chauve souris, au petit pangolin à nous.

Je me demande depuis quand, dans notre histoire, de petits animaux si beaux avec une si mignonne petite tête, puissent devenir l’ennemi des hommes et des femmes de notre époque ? Alors évidemment, il y eut le rat avec la peste : le rat d’ailleurs en a fait les frais, tout du moins sa réputation. Et, aujourd’hui, nous avons notre pangolin, et de là, à dire que si toutes nos existences sont bousculées, c’est à cause de lui, et des étales des marchés chinois, mais pas du peu de bien malgré tout que nous vouons à la nature, à la fragilité, à la fragilité du vivant, au vivant, au beau, au précieux, à la singularité, tout comme à l'exubérance, non ! Donc, du peu de cas que nous consacrons tous à l’urgence, à la déliquescence, aux dangers, d'une terre qui sature, qui se trouve là, à tourner et d'une terre qui se demande encore pourquoi ? 

Mais revenons, à notre départ, sans dire que le mignon pangolin, n’apprécie ni le théâtre, pas les concerts, ni les expositions, ni le vivant, car comment le vivant peut-il de lui même s’annihiler ? A moins : d'un corona dévastateur... 

Depuis quelques mois, je remarque qu’il devient de plus en plus ardu de monter des projets artistiques, actualités parfois obligent, cependant à ce rythme, comment allons nous faire pour nous rappeler que nous sommes aussi et surtout des êtres de culture, bien avant d'être des corps sociaux, ou fiscaux.

Comment ne pas penser ou croire, que c’est en agissant vers les femmes et des hommes disposés à mettre en oeuvre le beau, le vrai, à le révéler envers et contre tous, à s'engager donc, que nous réussirons peut-être à comprendre, non pas le pangolin, le mignon ne le désire peut-être pas, mais cette grande difficulté tout comme notre immense inertie en ce moment à appréhender les créations des hommes et des femmes qui tendent indéniablement, vers cet idéal : l'art comme ce bien, ce bon ou ce beau. 

Oui, depuis nombre de jours, nous sommes menacés et nous l’avions compris, sans tous nous l’avouer, car se le dire eusse été, ou serait accuser le petit pangolin.

Syrine KRICHEN

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