Pour mon premier billet, je vais parler du sujet tendance : Jean-Luc Mélenchon. Martyr ou dictateur ?
Je m’en fous. Royalement. En tant que fervent défenseur de l’Avenir en Commun, une seule chose m’intéresse : ce qu’il a fait, fait et fera pour ce programme et l’élan qui s’est construit autour. J'analyse sa contribution comme celle de n’importe quel défenseur de l'Avenir en Commun, même s’il joue un rôle tout à fait particulier.
Mais il me faut d’abord revenir sur mon histoire et ce qu’est, fondamentalement, la France Insoumise.
Je suis l’Avenir en Commun
Je suis très jeune politiquement, tant de manière générale qu’en ce qui concerne la France Insoumise. J’ai rejoint tardivement le camp Mélenchon lors de la présidentielle, non pas à cause de tergiversations mais bien parce que je ne me suis intéressé à la question que tardivement et, soyons clair, superficiellement. Très superficiellement. En fait, j’ai décidé de voter Mélenchon principalement sur une intuition. J’ai senti que quelque chose se passait, quelque chose d’exceptionnel, quelque chose à la hauteur des enjeux auxquels nous devons faire face. Du programme je ne connaissais que la 6e République et le soutien de nombreux organismes indépendants. Du candidat j’étais simplement convaincu que c’était le type de président que la situation réclamait - à défaut de correspondre à un certain idéal de président. Le résultat du premier tour de la présidentielle m’a convaincu qu’il était grand temps d’agir concrètement. Hop, direction la France Insoumise.
C’était il y a plus d’un mois déjà. Durant cette période, je me suis investi, à tous les niveaux et avec beaucoup d’énergie. Une bien belle aventure. Epuisante, mais qui m’a déjà beaucoup apporté. Il faut dire que le candidat France Insoumise dans ma circonscription est on-ne-peut-plus motivant : Olivier Tonneau, l’auteur de la célèbre « réponse aux pompiers pyromanes qui ont voté Macron ». J’ai eu la chance de le rencontrer, et cette demi-journée fut porteuse de nombreux enseignements. Aujourd’hui, je ne prétends pas être un spécialiste de l’Avenir en Commun. Qui peut l’être d’ailleurs ? Un tel travail, réalisé dans la sueur (et le sang ?) pendant des mois par tant de volontés, ne saurait être maitrisé dans son entièreté et dans sa profusion de détails par une seule personne. Par contre, je pense avoir acquis une maitrise correcte des principaux enjeux derrière l’Avenir en Commun, de la vision qu’il tente de concrétiser. Je me suis alors intéressé à la France Insoumise en elle-même. Son fonctionnement, ses valeurs, sa raison d’être.
J’avais intégré la notion de mouvement politique, par opposition à parti politique. Sans en comprendre l’essence. J’ai essayé de me forger une opinion claire sur les diverses polémiques entourant la France Insoumise (consigne de vote à la présidentielle, alliances pour les législatives…). Sans pour autant y parvenir. Parfois je me suis demandé si des erreurs avaient été commises. Il m’aura fallu une nième discussion sur ces sujets pour enfin comprendre : l’Avenir en Commun EST la France Insoumise. Ce programme est ce qui me définit en tant qu’Insoumis, et rien d’autre. Sans l’Avenir en Commun et la vision qu’il porte, la France Insoumise n’existe pas. J’en viens même à m’interroger sur la pertinence du terme « France Insoumise », ou de tout autre terme ne faisant pas une référence directe et explicite à « L’Avenir en Commun ». Quoi qu’il en soit, tout s’explique à la lumière de cette révélation. Impossible de passer des accords qui transigeraient avec le programme. Impossible de donner une consigne de vote comme un vulgaire parti politique et son hyper verticalité.
Revenons-en alors au sujet de ce billet : Jean-Luc Mélenchon. Car c’est bien grâce à lui si nous en sommes là aujourd’hui.
Merci Patron !
Avant d’être un orateur hors-pair, Jean-Luc Mélenchon est un visionnaire. Il a senti très tôt la dérive libérale du PS, puis la faillite programmée des accords d’appareils incarnés par le Front de Gauche. Il a imaginé la forme que devrait prendre un véritable mouvement de gauche uni pour réémerger des cendres du quinquennat Hollande, qui allait devenir la France Insoumise. Il a parfaitement compris le rôle des médias traditionnels et su identifier le potentiel des nouveaux médias. Sa stratégie de communication, mise en place lors de son départ du PS, en est l’exemple éclatant :
1) Créer le buzz pour attirer l’attention des médias, en créant un personnage de révolté grande-gueule. Qui, soit dit en passant, colle particulièrement bien à l’acteur qui l’incarne.
2) Désamorcer le piège de la caricature, en mettant les journalistes face à leurs contradictions et leurs implicites. Principalement, exposer au grand jour la dérive invisible de la société et de ses normes vers la droite. Avec pour objectif d’instiller le doute chez les auditeurs.
3) Proposer à ces auditeurs dans le doute des espaces alternatifs d’information. On retrouve alors toute la galaxie de sites et autres blogs ainsi que l’utilisation des réseaux sociaux.
Ou comment faire exister une vision de société sans le soutien d’un appareil classique de parti politique. Ses talents d’orateur n’ont été qu’un moyen de porter cette vision à bout de bras comme peu auraient pu le faire.
On peut reprocher beaucoup de choses à Jean-Luc Mélenchon. Sa personnalité peut déplaire. Comme toute ascension – surtout dans la sphère politique, le processus fit des dégâts. Car cette ascension nécessite une détermination à même de détruire les obstacles empêchant la réalisation de la vision qu’elle porte. Mais posez-vous la question suivante : dans quel état serait la Gauche sans lui ? Ou même la France, en se rappelant par exemple que le Front National a été largement mis sur le reculoir par la France Insoumise ? Quand je vois leur état aujourd’hui, je préfère ne pas y penser.
La France Insoumise et l’Avenir en Commun sont deux magnifiques cadeaux faits à tous les citoyens Français, qu’ils en soient conscients ou non. Au minimum pour le vent de fraicheur qu’ils font souffler sur le monde politique. S’ils sont l’œuvre de nombreuses personnes, il y en a une sans laquelle ils n’auraient jamais existé.
Merci Jean-Luc. Sincèrement, profondément, merci. Ah au fait : tes valises sont là, dans le couloir.
Licenciement abusif ?
Je vais me répéter : je ne suis pas intéressé par les polémiques. Connaitre les mensurations de l’ego de Mélenchon me semble amusant, au mieux. Et assurément inutile. A mon sens, le vrai problème se situe dans la contradiction découlant de la stratégie de communication de la France Insoumise. Nous nous targuons de faire souffler le renouveau, de prouver la puissance de l’horizontalité, et d’avoir un programme comme porte-étendard. Et à côté de ça, on voit Mélenchon partout. L’affiche des candidats France Insoumise dans ma circonscription en est une caricature : sa photo et son nom sont largement plus visibles que tout, le programme comme les candidats. Quelles réactions cela peut-il bien déclencher ? Ne donnons-nous pas le bâton pour se faire battre ? Comment ne pas voir dans tout ceci les réminiscences d'une structure monarchique dont nous ne voulons justement plus ? Le problème se poserait dans des termes similaires si nous avions une autre personne en tête d’affiche. Même s’il me semble difficile de nier le caractère particulièrement clivant de Mélenchon, qui joue comme un catalyseur de cette contradiction.
Ceci étant dit, cette stratégie est compréhensible et ne doit souffrir d’aucun regret. Après tout, elle nous permet d’en être là, aujourd’hui, avec ce mouvement, ce programme et cet élan. De plus, il me semble totalement illusoire de croire qu’elle aurait pu être modifiée plus tôt. Ses effets positifs se sont encore faits sentir dans les derniers jours avant la présidentielle et les législatives arrivaient trop rapidement pour espérer pouvoir changer quoi que ce soit. Enfin, rien ne peut justifier la violence des attaques subies par Mélenchon et France Insoumise ces derniers mois. Pas même le fait d’y prêter le flanc.
Oui, mais voilà. Arrivera un moment où cette stratégie et la personne qui la porte feront plus de mal que de bien au mouvement. S’il me parait compliqué de déterminer quand cette bascule va s’opérer, une chose est certaine : elle va finir par s’opérer. Nécessairement, étant donnée la contradiction évoquée plus haut. Peut-être même qu’elle est déjà là. Il faut donc s’y préparer, au mieux et au plus tôt. Mais que faire ? Comment garantir l’exposition médiatique dont le mouvement a besoin et renforcer l’élan autour du programme tout en évitant ces écueils ?
Il me parait évident que chaque Insoumis a son rôle à jouer. Chacun doit être le porteur de cet élan, par les moyens qui lui conviennent le mieux. Pour moi, c’est par le biais de ce blog. Pour d’autres, des vidéos. Pour d’autres encore, des actions de terrain. Chacun doit trouver sa place. Nous sommes tous les moteurs de ce mouvement. Maintenant, c'est clairement insuffisant. Et je n’ai pas la prétention d’arriver avec des solutions clé en main, mais seulement celle de poser la problématique pour lancer la discussion, le débat.
Car la question n’est pas de savoir si la France Insoumise peut survivre sans Mélenchon. Elle le doit. Elle le doit non pas parce qu’il ne pourra ou ne voudra probablement plus mener ce combat dans un futur proche, mais parce que l’évolution du mouvement passe nécessairement par un affranchissement significatif du culte de la personne au profit du culte du programme. Pour muter en quelque chose d’encore plus grand, fort et porteur d’espoir qu’elle ne l’est déjà.
Malgré les multiples nuages noirs au-dessus de nos têtes, les Jours Heureux sont devant nous.
PS : la décision de publier ce billet avant le premier tour des législatives est mûrement réfléchie, voulue et assumée. Le publier plus tard aurait prêté le flanc aux critiques type ingratitude ou recherche de bouc émissaire (en fonction du résultat). Ce débat me semble suffisamment crucial pour éviter, dans la mesure du possible, tout élément qui pourrait le faire tourner court.