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Toujours tenter, derrière les symptômes, d'identifier la maladie ; derrière les faux-semblants, la réalité (Louis Pasteur).

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Billet de blog 5 novembre 2015

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Deux syndics escrocs interpellés.

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(Résidence Douce France - 3, allées des Marguerites - Tignes - Savoie       5 Novembre 2015)

            Descente de police, ce matin très tôt, à la Résidence Douce France à Tignes, canton de Bourg-Saint-Maurice, département de la Savoie, dans le Massif de la Vanoise.

 (Tignes. À l'origine, petit village de montagne vivant de son agriculture, Tignes fut détruit et englouti sous les eaux à la suite de la construction du barrage du Chevril, mis en eau en 1952. Tignes devenait dans les décennies suivantes une station de ski internationalement réputée, couplée avec celle de Val-d'Isère. Elle accueillit les épreuves de ski acrobatique lors des Jeux Olympiques d'Hiver d'Albertville en 1992. On y garde encore le souvenir vivace de l'engloutissement sous les eaux du barrage de l'antique petit village alpin, en 1952.)

           Vous en ai-je assez dit sur cette petite commune française ? En tous les cas, suffisamment pour éclairer le fil de notre propos. Il s'agira de barrages hydro-électriques.

   Descente de police donc, au petit matin, à la Résidence Douce France. Motif, reconnaissance et perquisitions sur place, après l'interpellation, la veille, des deux co-syndics de la résidence, pourtant tout à fait régulièrement pressentis et recrutés en 2012 par l'assemblée générale des copropriétaires, pour succéder au cabinet de syndic précédent, fortement soupçonné celui-là, à cette époque, de prévarication et autres malversations aux dépens de la copropriété. La justice était alors saisie, mais vous en connaissez les lenteurs, les longueurs et la langueur, pour tout dire le manque d'énergie. Rien n'est encore jugé au bout de trois ans !

          Revenons à nos deux co-syndics actuels dont l'interpellation s'est faite hier sans grande difficulté : le premier, surpris au moment de l'heure du thé chez Lucette, une vieille amie dont il avait fait la connaissance le matin même, la tasse encore à la main ; probable mise en scène, nous ont confié les inspecteurs ; le second, à la sortie d'un brainstorming (en bon français, remue-méninges), en compagnie de jeunes gens se destinant à la carrière, celle justement de syndic, auxquels il indiquait l'impérative nécessité de refuser la présence délibérative des locataires étrangers lors des assemblées générales de copropriétaires. Position abrupte et, beaucoup l'ont souligné, tout à fait contraire aux courtoises habitudes de beaucoup d'assemblées générales où les locataires, ils habitent ici, pourquoi ne pourraient-ils pas s'exprimer, sont d'ordinaire bienveillemment accueillis.

   Mais enfin, restons en là, car tel n'était pas le motif de l'interpellation.

   Il est beaucoup plus grave ! La vente clandestine par les deux escrocs, à la découpe, de tous les communs de la copropriété, nous voulons dire, terrasses (où l'on venait d'installer un héliport pour les évacuations d'urgence), cages d'escalier, accès piétonniers et roulants, parkings jusqu'aux installations ascensoristes, le tout sans avoir jamais sollicité, en assemblée générale, le moindre avis des copropriétaires.

   Déjà infraction grave au règlement de copropriété ! Mais, la police le soupçonne, l'instruction judiciaire le dira, infraction en relation avec des réseaux affairistes, nous voudrions mieux dire affairés à l'acquisition à bas prix de toutes infrastructures immobilières dont ils attendent de la mise en concession de fructueux dividendes.

          Vous connaissez, chers amis, notre goût de la parabole et vous vous serez probablement reconnus parmi ces copropriétaires floués, abusés, que dis-je, spoliés. Pour certains d'entre vous, tenant leur petit appartement d'un héritage familial, pour les autres fruits d'une longue épargne complétée d'un recours à l'emprunt dont souvent les échéances continuent à courir. Tous, en tous les cas, propriétaires par leur travail ou celui de leurs ascendants, propriétaire des communs, allées jardinières, parkings, cages d'ascenseur, aires de jeux et bacs à sable pour enfants, vasques à poissons rouges, terrasses et leurs installations de télécommunications, dont vous apprenez maintenant votre illégale dépossession.

   Vous avez quelques principes, et ils sont tout à fait justifiés, parmi eux celui de qualifier escroquerie toute cession du patrimoine de la copropriété à quelque attributaire que ce soit, sans l'autorisation expresse des copropriétaires eux-mêmes, régulièrement et dûment exprimée en assemblée générale. C'est la moindre des choses.

   Qu'apprenons-nous ? Une promesse du syndic précédent, en 2010, celle de privatiser les barrages et installations hydroélectriques, à Tignes, une telle évocation met immédiatement en alerte la population locale, cette promesse serait en passe d'être honorée par nos deux syndics actuels. Fourguée dans un petit alinéa, auxquel personne n'avait prêté attention en raison de son anodine présentation, lors d'une récente réunion du bureau syndical, alinéa dit de « transition énergétique », la disposition prévoit que la France, la seule dans l'UE, serait sur le point d'ouvrir ses barrages hydrauliques à la concurrence.

   Ouvrages stratégiques, le deuxième parc en Europe, emblèmes de l'indépendance énergétique et du développement durable, conçus et réalisés grâce au génie et au travail des générations précédentes, ouvriers et ingénieurs, attribués en concession gratuite à EDF, essentiels pour la sûreté du parc nucléaire français, bâtis au bord de l'eau, car ce sont eux qui fournissent l'eau nécessaire au refroidissement des centrales.

   De plus, construits pour la plupart d'entre eux au lendemain de 1945 et donc totalement amortis depuis, ils permettent de produire une énergie renouvelable la moins chère du mix énergétique. Et, c'est loin d'être négligeable, rentables, dégageant un bénéfice annuel de 1,25 milliards d'euros.

   De tels résultats suscitent bien des convoitises et les géants énergéticiens privés allemands, suédois ou suisses veulent avoir accès à ce pactole. Quand on apprend que c'est le Ministre des Finances de 2013, Pierre Moscovici, aujourd'hui Commissaire européen aux Affaires Économiques et Financières, qui avait proposé la privatisation des concessions hydroélectriques, on comprend que rien n'arrêtera les forcenés socio-libéraux dans leurs prosternations aux pieds de la Concurrence Libre et non Faussée.

           Un copropriétaire vient, de toute urgence, de faire inscrire à l'ordre du jour de la prochaine Assemblée Générale, ce sera mis en délibéré et tranché par le vote, la révocation immédiate des deux co-syndics et la proposition d'une plainte au pénal. Affaire à suivre.

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