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Toujours tenter, derrière les symptômes, d'identifier la maladie ; derrière les faux-semblants, la réalité (Louis Pasteur).

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Billet de blog 10 janvier 2016

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Vingt ans après.

L'essayiste Mathieu Lindon pose la question : « François Hollande a la double nationalité. De gauche et de droite. Conservera-t-il les deux sans déchoir ?

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( Cimetière de Jarnac - Charente     8 Janvier 2016)

           Non, chers lecteurs, ce n'est pas au roman, Vingt Après, qu'Alexandre Dumas donna comme suite aux Trois Mousquetaires, et aux aventures du Vicomte de Bragelonne, le fils d'Athos, que je vous convie aujourd'hui. Les vingt ans dont je vous parlerai ne sont pas, non plus, ceux que nous n'avons plus, mais ceux qui se sont écoulés depuis le 8 Janvier 1996.

   Nous sommes aujourd'hui au cimetière de Jarnac. L'expression est maintenant en usage depuis presque cinq siècles. Un « coup de Jarnac » désigne un coup de bretteur ou de reître, habile et imprévu. L'expression a pris au fil du temps une connotation de coup déloyal, ce qui, nous allons vous le rapporter, ne le justifiait en rien à l'origine.

           Guy de Chabot de Saint-Gelais, second baron de Jarnac, marié en 1540 à Louise de Pisseleu, sœur de la duchesse d'Etampes, maîtresse de François Ier, se jugeant offensé par des propos répandus quant aux relations qu'il entretenait avec sa belle-mère, Madeleine de Puyguyon, seconde épouse de son père, en voulut réparation sur le champ et sur le pré.

   Le véritable offenseur était le Dauphin, le fils du Roi, et il n'était pas pensable, à ce titre, de le provoquer en duel. François de Vivonne, seigneur de La Châtaigneraie, redoutable bretteur, se dévoua pour se reconnaître l'auteur de l'offense et relever le gant de l'offensé.

  Le duel eut lieu, en présence du Roi, le 10 Juillet 1547 dans le pré du château de Saint-Germain-en-Laye. L'avisé Guy Chabot sachant quel fin sabreur il allait affronter, avait pris soin dans les jours précédents d'entendre la leçon d'un spadassin italien qui lui enseigna un coup de revers inconnu jusque-là.

   Et bien lui en prit ! Car après quelques échanges bien parés de part et d'autre, François de Vivonne de La Châtaigneraie, ayant porté la jambe droite un peu trop en avant, Guy Chabot, baron de Jarnac, il entrait à la postérité, se fendit rapidement et d'un revers prestement porté lui trancha le jarret.

 (Jarret : partie du membre située derrière l'articulation du genou. Les anatomistes la nomme région poplitée, région postérieure du genou bordée médialement et latéralement par les tendons ischio-jambiers. Leur section est irrémédiablement suivie de la chute du combattant. Si de plus, l'artère poplitée est sectionnée, l'hémorragie est à coup sûr fatale en quelques minutes. Ce ne fut pas le cas.)

   François de Vivonne, emporté grièvement blessé hors du pré pour y être pansé, mourut quelques jours plus tard, tant de la blessure du fer que de celle de l'humiliation : avoir été vaincu en présence du Roi.

   Le coup de Jarnac, coup jugé au départ habile et dans les règles de l'honneur au combat, a vu sa formulation prendre depuis un sens odieux, jusqu'au mot de jarnac se disant d'un poignard caché et que l'on sort au dernier moment. L'événement d'aujourd'hui ne viendra pas, chers lecteurs, c'est certain, corriger cette mauvaise réputation. 

           Il semblerait bien qu'en cette journée du 8 Janvier, sombre 20e anniversaire de la mort d'un ancien Président, avec cette toujours grande affection / affliction que nous lui connaissons bien, celle de fréquenter l'air grave les cimetières, François Hollande soit venu se recueillir sur la tombe de son lointain maître et prédécesseur pour simplement lui demander, secrètement et à mi-voix, si du maître spadassin il avait bien retenu la leçon : pour être réélu, porter le coup de Jarnac, plus qu'au socialisme, à la Gauche en général.

   Dans un pays où, de par sa politique depuis 4 ans, la Droite, sous ses multiples visages, est redevenue majoritaire, il conviendra, avait enseigné le spadassin, de la morceler, de la disloquer, de lui prendre ses habits et son discours, y compris le plus extrême. Ce qui fut fait. Après les vibrantes déclarations d'amour à Entreprise - quelle délicieuse amante se cache derrière ce joli prénom, à vous de le deviner - vint le lascif projet de déchéance de nationalité - à quelle attention cette morbide danse du ventre ? il n'est point besoin de deviner - la boucle était bouclée.

           Celui dont on commémore aujourd'hui la disparition aurait prononcé quelque temps avant l'échéance fatale l'énigmatique formule : « Je crois aux forces de l'esprit, je ne vous quitterai pas ! »

   En écho, 20 ans plus tard, il nous a semblé entendre, malgré le crissement des semelles sur le sol gravillonné devant la tombe, le Président d'aujourd'hui murmurer : « Je crois aux forces de l'arnaque, je ne vous quitterai pas ». Arnaque à Jarnac ? Je ne vous quitterai pas ? A quoi pensait-il ? A sa réélection. 

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