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Toujours tenter, derrière les symptômes, d'identifier la maladie ; derrière les faux-semblants, la réalité (Louis Pasteur).

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Billet de blog 11 octobre 2017

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Toujours tenter, derrière les symptômes, d'identifier la maladie ; derrière les faux-semblants, la réalité (Louis Pasteur).

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Le mystère de la chute de la tartine beurrée

C'est une mésaventure récurrente au petit déjeuner…

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(Ministère des Finances - 139, rue de Bercy - Paris 12°         11 Octobre 2017)

                               

Illustration 1

          C'est une mésaventure récurrente au petit déjeuner. Elle vous est probablement déjà survenue devant votre tasse de café noir ou votre bol d'Ovomaltine. Lorsqu'une tartine tombe de la table, elle atterrit toujours du côté beurré.

  N'en croyez rien… Il n'y a là rien d'une malédiction. Tout cela ressort simplement des lois générales de l'économie, de celles qui indiquent aussi qu'il pleut toujours où c'est mouillé.

  Déjà, Anatole France, dans L'Orme du Mail, en 1897, prêtait à M. Bergeret ces propos à l'Abbé Lantaigne : « Je vais vous dire une grande vérité. Tant que l'État se contente des ressources que lui fournissent les pauvres, tant qu'il a assez des subsides que lui assurent, avec une régularité mécanique, ceux qui travaillent de leurs mains, l'État vit heureux, tranquille, honoré. Les économistes et les financiers se plaisent à reconnaître sa probité. Mais dès que ce malheureux État, pressé par le besoin, fait mine de demander de l'argent à ceux qui en ont, et de tirer des riches quelque faible contribution, on lui fait sentir qu'il commet un odieux attentat, viole tous les droits, manque de respect à la chose sacrée, détruit le commerce et l'industrie, écrase les pauvres en touchant aux riches. On ne lui cache pas qu'il se déshonore et il tombe dans le mépris sincère des bons citoyens. Nos ministres se moquent de nous en parlant de péril socialiste. Il n'y a qu'un péril, le péril financier. »

  « Mais dans quel monde Vuitton ? » s'exclamait un autre. Il n'était pas SDF, simplement ISF.

                   

Illustration 2

          Vous aurez reconnu là Bernard Arnault, propriétaire par la grâce de Dieu de LVMH, lui aussi adepte de « il pleut toujours où c'est mouillé » et jamais déconcerté par le côté où atterrit la tartine beurrée : toujours le même !

          Nous voulions chers amis, suite à ce petit préambule imagé, vous parlez de ce qui vous attend les prochains mois et tout particulièrement à partir du 1er Janvier, une fois terminées les embrassades et échangés les vœux de bonne année. L'application de la Loi de Budget 2018 et de ses deux mesures phares : l'augmentation de la CSG, compensatrice du miraculeux réaménagement de l'ISF.

  L'ONG Oxfam viens de le révéler : la réforme de l'ISF permettra aux 1 % les plus riches en France, d'économiser 3,6 milliards d'euros, dont 532 millions pour le seul Bernard Arnault, première fortune de France et ami et soutien fidèle du Président Emmanuel Macron.

(La confédération internationale Oxfam, de Oxford Committee for Relief Famine, est une organisation fondée en Grande-Bretagne en 1942 et faisant campagne pour mettre fin aux règles commerciales inéquitables et exiger de meilleurs services de santé et d'éducation.)

               

Illustration 3

  L'année 2018 devrait rester à jamais dans la liturgie néolibérale française comme celle du « Miracle des Yachts ». Yachts, diamants, œuvres d'art, chevaux de course et voitures de luxe n'entreront plus dans le calcul du patrimoine.

  Le manque-à-gagner pour les recettes fiscales de l'État devrait être aisément comblé par la diminution des dotations de fonctionnement aux collectivités locales, par les suppressions de postes dans la fonction publique, par la diminution des APL et surtout, par l'augmentation de la CSG. Il semblerait que les propos de M. Bergeret à l'Abbé Lantaigne aient été entendus.

          Bien sûr, nos économistes néoclassiques n'avancent pas pour justifier de telles mesures la stricte observance des recommandations de M. Bergeret. Ce sont des hommes de science. Et, en scientifiques, ils ne font là que se fonder sur les principes de la célèbre Théorie du Ruissellement. Théorie qu'un sympathique caricaturiste a bien voulu illustrer pour nous.

                    

Illustration 4

  Redevenons sérieux quelques instants. La Théorie du Ruissellement (en anglais, trickle down economics) est une théorie économique d'inspiration néolibérale selon laquelle les revenus des plus riches sont toujours in fine réinjectés dans l'économie par le biais de la consommation – équipement de yachts, frais de domesticité et autres achats de Rollex – contribuant ainsi directement ou indirectement à l'activité économique générale et à la création d'emplois de gens de maison. Tout bénéfice pour la collectivité.

Illustration 5

  Les cours d'eau ne s'accumulent pas au sommet d'une montagne ; ils ruissellent vers les vallées environnantes, nous explique Milton Friedman, le théoricien néolibéral, père spirituel de Ronald Reagan et de Margaret Thatcher, concluant de façon morale, les riches ne sont pas riches aux dépens des pauvres. Bien au contraire ! 

  Par contre, indique-t-il, les détestables et confiscatoires prélèvements fiscaux sur les plus riches nuisent à la création de richesses et minorent globalement le phénomène de ruissellement-redistribution vers les plus pauvres. Pour conclure et simplifier : embêter les riches revient à créer de la pauvreté supplémentaire.

          À cette solide et largement étayée démonstration des vertus et de la moralité de ces transferts sociaux – que les petites et moyennes gens donnent aux riches, ils s'en retrouveront moins pauvres – peu d'économistes ont pu opposé de sérieux arguments contradictoires. Nous ne parlerons pas évidemment des thèses des discrédités et archaïques économistes marxistes et keynésiens aux prétentions toujours échevelées.

  Voilà pourquoi, en enfants sages et raisonnables, et nous vous invitons à faire de même, nous gardons confiance en cette fable de Robin Hood à l'envers.

                                     

Illustration 6

          Pour en revenir à notre toast beurré et à son atterrissage sur le carrelage de la cuisine, toujours du même côté, le beurré, nous avons pu élucider le mystère. L'explication du phénomène renvoit aux lois fondamentales de la physique.

  Deux paramètres rentrent en jeu : la hauteur de la table de la cuisine – environ 75 cm – et la loi de la gravitation universelle. Quand au terme de sa chute, le toast touche le sol carrelé, il n'a pas eu le temps d'effectuer plus d'une demi-rotation sur lui-même. Posé au départ sur la table sur la face non beurrée, il atterrit ainsi sur le sol sur celle beurrée. Pour qu'il tombe sur l'autre face, sans faire de taches sur le carrelage, il aurait fallu que la table ait plus de 3 m de haut ou que la gravité soit plus élevée. Conditions pratiquement jamais remplies dans nos kitchenettes.

  Quant au budget 2018, il n'y a là nul mystère. Ils est issu en droit fil des effets d'entourloupe et de bonneteau de l'élection du printemps dernier. Pour le corriger dans le bon sens, il faudrait de nouvelles élections. Travaillons à en remplir les conditions.

                                       

Illustration 7

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