Keeping oneself away from hell. (Pour échapper à l'enfer).
(De notre correspondant Jean Casanova à Waco - Texas)
C'est humblement, en véritable "born again Christian", selon la référence à la parole de Jésus à Nicodème (Évangile de Jean): "En vérité, en vérité, je te le dis, si un homme ne nait de nouveau, il ne peut voir le Royaume de Dieu", que Georges Walker Bush, 43e président des États-Unis d'Amérique, a quitté ce dimanche, tôt le matin son ranch de Prairie Chapel, pour venir s'agenouiller sur le dallage froid de la petite église de Crawford, Comté de MacLennan, État du Texas.
S'agenouiller la tête baissée pour demander pardon, non pas de ses crimes, c'est à la justice des hommes qu'il reviendra de se prononcer, mais de ses péchés, à Dieu, péchés commis lors de sa croisade contre l'axe du Mal. De ses péchés et de ses mensonges.
10 ans après, la liste est longue à dresser: une nation explosée, l'Irak, et vouée au chaos; 200 000 morts civils; une civilisation antique déchiquetée et éparpillée à jamais; pour sa propre nation, les États-Unis d'Amérique, 5000 morts, 40 000 blessés, 1000 milliards de dollars partis en fumée (ou plutôt dans la poche du complexe militaro-industriel), des milliers d'anciens combattants psychopathes, véritables bombes à retardement, psychopathes confondant désormais galeries marchandes et campus d'université avec les champs de tir de Falloudja et de Tikrit.
À ses côtés, son père Georges Herbert et sa mère Barbara, tous deux effondrés et conscients qu'il n'échapperait pas au châtiment de Dieu, Georges en solide rationaliste qui sait que de tels crimes ne peuvent rester impunis, sa mère Barbara qui, comme toutes les mères, connaît le prix de la vie, au désespoir de voir celui qu'elle a engendré, responsable de la mort de tant d'enfants.
Au deuxième rang, venus assister le pêcheur en quête de rédemption, ses anciens complices, le pieux Aznar et le sordide et cynique Blair pour qui, le déplacement ne coûtait que le prix d'un billet d'avion aller-retour, et ce n'était pas lui qui avait payé. Seule présence refusée par le pasteur de Crawford, celle de Berlusconi, le saint homme ayant considéré comme une souillure pour sa chapelle, la venue en ces lieux de ce débauché notoire.
Plus discrets, au fond de la crypte, le regard masqué de lunettes noires, malgré la pénombre habituelle des lieux de culte, d'anciens apôtres de la Confrérie des Droits de l'Homme qui avaient prêché avec ardeur, dans leur propre pays, le soutien à la croisade, comparant l'arrivée des chars US à Bagdad à ceux de la 2°DB dans Paris. Ils étaient là quand même, bien que ne croyant pas en Dieu, profil bas et douloureux, avec cette cautèle qui ne les quittait jamais: Bernard Kouchner, André Glucksmann, Pascal Bruckner, Romain Goupil et Alain Finkielkraut, soulagés de n'être pas au premier rang et confiants qu'au final, on ne leur tiendrait pas rigueur, imbéciles embarqués qu'ils étaient toujours, dans chaque grande cause du Monde Libre face au Totalitarisme, ligne de conduite primaire qui les privait, il faut bien le reconnaître, de beaucoup de discernement.
Après avoir reçu la confession du pénitent, le pasteur remonta en chaire. Et déclama, propos énigmatiques pour l'agnostique que je suis: "Jésus a dit: Un semeur sortit pour semer sa semence. Comme il semait, une partie de la semence tomba le long du chemin. Elle fut foulée aux pieds, et les oiseaux du ciel la mangèrent. Ceux qui sont le long du chemin, ce sont ceux qui entendent; puis le Diable vient et enlève de leur cœur la parole, de peur qu'ils ne croient et soient sauvés. Lorsque un homme écoute la parole du royaume et ne la comprend pas, le Malin vient et enlève ce qui a été semé dans son cœur".
Propos énigmatiques que je rapporte à mes lecteurs, mais que je crains de trop bien comprendre: repentir insincère ne peut recevoir véritable pardon!