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Toujours tenter, derrière les symptômes, d'identifier la maladie ; derrière les faux-semblants, la réalité (Louis Pasteur).

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Billet de blog 19 juillet 2014

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Au chevet d'un centenaire qui ne veut pas mourir.

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  (De notre envoyé J. Casanova à Jouy-en-Josas,  Yvelines)

           Discrète et recueillie cérémonie en cet après-midi du 15 Juillet à la Résidence Juliette-Victor, 13 rue des Fonds à Jouy-en-Josas, établissement d'accueil pour personnes âgées, structure hospitalière privée à but non-lucratif, c'était le vœu de notre centenaire de s'y voir installer par ses  affectueux enfants alors qu'il était encore un robuste septuagénaire, discrète cérémonie de famille à laquelle ne manquaient pas de nombreux amis pour y fêter son justement centième anniversaire.

  Eh oui ! 100 ans ! Voilà l'âge qu'atteignait maintenant le vieil homme que les rigueurs de l'âge, tempus fugit, obligeaient à cette retraite forcée, sans qu'il n'ait cessé, aujourd'hui encore, de recevoir les hommages de tous ses obligés, de tout ceux qui lui souhaitaient longue vie, en un mot de tous les républicains. Secrétaire national de l'AJR (Association des Journalistes Républicains), c'était également à ce titre que j'étais présent et, engagement professionnel oblige, chargé de vous en  faire la relation.

           Représentants du monde associatif et mutualiste, syndicalistes, élus citoyens, militants anonymes, tous les invités se pressaient autour des petites tables disposées dans le jardin fleuri de la résidence, autour du plateau où 100 bougies vacillaient sagement, attendant d'être soufflées. Un absent cependant, et d'importance, le Président de la République. Comment, commençait-t'on à s'indigner, car il ne s'agissait pas d'un retard dû à un accident de scooter, le Président de la République absent à cet anniversaire ?

           Il est temps maintenant, chers lecteurs, de vous révéler l'identité de notre valeureux vieillard : l'Impôt sur le Revenu, né à la Chambre le 15 Juillet 1914 (100ans), acte de naissance porté par la formidable éloquence de Jean Jaurès et soutenu par tous les Républicains d'alors : radicaux, socialistes et hommes de progrès rassemblés autour du mot d'ordre jaurésien : "Oui, nous votons énergiquement, passionnément pour instituer l'Impôt sur le Revenu général et progressif, sur le Capital et sur la Plus-value avec déclaration contrôlée". Général et progressif, la formule était forte, et en scellait ainsi le caractère républicain. 

  Écho à la si belle formulation de l'article 13 de la Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen du 26 Août 1789 : "Pour l'entretien de la force publique et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés".

  Et comme pour rajouter l'insulte au manquement, les services de la Présidence nous indiquaient que le Président de la République était en tournée des popotes au Mali et en Centrafrique.

          "Eh bien, nous ferons sans lui !" déclara l'encore lucide centenaire. "Mes amis, à notre santé !"

Mâle et émouvante déclaration, car nous le savions tous gravement atteint, peut-être condamné, si aucun remède citoyen n'était trouvé, et dans les délais les plus rapides. Le médecin de la résidence avait communiqué aux proches le diagnostic d'affection dégénérative très avancée, sans entrer dans des développements contraires au noble principe du secret médical, et signifié l'avancée et la gravité du mal en leur commentant le petit panneau, la pancarte, qu'il est de coutume d'accrocher au bas du lit de chaque résident.

Et j'ai pu, chers lecteurs, m'en procurer une copie à l'aide de la fonction photo de mon Smartphone. Je vous la livre :


Il y apparaissait nettement la gravité de l'affection contractée il y a maintenant plus de 50 ans, mortelle dans son évolution et dont la teneur pouvait être résumé en deux points : 

- l'Impôt sur le Revenu progressivement démantelé au profit des plus riches : le 1% des plus gros revenus contribuant de moins en moins ; le 90 % des plus bas revenus contribuant de plus en plus, au point maintenant, croisement des courbes, de contribuer plus que les très hauts revenus.                                  - cette évolution n'était pas spontanée. Tous les gouvernements depuis plus de 30 ans y avaient allègrement contribué (c'est le mot)  par tout un arsenal de mesures votées par des majorités complices : diminution du nombre de tranches, nuisant ainsi à la progressivité ; suppression des tranches élevées (65 % encore en 1986, 45 % tout juste aujourd'hui) ; niches fiscales ; yeux fermés sur la grande fraude et l'évasion...


 Le tout aboutissant aujourd'hui au pernicieux et mortel paradoxe que la grande majorité du peuple supportait l'essentiel de la charge dont on avait éradiqué l'essence républicaine en en quasi-absolvant quelques dizaines de milliers d'ultra-privilégiés. Politique menée jusqu'à la provocation puisque le magazine Challenges nous annonçait pour 2013, 12 milliardaires de plus en France qu'en 2012. La grande réforme fiscale, emballée dans le container des Promesses du Bourget, dont vous savez, chers lecteurs, que nous avons perdu la trace au fond de quelque océan, la grande réforme fiscale coulée , c'est aurait dit Jaurès, le père de notre centenaire, "l'esprit de la République piétiné".

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