J’ai déjà fait quelques posts ici et je ne sais trop où ça mène (même si l’important est surtout de lire ce que les autres blogueurs ont à dire), mais je pense qu’il faut plus publier sur l’examen de la pétition contre la loi Duplomb, qui a commencé en début de mois et qui, à en croire un article d’Amélie Poinssot sur Médipart, s’est moins concentré sur la signification d’une mobilisation de deux millions de signataires que sur les conditions d’un contournement de l’interdiction par le Conseil constitutionnel. L’examen de la pétition devrait se poursuivre en séance plénière à l’assemblée le 24 novembre.
Apparemment, le lobby de l’industrie de la noisette est à la manoeuvre pour réintroduire l’acétamipride. Mais je sais aussi de source sûre que le lobby des betteraviers est à la manoeuvre pour poursuivre le même objectif.
Les alternatives à l’acétamipride existent mais les grands lobbys s’entêtent, alors que leur discours est incohérent! Quelqu’un comme Franck Sander (qui cumule les mandats de vice-président de la FNSEA, président de la CGB (planteurs de betteraves à sucre), 3ᵉ vice-président du Copa-Cogeca… Une véritable machine politico-agricole alors qu’il se présente comme un “homme du terrain”) porte partout avec lui des incohérences criantes.
D’un côté, il se présente comme le défenseur de la souveraineté alimentaire. De l’autre, il pousse pour un modèle betteravier dépendant d’industriels comme Bayer, Syngenta, Corteva ou BASF, sponsors de la CGB et accusés d’avoir dissimulé des études montrant la toxicité de leurs produits. Comment prétendre défendre la souveraineté française tout en s’appuyant sur les plus grands groupes phytosanitaires du monde, eux-mêmes épinglés pour leurs exportations de pesticides interdits en Europe ?
Quand Sander parle souveraineté, il brouille les cartes : parfois la souveraineté est française, parfois européenne, selon ce qui l’arrange. Et quand il veut justifier les néonicotinoïdes, il ressort systématiquement la carte de la menace sur le sucre, l’éthanol, la méthanisation, les gels hydroalcooliques… sauf qu’il oublie de préciser que ces usages sont concurrents entre eux. On ne peut pas produire en même temps plus de sucre alimentaire, plus de carburant, plus de méthane, avec la même betterave. Mais ce flou lui permet de défendre un modèle où la betterave est partout, donc où lui-même reste indispensable.
Et puis il y a les conflits d’intérêts. La famille Sander, c’est une petite dynastie : le père ancien président de Crédit Agricole SA, la sœur Anne, ancienne députée européenne très proche des lobbys agricoles et pro-néonicotinoïdes, et lui à la tête d’organisations au financement intimement lié aux industriels des pesticides. Tout cela sans figurer sur les registres de transparence : ni à la HATVP, ni au registre européen. Même la CGB, qui finance Naples Investissement pour de l’influence à Bruxelles, n’apparaît pas comme telle. Pour un homme qui “défend les agriculteurs”, ça fait beaucoup d’ombres.
Je suis sûr qu’on pourrait creuser, mais ce qui me met en rogne, ce n’est pas Sander en tant que personne. C’est ce qu’il incarne : un système où une poignée de dirigeants façonnent les politiques agricoles selon les intérêts de l’industrie chimique et de la filière betteravière, tout en prétendant parler “au nom des agriculteurs”. Pendant ce temps, les apiculteurs crèvent, les sols meurent, et les paysans bio passent pour des rêveurs.
Je ne demande pas grand-chose : juste qu’on arrête de confier notre avenir agricole à des gens qui vivent dans un autre monde, aux poches pleines, connectés aux lobbys et déconnectés de la terre. Il est temps de sortir de cette illusion. La pétition contre la loi Duplomb était une première étape très importante de cette prise de conscience citoyenne. Il ne faut pas laisser ces lobbyistes et des députés paralysés par la présidentielle de 2027 nous voler cette première victoire!