Non dissolution des SLT : Quel avenir pour les groupes de contestation écolos ?
Le Conseil d'État a suspendu le décret du 21 juin 2023 prononçant la dissolution du mouvement des Soulèvements de la Terre. Ainsi, il a émis de sérieux doutes sur la justesse de cette initiative lancée par le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, souhaitant dissoudre l’organisation en la faisant passer pour un « groupement de fait ».
Durant trois heures, les avocats de l’association ont battu en brèche les griefs du gouvernement. « Il ne s'agit pas d'un groupement de fait mais d'un mouvement composite et horizontal qu'on ne peut pas dissoudre », a expliqué Me Aïnoha Pascual. Elle a également nié l'appel à la violence contre les personnes : « C'est la désobéissance civile qui est valorisée ». Dans son essai Comment saboter un Pipeline (La Fabrique 2020), Andreas Malm dit : « La désobéissance civile est une tactique – une chose qu’on fait parce que ça marche, ce qui suppose qu’on puisse réévaluer régulièrement son efficacité. ». On devrait alors dire : certes, la violence a été employée dans la lutte contre l’esclavage, contre le monopole masculin sur le suffrage ; la lutte contre les combustibles fossiles et les mégabassines est d’une tout autre nature et elle ne triomphera que par des moyens absolument pacifiques. Y a-t-il donc des raisons convaincantes de tenir une telle position sur les questions écologiques ? Les dysfonctionnements environnementaux créés par les mégabassines ou les pipelines sont-ils si superficiels qu’on puisse les arracher avec moins d'effort que tous ces autres maux ? Ne sont-ils pas inextricablement mêlés à un pouvoir souverain et à des profits fabuleux ? Andreas Malm laisse entendre que si, et soutient la création de mouvements pour défendre un modèle de société écologique et juste. « Lorsque Reznicek et Montoya s’étaient engagées dans le mouvement contre le pipeline Dakota Access au moment de Standing Rock, rappelle le philosophe ; face à la défaite, elles ont choisi de passer à la vitesse supérieure plutôt que de capituler. Ainsi, après avoir examiné et épuisé toutes les formes d’action possibles, dont la participation à des réunions publiques, la collecte de signatures pour réclamer des études d’impact environnemental, les manifestations et les rassemblements, les boycotts et les campements, de nombreux membres des Soulèvements de La Terre nous indiquent qu’ils ont constaté l’incapacité évidente du gouvernement d’Emmanuel Macron, mis en cause pour son inaction climatique.
Une crise comme celle que nous venons de vivre avec Les Soulèvements De La Terre bouleverse tout, même nos boussoles morales. Comme sur d'autres questions comme le handicap ou l'autisme, les radicaux d'hier, comme Martin Luther King à la fin des années 50, sont les modérés demain. Quant à XR et Les SLT, eux, prennent la relève. Comme tout mouvement, ils évoluent, se font une place. Andreas Malm envisage déjà le jour où XR, en face-à-face avec le gouvernement britannique, bataillera sur les émissions à stopper : 2025 ou 2028, qui dit mieux ? (« Lorsque les représentants d’XR s’assiéront avec le gouvernement britannique pour négocier une transition vers un arrêt des émissions en 2025 – les ministres insisteront peut-être pour repousser à 2028 –, on pourra enfin parler d’une véritable politique d’atténuation. ») Mais pour s'asseoir à cette table de négociation, XR et Les SLT auront besoin de gagner en sagesse. Ils devront devenir moins radicaux. Comme Luther King, qui a lui aussi bénéficié d'alliés inattendus à partir du milieu des années 60. Ainsi, les radicaux, sont toujours là pour mettre le boxon à des évènements comme Sainte-Soline, tandis que les modérés font l'affaire. Bonne nouvelle pour les partis politiques de gauche écologistes, souvent réputés pour être moins radicaux ? Sûrement. Ce matin, des journalistes du Figaro expliquaient que les partis traditionnels comme le PS et le PCF continuent de s'appuyer sur leur réseau d'élus locaux et gagnent des adhérents en parlant d’écologie. Le PS, par exemple, vise à intégrer immédiatement les nouveaux membres dans leur section locale. Le Parti communiste, quant à lui, s'est renouvelé grâce à la visibilité de son leader, Fabien Roussel. Et les futurs militants radicaux ? Ils devront s'attendre à être les bêtes noires des traditionnels. Ils doivent même l'espérer. Sinon, ils seraient juste... un de plus dans la masse. Quant aux membres des Soulèvements De La Terre, pas la peine de les convertir tous à l'art du cocktail Molotov. Ce sera le boulot des futures factions. Rien de moins, rien de plus.
Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.